Assurance-emploi : le projet du Bloc en troisième lecture

2010/09/17 | Par Maude Messier

Le registre des armes à feu ne sera pas la seule vedette de la rentrée parlementaire la semaine prochaine. La troisième lecture du projet de loi du Bloc Québécois pour une réforme de l’assurance-emploi (C-308) est aussi en tête de liste.

« C’est un peu par hasard si le projet se retrouve quasiment à l’ouverture de la session parlementaire, mais disons que ça coïncide bien dans l’ordre : c’est un dossier prioritaire au Bloc Québécois », commente en entrevue à l’aut’journal Yves Lessard, député parrain du projet de loi C-308 et porte-parole du Bloc en matière de ressources humaines et développement social.

Le projet de loi vise une réforme complète du régime d’assurance-emploi, que le Bloc juge « inadéquat et insuffisant ».

Différentes mesures de bonification sont mise sur la table, dont faire passer le taux des prestations de 55% à 60% du salaire gagné, hausser de façon permanente la durée des prestations en les faisant passer de 45 à 50 semaines, uniformiser le seuil d’admissibilité à 360 heures pour tous et rendre accessible le régime aux travailleurs autonomes constituent le cœur de cette réforme.

Pour Yves Lessard, les considérations philosophiques quant à l’admissibilité au régime doivent aussi être revues. « On est présumé ne pas avoir droit aux prestations d’assurance-emploi d’emblée quand on en fait la demande et on doit faire la preuve qu’on y a droit. C’est une aberration. »

La caisse d’assurance-emploi devrait constituer un outil de développement économique à son avis et non pas « un instrument servant à pomper l'argent vers Ottawa ».


Tentatives bloquées par les conservateurs

L’aut’journal a interrogé le député à savoir pourquoi l’abolition du délai de carence, qui prévoit deux semaines non rémunérées avant le début des versements de prestations, ne figure pas à la liste des mesures proposées par le C-308, mesure pourtant chère aux organisations syndicales et aux groupes de défenses des chômeurs.

Yves Lessard explique qu’un projet de loi précédant, également parrainé par le Bloc (C-241), portait précisément sur l’abolition du délai de carence.

Or, les conservateurs ont mis le holà en 3e lecture. « Ils ont interdit un vote en Chambre sur ce projet de loi parce qu’il comportait des dépenses pour le gouvernement. Alors cette fois, on s’y prend autrement. »

Yves Lessard est d’autant plus indigné qu’il soutient avoir la « conviction profonde » qu’ils auraient remporté le vote.

« C’est pourtant pas l’argent du gouvernement, mais bien celui des travailleurs. La Cour suprême en a pourtant décidé autrement en cautionnant la plus grande tricherie qui soit, un crime économique grave! On a banalisé ce crime », insiste-il en faisant allusion au jugement de la Cour suprême de 2008 qui a reconnu les cotisations au régime d’assurance-emploi comme une forme de prélèvement.

Cette décision avalisait l’utilisation des surplus cumulatifs de 57 milliards $ par le gouvernement à d’autres fins que le versement des prestations et la bonification du régime. Ce que les syndicats et les groupes sociaux ont qualifié du « vol de la caisse d’assurance-emploi ».

Mieux encore, les conservateurs ont annulé la dette de 57 milliards $ contracté par le gouvernement fédéral envers la caisse d’assurance-emploi par l’utilisation des surplus cumulatifs au fil des années.

« Le gouvernement fait disparaître une dette qui lui appartient à lui-même, c’est scandaleux! », dénonce M. Lessard tout en faisant valoir que ces « emprunts » devraient se faire au même titre qu’un prêt sur les marchés financiers, avec des intérêts et des garanties.

« Ce n’est pas parce que les conservateurs ont effacé impunément la dette du gouvernement par la législation qu’on va oublier ça et les laisser faire. On va relancer le débat et les talonner », conclut-il en confirmant que des rencontres de concertation sont prévues avec les syndicats et les groupes sociaux en vu d’établir un plan d’action.

Indigné, il critique les positions idéologiques des conservateurs et s’insurge du fait que l’argent qui devrait permettre aux travailleurs de se remettre d’un coup dur, soit plutôt destinée à « nourrir l’armée avec des investissements de 19 milliards $ pour les avions F-35 qui n’auront même pas de retombées économiques chez-nous! »

Il dénonce la philosophie d’« extrême droite » de ce gouvernement qu’il estime « alarmant et déprimant, surtout que les libéraux cautionne ça! »

M. Lessard souligne que ces derniers jouent la carte de l’hypocrisie. «Ils paradent en soutenant qu’ils ont voté contre les conservateurs, mais dans les faits, ils ne se présentent même pas au vote! »


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