La vigoureuse croissance économique de Cuba

2008/09/24 | Par Léo-Paul Lauzon

Rien que par le titre de mon article, j’ai comme l’impression que je vais encore me faire crier des noms épouvantables à ne pas répéter devant de jeunes enfants. En passant, puis-je paraphraser le grand dramaturge français Sacha Guitry qui a dit : «Si tous ceux qui disent du mal de moi savaient exactement ce que je pense d’eux, ils en diraient davantage».

Je commence donc par vous citer ma source : Business Week, la revue d’affaires la plus vendue aux States qui a, le 10 mars 2008, consacré un article à Cuba intitulé «The Cuban economy : After the Smoke Clears». Comme référence, vous conviendrez avec moi et ma mère que ça fait pas mal plus sérieux que les cancans et les ragots des économistes de banques et de l’Institut économique de Montréal et des analyses tordues du Fraser Institute, un organisme patronal d’extrême droite auquel s’abreuve certains de nos éclairés chroniqueurs et éditorialistes de vos médias écrits d’ici et où travaillent, à titre de chercheurs «seniors», les ex-premiers ministres de l’Ontario et de l’Alberta, messieurs Mike Harris et Ralph Klein et qui vient d’embaucher la pétillante chroniqueuse du Journal de Montréal, Nathalie Elgrably-Lévy. Allô chercheurs! En prenant Business Week comme référence, vous ne pourrez pas dire aussi que j’utilise un brûlot marxiste-léniniste-maoïste-trotskiste.

Une croissance trois fois plus élevée que le Canada

Ainsi, on apprend qu’en 2007 Cuba a connu une croissance économique de 7,5%, presque trois fois plus élevée que le Canada et le Québec, en partie grâce à une forte présence de l’État, et non le contraire, en partenariat avec des compagnies étrangères surtout espagnoles (73 joint ventures), canadiennes (38), chinoises (12) et d’autres comme Nestlé et Inbev.

Business Week nous dit que les points forts de son économie sont évidemment le tourisme, avec plus de 2 millions de visiteurs; l’exportation de nickel (Cuba est le 5e producteur mondial) dont les prix ont explosé ces dernières années; ses cliniques médicales et ses spécialistes reconnus mondialement qui ont reçu plus de 6000 patients étrangers en 2007 et dont les soins coûtent moitié moins cher qu’aux Etats-Unis; l’extraction toujours plus grande de pétrole (Cuba répond à 36% de ses besoins) et de son industrie pharmaceutique et biotechnologique étatique qui exporte de nombreux médicaments développés à Cuba.

Le US Geological Survey des States estime que Cuba détient des réserves de 9,3 milliards de barils de pétrole en eau profonde, recherches menées en partenariat avec les sociétés d’État de la Norvège (Statoil), du Brésil (Petrobas), de la Chine (China Petroleum) et avec les compagnies canadiennes Sherritt International, qui est le plus gros investisseur étranger sur l’île, et Peberco.

Pas si mal pour un pays socialiste et ce malgré l’odieux embargo américain qui prévaut depuis près de 50 ans et qui coûte annuellement des milliards de dollars à Cuba.

Malgré le blocus

Comme à chaque année, tous les pays membres de l’ONU (184 contre 3) ont voté encore une fois, en 2007, contre l’ignoble blocus américain à l’endroit de Cuba à l’exception des États-Unis et de ses deux franchisés inconditionnels que sont Israël et les Îles Marshall. Lors de sa visite à Cuba au mois de février 2008, le secrétaire d’État du Vatican a affirmé que l’embargo américain constituait une oppression pour le peuple cubain.

Pour revenir à la transnationale canadienne Sherritt, elle vient d’investir 1,3 milliards$ à Cuba et son président Ian Delaney a dit : «Cuba est le pays avec lequel nous préférons travailler». Cette importante nouvelle est passée inaperçue ici. Le Journal de Montréal a préféré couvrir ces nouvelles insignifiantes dans ses éditions du 6 décembre 2007 «15 opposants (sic) sont arrêtés dans une église» et du 11 décembre 2007 «Échaffourées…Une poignée (sic) de dissidents sont descendus dans la rue… sous l’œil des caméras de télévision et de la presse étrangère».

De quelle presse étrangère s’agit-il au juste et au service de qui? Une télévision et une presse étrangère prête à couvrir des futilités fomentées par les États-Unis pour démoniser toujours plus Cuba. Et nos médias écrits d’ici qui reprennent cette merde au nom du droit à l’information et de l’éthique journalistique, je suppose?

Au moins, s’ils se limitaient à couvrir les nids-de-poule et les niaiseries de Juste pour rire, ils nuiraient moins. Eh oui, de la propagande la plus haineuse qui vise à diaboliser Cuba avec n’importe quoi. Le Journal de Montréal et les autres journaux et revues d’ici omettent évidemment de parler des milliers de malades soignés à l’étranger par des médecins cubains et les milliers d’analphabètes éduqués dans plusieurs pays par les Cubains grâce à leur méthode d’enseignement «Yo si puedo» utilisée même en Nouvelle-Zélande.

Le pays des centenaires

Rien aussi sur le fait que Cuba a un taux de mortalité infantile inférieur aux States, le taux d’espérance de vie le plus élevé en Amérique latine et équivalent aux pays occidentaux et qu’ils ont seulement 2% d’analphabètes contre environ 15% au Québec.

Savoir que votre enfant va vivre et, longtemps en plus de ça, et qu’il va être instruit, n’est-ce pas la véritable définition de la liberté.

Enfin, Cuba est parmi les pays qui comptent le plus de centenaires, ce qui me fait dire : «Sacramouille, ils ont la couenne dure pour vivre plus de cent ans, eux qui ont été supposément opprimés et privés de liberté toute leur vie».

En vérité je vous le dis, le Canada et les États-Unis devraient prendre des leçons sur le sens véritable de la liberté et de la démocratie de Cuba. Ça ne fera pas plaisir à Bush et à Harper, mais le président Abdullah Gul de la Turquie vient de faire l’éloge du rôle international important joué par Fidel Castro.

Dans le journal turc Sabah, il a même dit : «Fidel Castro est dans le cœur du peuple turc». Puis-je me permettre d’affirmer à mon tour qu’il est aussi dans le cœur de la majorité des Canadiens, quoiqu’on en dise.