Quand les régions jouent à la « Grande séduction »

2009/09/01 | Par François Marchand

L’auteur est coordonnateur d’Action Santé Outaouais

Gatineau - Le 29 août dernier, nous apprenions que le député et ministre responsable de l'Outaouais, Norman MacMillan, venait de mettre sur pied un comité afin d'attirer les médecins spécialistes en Outaouais, et ainsi réaliser une opération, qu'il nomme « La Grande séduction ». Ou ira-t-il chercher les spécialistes dont tout le Québec a besoin en pleine pénurie? On se demande ce qui se produira si chaque région met en place son propre comité de « séduction ».

Depuis plusieurs années la tendance à la rivalité interrégionale est à la hausse. La nouvelle mode des coops de santé en est la principale expression lorsque vient le temps d'attirer les généralistes.

La stratégie de fond derrière le modèle des coops, est d'offrir une augmentation indirecte de la rémunération des médecins en leur évitant tout dépenses et tracas administratifs. Est-ce que la carotte que veut présenter le ministre responsable de l'Outaouais aux spécialistes en sera une d'argent? 

Il nous semble assez clair que les grands gagnants de cette initiative de séduction seront les médecins eux-mêmes. Tout sera mis en place pour les attirer et les garder ici en Outaouais, mais à quel prix et au détriment de qui?

C'est bien connu que les spécialistes sont attirés entre autres, par la technologie surtout lorsqu'elle est à la fine pointe. Devrons-nous construire de nouveaux centres médicaux plus « modernes » pour les attirer? Un nouvel hôpital? Devrons-nous offrir des primes, des bonus, jusqu'où sommes-nous prêts à aller pour attirer un spécialiste?

La répartition des effectifs médicaux est beaucoup plus complexe qu'une vulgaire stratégie de marketing.

En effet, alors que des mesure contraignantes plus sévères favoriseraient une répartition interrégionale plus équitable, certaines fédérations médicales nous annoncent que si tel était le cas, leur membre déserteraient le régime public québécois, vers d'autres provinces, pays ou vers le secteur privé.

Une menace? Non, une réalité. C'est exactement ce qui se produit au Québec actuellement. Les fédérations médicales exigent donc des assouplissement dans les règles de répartitions entre les établissement et les régions.

En d'autres mots, les médecins veulent décider où ils vont travailler et veulent se laisser séduire. C'est légitime, mais Hippocrate serait-il d'accord avec ce laisser-faire qui risque de priver les établissements et les régions les plus pauvres aux profits des hôpitaux universitaires. 

Nous demandons au ministre de la Santé et des Services sociaux de faire preuve de leadership lorsque vient le temps de répartir les ressources sur l'ensemble du territoire québécois.

Actuellement, les agissements du ministre MacMillan donne l'impression que c'est la logique du chacun-pour-soi qui règne au sein du Conseil des ministres en regard des solutions à la pénurie de personnelle en soins de santé au Québec, on voit ce que ça donne et le pire est à venir si le laisser-faire continue. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, M. Yves Bolduc, doit faire tout ce qui est en son pouvoir afin d'éviter les guerres de clocher inutile entre les régions, mais aussi à l'intérieur même des régions entre les MRC et aussi les municipalités.

Les Québécois et les Outaouais payent très chère leur système de santé et d'éducation et sont donc en droit d'exiger que les médecins et professionnels de santé formés au Québec, soient contraint de redonner aux contribuable le fruit de leur investissement, que ce soit en Outaouais et dans l'ensemble des régions du Québec.

Action Santé Outaouais est un organisme communautaire régional à but non lucratif, ayant pour mission la défense collective du droit à la santé.