Guatemala : violences au premier tour des élections

2007/09/14 | Par L’aut’journal 

Dimanche, le 9 septembre dernier, a eu lieu au Guatemala le premier tour de scrutin d’élections considérées comme les plus violentes depuis le début de la transition démocratique en 1985.

En effet, cette campagne aura fait au moins 49 victimes entre candidats ou candidates, activistes de partis et membres de leurs familles. En 2003, 28 personnes avaient été assassinées. Cette situation reflète la détérioration constante de l’état de droit au Guatemala et le manque de volonté politique pour appliquer les Accords de paix signés en 1996 entre l’armée, le gouvernement et l’Union nationale révolutionnaire guatémaltèque (URNG).

Dans un tel climat, pas étonnant que la moitié des électeurs se soit abstenu de voter (40%) ou ait annulé son vote (9.5%).

Les candidats qui s’affronteront lors d’un second tour, le 4 novembre prochain, sont Alvaro Colom (Union nationale de l’espoir : UNE) et le militaire Otto Perez Molina (Parti patriote : PP). Colom (centre), a obtenu 28.3% des votes tandis que Perez Molina (droite) en obtenait 23.5%.

(Photo: AP/Rodrigo Abd. La candidate à l'élection présidentielle Rigoberta Menchu, le 7 septembre 2007)

6 000 assassinats par année

L’ex-prix Nobel, Rigoberta Menchu, dont la candidature a créé de fortes attentes à l’étranger n’a obtenu que 3% des voies.

On compte actuellement autour de 6 000 assassinats par année dans ce pays de 12 millions d’habitants. Il s’agit d’un taux d’homicide comparable à certaines étapes du conflit armé. Moins de 5% des homicides conduisent à une condamnation. Selon Philip Alston, Rapporteur spécial de l’ONU, « le Guatemala est un excellent endroit pour commettre un meurtre » [1].

Les autorités ont été impliquées dans plusieurs cas de torture et d’exécutions extrajudiciaires durant les dernières années. En outre, les attaques contre les défenseurs des droits de la personne sont passées de 29 en 2001 à 278 en 2006 et 136 dans les 6 premiers mois de 2007, et ce en toute impunité [2].

Il est de notoriété publique que le contrôle de l’État fait l’objet de négociation et de lutte entre des groupes de pouvoirs membres des secteurs économiques, du crime organisé et des mafias militaires. Cela vide l’État de droit de sa substance et le détourne de ses responsabilités envers la population guatémaltèque. Ceux qui travaillent pour défendre les droits de la personne font l’objet d’attaques constantes.

Des militaires candidats

La lutte contre l’impunité, spécialement pour les crimes commis durant le conflit armé, doit être une priorité du prochain gouvernement et de la communauté internationale. En ce sens, il est inquiétant que des militaires ayant pris part au conflit aient été candidats aux élections.

C’est le cas du général Efrain Ríos Montt, qui a été élu au Congrès, et sur lequel pèse un mandat d’arrêt international émis par la justice espagnole pour génocide, terrorisme, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Plus inquiétant encore, est le fait qu’un autre militaire, le général Pérez Molina, ait de bonnes chances de remporter la présidence au deuxième tour de scrutin.

Depuis 15 ans, plus de 300 accompagnateurs du PAQG ont fournit un accompagnement international à des défenseurs des droits de la personne guatémaltèques dans le but d’observer et de documenter les attaques dont ils pourraient faire l’objet. Cette mesure de protection et d’appui moral est offerte, entre autres, à des survivants du génocide engagés dans des poursuites judiciaires contre des militaires.

Selon la Commission d’éclaircissement historique des Nations Unies, le conflit armé a fait plus de 200 000 morts au Guatemala. 93% des violations aux droits de la personne furent commises par les forces gouvernementales, incluant des actes de génocides. Aucun militaire n’a été jugé pour ces crimes.

Pour plus d’information, contactez le : PAQG au 514-495-3131 ou consultez le site web.

[1] Philip Alston, Mission to Guatemala, Adendum to the Report of the Special Rapporteur on extrajudicial, summary or arbitrary executions to the General Assembly, New York, 2007, p.17
[2] Unité de protection des défenseurs du Mouvement national pour les droits de la personne, Informe enero-junio 2007 disponible en cliquant ici.