Les couleurs variées de la gauche

2007/08/13 | Par Jacques Fournier

Ayant la chance d’avoir plusieurs amis qui votent Québec solidaire (QS) et plusieurs autres qui votent Parti québécois (PQ), cela m’offre l’occasion d’avoir de belles discussions de fond. Une chose m’irrite cependant, c’est lorsque certains de mes amis QS ou PQ dénaturent le parti adverse et ne l’analysent pas dans toute sa complexité.

Certains de mes amis QS décrivent ainsi l’échiquier politique québécois : QS occupe à lui seul la gauche, le PQ est au centre ou à droite (un parti « néolibéral »), les libéraux à droite et l’ADQ à l’extrême droite. Cette schématisation ne fait pas la part généreuse à la gauche au Québec : se limite-t-elle donc au 4 % de l’électorat qui a voté QS en 2007? Si c’est le cas, la gauche est drôlement ratatinée.

De même, certains de mes amis péquistes présentent ainsi l’échiquier politique: QS à l’extrême gauche, le PQ occupe la gauche à lui seul, les libéraux se retrouvent à droite et l’ADQ à l’extrême droite. En classant QS à l’extrême gauche, on disqualifie ce parti dans l’opinion publique, à toutes fins pratiques.

Si on réfère aux classifications habituelles des grands partis européens, par exemple, la schématisation devrait se présenter ainsi : QS est à gauche, le PQ au centre-gauche, les libéraux au centre-droit et l’ADQ à droite.

La façon dont les militants de QS qualifient le PQ et la manière qu’utilisent les péquistes pour désigner QS est importante car ces deux partis se doivent minimalement un respect mutuel. Avec les 28 % d’électeurs péquistes et les 4 % d’électeurs QS, cela ne totalise que 32 % de l’électorat, le tiers, qui est teinté des couleurs de la gauche. Les libéraux (33 %) et les adéquistes (31 %) totalisent 64 % de l’électorat, sur la droite. On ne sait trop où classer les 4 % de verts sur l’échiquier gauche-droite.

Bien sûr, de nombreux électeurs QS ont été déçus des politiques du PQ, en particulier lorsqu’il a été au pouvoir entre 1994 et 2003 (et même, il reste des déceptions du mandat 1981-1985). J’ai moi-même écrit des critiques sévères des politiques du PQ au cours de ces années-là. Mais cela ne m’incite pas pour autant à classer le PQ comme un parti de droite. Il faut voir l’échiquier global.

Au cours des prochains mois, voire des prochaines années, mois allons assister à un repositionnement de plusieurs partis. La question de la souveraineté, et de la façon d’y arriver, va susciter de nouveaux débats : QS et le PQ sont deux acteurs qui ont la souveraineté dans leur mire. Je plaide pour que ces deux partis voyagent de concert dans cette direction. QS a toute sa légitimité pour continuer d’exister et de proposer ses solutions. Le PQ n’a pas intérêt à lui donner des crocs en jambe. Il ne m’apparaît pas opportun de parler d’alliances électorales, de partage de comtés ou quoi que ce soit de semblable. Mais j’en appelle simplement au respect mutuel, qui commence en qualifiant de façon appropriée le positionnement de l’autre.

L'auteur est membre du Collectif D’abord solidaires de Longueuil