La Grande oubliée du Grand verglas

2008/01/10 | Par Pierre Dubuc

« Si le Québec a pu s’en tirer si bien lors du Grand verglas, c’est parce qu’Hydro-Québec est une société publique au service du peuple ». C’est le message qu’ont tenu à nous livrer les présidents et la présidente des trois principaux syndicats d’Hydro-Québec rencontrés dans leurs bureaux sur la rue de Liège à Montréal.

Richard Perreault, Claude Arseneault et Josée Durand des sections locales 1500, 2000 et 957 d’Hydro-Québec ont bien rigolé lorsqu’André Caillé a déclaré avoir regardé au ciel et invoqué Dieu lors de la crise du verglas. Eux savent que le tout s’est joué sur le plancher des vaches et que la partie a été gagnée parce que les syndiqués ont accepté de mettre de côté leurs conventions collectives et de travailler jour et nuit pour rétablir le courant.

Finies les vacances !

Richard Perreault du Syndicat des employé-es de métier se rappelle bien ce 6 janvier 1998. « Une bonne partie de nos gens étaient en vacances. Ils n’ont pas hésité à les interrompre, à quitter leurs familles et pendant 35 jours, nuit et jour, ils étaient à l’ouvrage. »

« Nos gens ont aussi pris des risques. Avec l’accord de la CSST, nous avons fait des choses qui étaient dangereuses, qu’on ne faisait pas habituellement. Mais la situation le commandait », raconte Richard Perreault en se faisant un point d’honneur de souligner qu’aucun de ses 2000 monteurs n’a été victime d’accident d’origine électrique. « C’est tout un exploit ! », lance-t-il avec une fierté non dissimulée.

Pendant que les monteurs du 1500 grimpaient dans les poteaux et les pylônes, les employé-es de techniques professionnelles et de bureau de la section locale 2000 s’occupaient de l’intendance. « On gérait le matériel dans les magasins. On tenait les inventaires, on distribuait le matériel sur le terrain, explique Claude Arseneault. Nos gens faisaient la patrouille dans les zones sinistrées. On dirigeait les secours, les ressources aux bons endroits. »

« C’est nos employés de bureau qui recevaient les appels de la population. C’était pas toujours évident. Il fallait rassurer, expliquer », poursuit-il.

Les anciens appelés à la rescousse

« L’expertise de nos techniciens a été mise à contribution, raconte à son tour Josée Durand de la section locale 957. Il a fallu inverser le flux d’électricité. En importer de l’extérieur du Québec plutôt que d’en exporter. »

« À certains endroits, on a dû revenir à d’anciennes technologies que nos employés ne maîtrisaient pas. Nos gens se rappelaient des plus vieux, les seuls à connaître ces techniques. Ils les ont retracé pour qu’ils viennent remettre les choses en ordre. »

Les trois dirigeants sont unanimes : tout cela a été possible parce qu’Hydro-Québec est une entreprise publique qui couvre l’ensemble du territoire, avec la même expertise, les mêmes méthodes de travail. On a peine à imaginer, nous disent-ils, quelle aurait été la situation si le réseau électrique avait été fractionné en plusieurs entreprises privées, chacune avec ses façons de faire, chacune cherchant à tirer profit de la situation.

D’ailleurs, le jour où je les ai rencontrés, le Québec venait d’être touché par de grands vents. « Juste dans les Laurentides, il y a 655 pannes, de nous dire Richard Perreault. Toutes nos équipes sont à l’œuvre. On va travailler jour et nuit jusqu’à ce que tout le monde soit rebranché. Notre monde savent qu’ils travaillent pour le monde, qu’on est un service public ! »