Le coût des études doit baisser

2007/09/10 | Par Pierre Dubuc

« Il faut aller vers la gratuité. C’est le même message que les chefs des trois grandes centrales syndicales, Claudette Carbonneau de la CSN, Henri Massé de la FTQ et Réjean Parent de la CSQ ont exprimé publiquement lors du Forum social québécois à la fin du mois d’août », précise Ronald Cameron.

« Il faut se remettre sérieusement en chantier là-dessus. Il y a tout un débat à faire sur le financement de l’enseignement supérieur. Un débat qui doit faire une place intelligible à la gratuité scolaire », affirme-t-il. « D’ailleurs, s’empresse-t-il d’ajouter, il faudrait tenir compte des cégeps quant on parle de l’enseignement supérieur. C’est 40% du budget. »

(Sur la photo: Ronald Cameron, le président de la FNEEQ-CSN)

Quand la droite scande : « Faisons payer les riches ! »

Ronald Cameron pense que « le fond de la question se trouve dans le sens à donner à l’accessibilité » et il nous renvoie au statut de l’enseignement supérieur dans notre société. Il rappelle que, depuis les années 1960, « l’éducation a été comprise comme un droit social, comme un bien public, commun et partagé collectivement ».

« C’est pourquoi, rappelle-t-il, l’accès démocratique aux études est, en très grande partie, assumé par l’État à travers la fiscalité générale. »

Le président de la FNEEQ démolit l’un après l’autre les arguments des partisans du dégel des frais de scolarité. « Je trouve pour le moins curieux – et suspect ! – que, tout à coup, la droite se mette à scander : Faisons payer les riches ! On sait très bien que ce sont les plus pauvres qui seront touchés. »

« Par crainte de trop s’endetter, les élèves venant de milieux moins bien nantis privilégieront des formations courtes ou des études par intermittence », dit-il en montrant les conséquences sociales d’une hausse des frais de scolarité.

La FNEEQ en a contre cette approche néolibérale qui considère l’éducation comme un produit et non comme un droit et qui applique la logique de l’utilisateur-payeur. « L’équité, affirme son président, passe par une fiscalité plus juste et non par les droits de scolarité qui sont une mesure régressive » en faisant remarquer que de 1988 à 1998, le nombre de paliers d’imposition est passé de seize à trois.

« Il y a une limite, dit-il, à voir l’éducation supérieure comme un investissement personnel. » Dans le même souffle, il vilipende la hausse prévue des plafonds de contributions au régime d’épargne étude qui ajoute une subvention gouvernementale de 20% à la contribution des individus. « Il a été prouvé que ceux qui profitent d’une telle aide sont ceux qui peuvent le plus épargner ! »

Ronald Cameron prend un malin plaisir à retourner comme une crêpe les arguments de la droite. « On parle beaucoup de la solidarité intergénérationnelle et j’en suis. Notre génération a profité de bas niveaux de frais de scolarité. C’était basé sur une philosophie sociale de promotion collective fondée sur le principe de la justice distributive. »

« Pourquoi aujourd’hui les jeunes devraient-il s’endetter ? », demande-t-il en attirant l’attention sur le fait que le régime des prêts bourses est beaucoup plus « généreux » en prêts qu’en bourses. « Quelle sera la perspective d’avenir d’un jeune couple avec 75 000 $ de dettes ? Les dettes personnelles deviennent un fardeau collectif. »

La solution est ailleurs

Ronald étale les chiffres. Les frais de scolarité ne représentent que de 10 à 15% du budget global des universités. « Il est vrai, reconnaît-il, que les maisons d’enseignement sont sous-financés. Mais la solution réside ailleurs que dans la hausse des frais de scolarité. Il faut chercher d’autres avenues », lance-t-il en soulignant que les universités suédoises et danoises ont inscrit la gratuité scolaire dans un projet social qui fonctionne. « En plus, les étudiants bénéficient de subventions aux logements et d’allocations garanties ».

« Nous vivons dans une société du savoir, se plait-on à nous rappeler. En 2004, au Canada, 70% des emplois exigeaient des études post secondaires. Dans ce contexte, les études universitaires ne doivent plus être considérées comme un luxe réservé à une petite élite. Nous devons donc nous assurer collectivement que les choix de chacun dépendent le moins possible de leur capacité de payer et le plus possible de leur contribution présente et future à une société plus juste et plus équitable », conclut-il

Prêts à appuyer le mouvement étudiant

Ronald Cameron et la FNEEQ suivent avec attention les manœuvres du gouvernement Charest à l’égard du mouvement étudiant. Ronald croit que les annonces de la ministre Courchesne à propos de l’encadrement nécessaire des frais afférents ne sont qu’une tentative pour essayer de calmer le jeu face à la mobilisation étudiante contre le dégel des frais de scolarité.

Sa maigre majoration de 31 millions des prêts et bourses, puisée à même des hausses des frais de scolarité qui rapporteront 30 millions de dollars est de la même eau.

« Nous sommes devant un gouvernement en sursis », lance-t-il. Un gouvernement qui utilise l’argent du fédéral pour baisser les impôts plutôt que de les investir en éducation où les besoins sont criants. »

Dans le cas d’une grève étudiante, quel sera le mot d’ordre de la FNEEQ à ses membres ? « Les dispositions répressives de la Loi 142 nous empêchent carrément d’agir. Mais on ne demande pas à nos profs de jouer aux missionnaires. S’il n’y a pas d’élèves dans la classe, le prof n’a pas à sanctionner les étudiants. Il ne faudrait quand même pas alourdir le problème de la réussite », lance-t-il sourire en coin.