Des millionnaires veulent être taxés davantage

2010/02/17 | Par Pierre Dubuc

De riches hommes d’affaires ont lancé sur internet une pétition réclamant la réintroduction d’un impôt sur la fortune pour aider à combler le déficit de l’État.

Mais, détrompez-vous, il ne s’agit pas de Pierre-Karl Péladeau, des frères Desmarais ou de Pierre Beaudoin de Bombardier.

L’initiative est allemande. Elle a été lancée à l’automne 2009 par Dieter Lehmkuhl, un médecin retraité, qui appelle à l’instauration d’un impôt sur la fortune pour venir à la rescousse des finances de son pays.

Le raisonnement de Dieter Lehmkuhl est simple : si les 2,2 millions d’Allemands qui possèdent plus de 500 000 euros (environ 750 000 $ CAN) donnent pendant deux ans 5 % de leur fortune, 100 milliards d’euros rentreront dans les caisses publiques.

« Ça me met en colère de penser qu’on a trouvé tant d’argent pour les banques, de l’argent qu’on n’avait pas avant pour financer des projets urgents sur les plans social, éducatif et environnemental », a déclaré Dieter Lehmkuhl, alors que le fossé entre riches et pauvres ne cesse de grandir depuis dix ans.

Dieter Lehmkuhl a convaincu au départ 44 autres millionnaires de le rejoindre dans sa démarche. Pour pouvoir signer la pétition en ligne, les riches doivent assurer qu’ils ont au moins 500 000 euros de patrimoine et verser une cotisation de 200 euros. Aujourd’hui, la liste comprend 156 signataires et est disponible sur le site de l’Appel www.appell-vermoegensabgabe.de/

« Entre 2000 et 2007, ma fortune a augmenté de 25 pourcents », explique le millionnaire. « J’ai hérité de cet argent, je n’ai pas dû travailler pour l’avoir. Ça me pose un problème… Avec ma proposition, celui qui possède un million d’euros devrait payer 50 000 euros en deux ans. Il ne perdrait donc rien de son standing. »

En plus de cette taxe, Dieter Lehmkuhl propose aussi de réclamer une contribution à ceux qui touchent des bonus gigantesques.

Alors, la question se pose : Qu’attendent nos hommes d’affaires pour « accoter » leurs collègues allemands, eux qui sont si prompt à afficher publiquement leurs « contributions à la collectivité »?

Pour nous aider à identifier ceux qui pourraient mettre la main dans leur poche, nous pouvons nous référer à la liste des patrons les mieux rémunérés au Canada publié au mois de janvier par le Centre canadien de politiques alternatives.

On y retrouvait des Québécois bien connus, comme Pierre Beaudoin de Bombardier Inc. qui a touché près de 8 millions $ l’an dernier, Pierre-Karl Péladeau de Quebecor avec 7 millions $, Jacques Lamarre de SNC-Lavalin et ses 6,2 millions $, Louis Vachon de la Banque Nationale avec 5,2 millions $, les frères Desmarais, Paul Jr et André qui ont touché respectivement 5,1 et 5,0 millions $. Leur collègue de la Financière Power mis dans ses poches des revenus de 11,2 millions $. François Coutu du Groupe Jean Coutu a encaissé 4,8 millions et Luc Desjardins de Transcontinental un petit 3,9 millions $.

Et on parle ici uniquement des revenus et des biens accumulés par notre « élite ». On ne parle pas des biens accumulés sous forme d’investissements, de résidences somptuaires, de domaines, d’œuvres d’art, de bijoux, etc. Tout cela doit être comptabilisé lorsqu’on parle d’un impôt sur la fortune.

Voilà une proposition que pourrait amener le Front commun pour répondre au gouvernement et à tous ceux qui veulent un « élargissement de l’assiette fiscale ».