Redonner aux Québécois leur agriculture

2008/02/15 | Par Roméo Bouchard

Roméo Bouchard est coordonnateur de la Coalition et ex-président-fondateur de l’Union paysanne.

Le rapport Pronovost sur l’avenir de l’agriculture au Québec s’inscrit naturellement dans l’optique de démocratisation des pouvoirs et d’occupation du territoire que préconise la Coalition pour un Québec des Régions. C’est un rapport puissant qu’il faut lire.

Le rapport constate que l’agriculture québécoise, particulièrement en région périphérique, est en train d’étouffer dans les structures rigides de production, de mise en marché et de protection du territoire agricole où l’a enfermé le monopole syndical de l’UPA.

Sous le modèle unique et mur à mur de l’UPA, l’agriculture s’est enfermée dans quelques grandes productions de masse, le lait, le porc, le poulet et les œufs, qui se concentrent dans les régions centrales et siphonnent tous les fonds publics car elles sont de moins en moins en mesure de compétitionner les produits des pays émergents.

En proposant d’ouvrir l’agriculture aux jeunes, de diversifier les modèles de production, de rétablir la liberté d’association, de favoriser les fermes familiales, les pratiques écologiques et les circuits courts de mise en marché, de donner plus d’autonomie aux instances locales et régionales pour l’aménagement et la protection du territoire agricole, le rapport veut libérer l’agriculture, la renouveler, la rendre plus compétitive, plus présente sur tout le territoire, enfin, le rapprocher des consommateurs d’aujourd’hui.

«Une agriculture au pluriel», selon l’expression utilisée par le rapport, qui fait écho au «Libérer les Québecs», de la Coalition. Un Québec au pluriel!

Mais nos politiciens, tout comme ils préfèrent laisser tous les pouvoirs à l’État central plutôt que de les redonner aux collectivités territoriales, laisser la forêt aux papetières plutôt que de la redonner aux collectivités régionales, vont sans doute préférer laisser l’agriculture à l’UPA plutôt que de la redonner aux Québécois et aux vrais agriculteurs pour qu’ils puissent en vivre 

«Ça va bien présentement pour le parti libéral, déclarait un organisateur du parti au lendemain du rapport Pronovost, on veut pas avoir de trouble avec ça». 24 heures après la publication du rapport, le gouvernement Charest annonçait qu’il ne toucherait pas au monopole syndical de l’UPA et les deux partis d’opposition de même.

C’est bien là le trouble : aucun des partis politiques en place ne veut entreprendre quelque réforme que ce soit, parce qu’ils ne veulent pas avoir de trouble et risquer de baisser dans les sondages.

On est dû pour une deuxième Révolution tranquille, celle de la démocratie.