Transport et GES: Nous n’apprenons pas !

2010/06/18 | Par Daniel Breton

L’auteur est président MCN21 et chroniqueur auto-écolo SRC

Les chiffres de ventes et d'immatriculations  de voitures et camions légers au Québec, tout comme dans le reste du Canada sont on ne peut plus clairs : nous nous dirigeons EXACTEMENT dans la mauvaise direction en ce qui a trait à la diminution de la consommation de carburant et de nos émissions de gaz à effet de serre.

Selon Statistiques Canada, les émissions de gaz à effet de serre de véhicules privés ont augmenté de 35% au pays entre 1990 et 2007, soit près du double de l'augmentation de la population, qui se situe à 19%.

Au Québec, la première source d'émissions de gaz à effet de serre est le transport, avec environ 40% du total. Or, ces émissions ont augmenté, tous types de transport confondus, de 36,7% entre 1990 et 2007.

Quelques autres chiffres: Alors que la population du Québec a crû de 6% entre 1998 et 2008, le nombre de voitures et camions légers a explosé: +31% ! C'est une croissance cinq fois plus grande que celle de la population.

 

Hausse marquée des ventes de véhicules énergivores

Si nous comparons les ventes de véhicules et de camions de tous types en 2009 et 2010, une tendance ressort clairement: les chiffres de vente au Québec de janvier et février 2009 versus ceux de janvier et février 2010 montrent que si les ventes de voitures ont augmenté de 8% en ce début d'année, celles des camions ont augmenté de 32%, soit 4 fois plus!

Au Canada, les ventes de voitures ont augmenté de 6% alors que celles des camions ont augmenté de 24%. Depuis le début de l’année 2010, les ventes de camions de tous types ont maintenant dépassé les ventes de voitures. En avril, les ventes de petites voitures écoénergétiques ont même diminué de 2,3% pendant que celles de grosses voitures et de camions bondissaient de 22,2%... 

 

Hausse marquée de la consommation de véhicules populaires

Outre le fait que le véhicule le plus vendu au pays est la camionnette Ford F-150, les deux modèles de voitures les plus vendues au Canada, soit la Mazda 3 et la Honda Civic, ont vu leur consommation AUGMENTER entre 1995 et 2010 respectivement de 8% dans le cas de Mazda 3 (comparativement à la Protégé) et de 30% (!) pour ce qui est de la Civic 2010.

Si certains répondront que la Civic 1995 se comparerait plutôt à la Fit 2010, sachez que la consommation de la Fit 2010 est à peu près la même que celle de la Civic 2010.  En réalité, la majorité des constructeurs n’a fait aucun effort sérieux pour diminuer la consommation de ses véhicules depuis 25 ans.

Ceci va changer un peu grâce aux nouvelles normes de 2016 du président Obama, mais au rythme où nous augmentons le nombre de véhicules sur nos routes et considérant que la rotation du parc de véhicules prend 14 ans, nous ne sommes pas sortis de l’auberge !

 

Hausse marquée de notre tolérance face aux hausses du prix du pétrole

Pâques 2007 : les automobilistes Québécois fulminent. Raison ? Le litre d’essence vient d’augmenter à $1,13. Les lignes ouvertes ne dérougissent pas : « C’est un scandale ! », entendra-t-on sur toutes les tribunes… Juillet 2007 : début des vacances de la construction : nouvelle hausse à $1,14. Le ministre Béchard donne 24 heures aux pétrolières pour s’expliquer ! Trois ans plus tard, elles ne lui ont toujours pas répondu…

Et nous ?

Nous achetons de plus en plus de véhicules énergivores... alors que le prix du carburant augmente régulièrement à $1,13… Des concessionnaires automobiles confirment : « Les clients ne nous parlent pratiquement plus de la consommation des véhicules»…

 

Que faudra-t-il ?

Alors qu’un sondage pan-Canadien vient de nous apprendre que LA première priorité des citoyens de ce pays est la lutte au réchauffement climatique devant l’économie et que nous voyons en direct les effets de notre dépendance pathologique au pétrole dans le golfe du Mexique, la lecture des chiffres ci-haut démontre que nous sommes parfaitement inconséquents.

Oubliez la cible de réduction des émissions de gaz à effet de 20% pour le Québec pour 2020 vis-à-vis nos émissions de 1990. Ce gouvernement, ajoutant de nouvelles routes et moyens pour favoriser le transport individuel et se lançant dans l’exploitation du gaz et du pétrole démontre sa totale incohérence dans le dossier de la lutte aux changements climatiques.

En fait, il est comme nous : vert dans les discours… pas mal moins vert dans les actions. Quant au gouvernement de M. Harper… que dire sinon qu’il se fout complètement de l’environnement ???

L’heure n’est plus aux grands discours, mais aux actions concrètes. Mais que faudra-t-il pour que nous réalisions que nous ne pouvons continuer ainsi si ce que nous voyons dans le golfe ne suffit pas ?