L’encerclement, un film essentiel

2009/04/15 | Par Gabriel Danis

L’encerclement – La Démocratie dans les rets du néolibéralisme
Réalisé par Richard Brouillette
Durée : 160 minutes

Né d’une révolte face à une certaine défaite de la pensée, le documentaire L’encerclement-La Démocratie dans les rets du néolibéralisme s’affaire à présenter, de façon éloquente et rigoureuse, la mondialisation galopante d’un système de pensée et les mécanismes mis en œuvre pour en imposer les diktats.

Lancé à l’automne dernier, pendant les balbutiements de la crise financière et économique actuelle, il serait facile de taxer d’opportunisme le réalisateur Richard Brouillette. Ce serait sans savoir que plus de dix années ont été nécessaires au réalisateur afin de compléter son film. Il n’en demeure pas moins que cette oeuvre est criante d’actualité et apporte un éclairage nouveau sur l’aspect tentaculaire et globalitaire des réformes néolibérales.

Un film de parole

Une des forces du film réside dans l’habilité du réalisateur à éviter tant les pièges du pamphlet virulent que ceux d’une objectivité illusoire. La cohabitation d’entrevues d’intervenants défendant le néolibéralisme avec celle de penseurs critiques de cette idéologie dominante insuffle une intéressante perspective au film. S’articulant autour de la force de la parole, le documentaire trace tout d’abord un portrait général du néolibéralisme, portrait au demeurant très bien circonscrit, mais déjà connu et exposé.

C’est de sa deuxième partie que le film tire toute son originalité, où une douzaine d’intellectuels de divers horizons abordent sous forme d’entrevues l’encerclement de la pensée et de la démocratie par le néolibéralisme. Parmi les plus connus, notons les contributions de Noam Chomsky, Ignacio Ramonet, Normand Baillargeon, Omar Aktouf, Michel Chossudovski et de Susan George. Ceux-ci illustrent, d’une manière vulgarisée et accessible, leur réponse à une question centrale : comment le néolibéralisme réussit-il à atteindre le statut d’évidence ?

Un documentaire dense et intègre

Au final, le film remplit le périlleux défi d’exposer, de façon digeste et sans tomber dans la complaisance, une analyse somme toute complexe de l’imposition de cette « idéologie qui explique le monde ».

Par ailleurs, le documentaire développe une proposition cinématographique singulière, en faisant le choix du 16 mm noir et blanc, et d’une mise en scène sobre, à une époque qui ne jure que par le numérique, ce qui lui confère un aspect intemporel. Néanmoins, la forme aurait profité de l’injection d’une certaine dose de dynamisme, en intégrant davantage d’images d’archives par exemple. Malgré tout, le fond demeure d’une pertinence indéniable et fait de ce film un passage obligé pour tous ceux et celles qui s’interrogent sur l’avenir de la démocratie, de la pensée critique et qui souhaitent une alternative à un mode d’organisation de l’activité humaine présenté depuis trop longtemps comme étant inéluctable.