Mort d’homme à la Baie James

2008/03/03 | Par L’aut’journal 

Les rapports préliminaires de la CSST sont explicites: ce sont les méthodes de travail et les équipements utilisés qui sont en cause dans ce triste accident ayant coûté la vie au jeune Christopher Fortin le 8 février dernier sur le chantier Eastmain-1 –A à la Baie James. Du côté d’Hydro-Québec, aucun commentaire n’a été émis… Un silence à donner froid dans le dos.

Décès du jeune Christopher Fortin

Rappelons d’abord les faits. Christopher Fortin a été écrasé mortellement par un module ayant glissé lors de sa manutention exécutée par deux chariots élévateurs à fourches alors qu’il s’afférait, avec trois autres travailleurs, à l’installation d’un dortoir modulaire au campement Eastmain.

Le soulèvement et la manutention du module s’effectuaient avec deux chariots élévateurs à fourches munies de rallonges. On ne connaissait ni le poids de la charge (le module) ni la capacité de levage des chariots ainsi modifiés pour lesquels il n’y avait, par ailleurs, aucun avis de conformité dûment signé par un ingénieur comme il se doit. Pire encore, un essai de levage a provoqué le soulèvement arrière du chariot, indiquant clairement une surcharge.

Chante-la ta chanson…

Méthodes de travail inadéquates, organisation du travail déficiente, équipements de travail non conformes, alouette! Des dizaines de fois tous les ans, on nous sonne la même rengaine et chaque fois, c’est la même comédie: on s’étonne, on s’incline, on «prend bonne note du rapport et des recommandations de façon à ce qu’un accident aussi terrible ne se reproduise plus».

Dans le cas d’Hydro-Québec, la situation est encore plus vicieuse. D’ailleurs, l’inspecteur a jugé la situation telle, qu’il a non seulement ordonné l’arrêt des travaux d’installation du baraquement au campement Eastmain, mais aussi les travaux de démantèlement du camp Flamand de Rapides-des-Cœurs et de Chute Allard de même que du baraquement de Péribonka, puisque ces travaux sont sous la responsabilité du même employeur et du même maître d’œuvre.

Délinquance et insouciance, un duo explosif

Deux accidents mortels en un mois, de nombreux accidents sur l’ensemble des chantiers dont elle a la responsabilité, aucun plan de prévention pour des chantiers de grande importance dûment accepté par les parties et la CSST, aucune organisation du travail, aucune planification… Hydro-Québec et les employeurs ne font que réagir aux évènements, sans aucun souci de prévention.

Décidément, la société énergétique affiche clairement une attitude délinquante en matière de santé et de sécurité du travail. Pourtant, elle est le maître d’oeuvre des chantiers les plus importants à l’heure actuelle au Québec; pensons seulement aux travaux sur le territoire de la Baie James et du projet de la Romaine qui débutera sous peu. Elle a la responsabilité de la santé et de la sécurité de centaines de travailleurs et de travailleuses.

Tout est une question d’image

Un accident mortel? Pas de problème, l’affaire sera bien vite oubliée dans l’opinion publique. Un simple mauvais moment à passer. Chut! Pas de commentaires… les choses vont nécessairement se tasser d’elles-mêmes…

Au moment jugé opportun, il suffit de lancer une campagne médiatique pour bonifier notre image. À ce sujet, Hydro-Québec a justement lancé en grandes pompes, sur les ondes de TVA et sur le portail Internet de Canoë, une série de publicités faisant l’éloge de son expertise multiple: environnement, relation avec les autochtones, développement technologique, éco-énergie, etc. Tout est bon pour se «beurrer» la face et redorer son image de grand bâtisseur du Québec moderne!

Protection de l’environnement, de la pêche, des poissons… et les travailleurs?

Un paysage idyllique sur un fond de grands espaces. Une biologiste nous explique comment Hydro-Québec innove en matière d’environnement. À les écouter, le projet d’Eastmain-1-A est pratiquement parfait. Tout a été prévu à la conception: mesures de prévention, d’atténuation, mécanismes de rectification et d’ajustement. On intègre même le savoir-faire ancestral des autochtones. La FTQ-Construction félicite sincèrement Hydro-Québec pour son virage vert…

… mais nous attendons avec impatience le jour où la vie des travailleurs et des travailleuses sera prise avec autant de considérations. En matière de santé et de sécurité, la FTQ-Construction réclame depuis longtemps des mesures relatives à l’organisation du travail, à la planification des travaux et à l’implication des travailleurs. C’est pourtant simple et réaliste. La preuve en est qu’Hydro-Québec l’applique en matière d’environnement.

Arrêtons de se leurrer. Ce qui se passe sur les chantiers de construction en santé et sécurité du travail n’est pas une priorité pour Hydro-Québec.

Source : FTQ-Construction