Pauline Marois vue par… (3)

2007/08/10 | Par L’aut’journal 

Pauline Marois est maintenant à la direction du Parti Québécois. En attendant la publication d’une biographie qui lui sera consacrée, il est possible de retracer les grandes lignes de son parcours politique dans les biographies consacrées aux politiciens québécois. Nous en publions les extraits pertinents dans une série d’articles sur ce site.

Au menu de ce troisième article, des extraits de la biographie de Jacques Parizeau par Pierre Duchesne (Québec Amérique).


Secrétaire de presse de Parizeau

La jeune Pauline succède à Michel Héroux au poste de secrétaire de presse du ministre des Finances Jacques Parizeau en octobre 1978. Celle qui a suivi les cours de Jacques Parizeau au moment d’entreprendre sa maîtrise en administration des affaires ne reste en fonction que six mois. « La disponibilité constante, je trouvais cela tellement exécrable. Je me sentais personnellement en dessous de tout, puisqu’on ne m’utilisait pas à la hauteur de mon talent », raconte-t-elle.

Anecdote intéressante : en septembre 1974, Pauline Marois faisait partie du comité de grève des étudiants du MBA qui cesseront d’aller à leurs cours pendant quelques jours, en guise de protestation à l’endroit d’une politique de l’institution qui stipule l’expulsion de tout étudiant ayant obtenu plus de trois notes inférieures à C dans le cadre du programme de maîtrise des HÉC. Une étudiante d’origine algérienne était au cœur de ce conflit et avait été, selon elle, notée injustement par deux professeurs, dont Jacques Parizeau.

(tome I, pp. 160-161)

Le « beau risque »

Les 7 et 8 novembre 1984, les orthodoxes se réunissent au cabinet de la ministre Denis Leblanc-Bantey. Avec la présence des ministres Pauline Marois, Bernard Landry et Guy Tardif, le groupe gagne en importance. Pauline Marois, qui trouve Jacques Parizeau trop à droite lorsqu’il s’agit d’élaborer des politiques sociales, se sent toutefois très proche de lui quand il est question de stratégie constitutionnelle : « Il avait des idées claires et là-dessus on se rejoignait bien. »

Les ministres rebelles décident d’affronter le premier ministre René Lévesque de plein fouet. Ils rédigent une lettre dans laquelle ils renouvellent leur engagement envers la souveraineté. Pauline Marois se joint à cette initiative, parce qu’elle « croit vraiment que Lévesque va changer d’avis. »

(…)

Le 9 novembre 1984, dans une lettre commune, les ministres Robert Dean, Louise Harel, Camille Laurin, Bernard Landry, Denis Lazure, Denise Leblanc-Bantey, Marcel Léger, Jacques Léonard, Pauline Marois, Gilbert Paquette, Jacques Parizeau et Guy Tardif font savoir à leur premier ministre qu’ils continuent de croire en la souveraineté.

Ils sont douze à contester ouvertement leur chef. Il s’agit d’un précédent dans les annales du parlementarisme.

« La souveraineté du Québec est pour nous un instrument d’expansion et non de repli », écrivent-ils. Les signataires qui représentent presque la moitié du Conseil des ministres, se disent toutefois favorables à un compromis : la campagne électorale portera principalement sur la souveraineté, mais un référendum sera toujours nécessaire pour en venir à bâtir le pays du Québec.

(…)

Dans les heures qui suivent la fin du Conseil des ministres du 21 novembre, l’atmosphère devient terriblement lourde. En soirée, les ministres orthodoxes se réunissent chez Denis Leblanc-Bantey. Jacques Parizeau ne participe plus aux rencontres du groupe depuis plusieurs jours.

« Gilbert Paquettre, Jacques Léonard, Camille Laurin et Denis Leblanc-Bantey étaient convaincus que seule une démission en bloc des douze ministres qui siégeraient comme députés indépendants pouvait ébranler suffisamment la majorité ministérielle et menacer de faire tomber le gouvernement », écrit Marcel Léger, dans ses mémoires.

Un débat s’amorce pour convaincre les ministres réticents à agir ainsi. Marcel Léger, Guy Tardif, Robert Dean et Pauline Marois ne sont pas prêts à voter contre leur chef. Un violent accrochage met aux prises Denise Leblanc-Bantey et Pauline Marois, qui ne veut plus démissionner. « La population ne nous a pas élus sur ce mandat-là », dit-elle en larmes à Denis Leblanc-Bantey. « Ce fut la pire période de ma vie, rappelle Pauline Marois. Leblanc-Bantey m’attaque personnellement, en me disant que je les lâche, que ceux qui restent sont des traîtres. Ça été très dur. »

(tome II, pp. 492 à 502)

L’affirmation nationale

Au sein de l’équipe parlementaire du Parti québécois, la révolte gronde. Parmi les insatisfaits, Jean Garon et Louise Harel n’attendent qu’une bonne occasion pour malmener leur chef. Chez les non-élus, Pauline Marois, qui siège au Conseil exécutif du parti, travaille sans aucune ferveur pour Pierre Marc Johnson.

(…)

À la fin février, le député Jean Garon démissionne de l’exécutif nationale du parti, parce qu’il se dit incapable de défendre le concept de « l’affirmation nationale ».

Pour sa part Guy Chevrette, le leader parlementaire, en a marre des « mines internes » qui viennent ébranler la cohésion des troupes. « Ils disent n’importe quoi, sans dévoiler leurs vrais motifs, s’écrie-t-il. S’ils ont une patate sur l’estomac et ne peuvent digérer le leadership de Pierre Marc Johnson, qu’ils le disent clairement. »

Dans son style imagé, Guy Chevrette ajoute : « Il est temps d’enlever nos culottes courtes. Garon, comme Bernard Landry, comme Louise Harel et Pauline Marois, entretiennent au sein du PQ une confusion, un nombrilisme, qui nous éloigne de notre vocation de parti et nous rapproche d’un mouvement politique. »

(…)

Le 9 mai, Pauline Marois, qui « commence à en avoir un peu ras-le-bol », déclare publiquement que le Parti québécois a brisé ses alliances avec les forces réformistes. Pour elle, le parti « doit redéfinir sa voie de gauche ».

Elle critique durement Pierre Marc Johnson : « Il essaie de faire image et cela ne lui convient pas. Il se cherche. » Pauline Marois, qui a été membre de l’exécutif national et qui s’est vu refuser la vice-présidence du parti par Pierre Marc Johnson, n’attend que la fin du Congrès pour décrocher. « Je n’avais plus le goût. Quelque chose s’était brisé et puis il y a avait « l’affirmation nationale » qui ne faisait swinger personne. » Pauline Marois prendra ses distances de la politique durant plusieurs mois et elle ira enseigner à l’Université du Québec à Hull.

(Tome III, pp. 40, 42, 47)

Demain: D’autres extraits de la biographie de Jacques Parizeau par Pierre Duchesne

Pour consulter les deux premiers articles, cliquez (1) ou (2)