La marche des RSG vers l’équité

2010/10/14 | Par Maude Messier

Les négociations piétinent entre le gouvernement du Québec et les 12 800 responsables de service de garde en milieu familial (RSG) syndiquées à la CSQ. L’arrivée en poste de Michelle Courchesne au Conseil du Trésor et de Yolande James au ministère de la Famille et des Aînés n’a pas amené le nouveau souffle escompté.

Jointe par l’aut’journal, la vice-présidente de la CSQ, Mme Louise Chabot, souligne que ce n’est pas le rythme des négociations qui fait défaut, mais bien la négation par le gouvernement des principales revendications syndicales.

Entamées en février 2010, les négociations n’ont toujours pas fait d’avancées significatives. « Les travailleuses sont exaspérées. Les déclarations du gouvernement et les communiqués laissent entendre qu’ils accueillent nos demandes, mais ça ne se traduit en rien de concret au-delà des principes. On n’a pas d’engagement ni d’indication sur où loge le gouvernement. »

Rappelons qu’en juin dernier, les RSG s’étaient prononcées en faveur d’une série de moyens de pression, allant d’un arrêt de travail de 2 heures à une journée complète de grève dans une proportion de 92%.

Après avoir exercé un premier arrêt de travail de 2 heures au printemps, « l’assemblée a confirmé que l’heure était venue de prendre des moyens plus costauds pour faire pression sur le gouvernement et faire avancer ces négociations. »

La CSQ a déjà informé le ministère de la Famille et des Aînés qu’une demi-journée de grève rotative à travers le Québec se tiendra dans la semaine du 25 octobre. Un arrêt de travail simultané pour l’ensemble de la province est aussi prévu pour le 10 novembre prochain.


L’équité en apparence

Le dernier dépôt patronal n’aborde que le normatif, motus et bouche cousue sur tout ce qui aurait une incidence monétaire. La vice-présidente de la CSQ estime que l’attitude gouvernementale à la table de négociation ne laisse d’autre choix aux RSG.

« On n’a toujours pas de réponse significative sur les congés payés, les vacances, la rémunération, le nombre d’heures travaillées, les cotisations au Régime des rentes du Québec, les assurances collectives. Les enjeux sont majeurs, mais le gouvernement, lui, semble vouloir réduire cette négociation à sa plus simple expression. »

Louise Chabot déplore le bilan franchement décevant de ce gouvernement qui prône, du moins en paroles, l’égalité entre les hommes et les femmes, qui se targuent d’avoir un cabinet ministériel paritaire et dont les responsables du dossier des RSG sont pourtant deux femmes.

« Les délais et le piétinement dans ce dossier en général comme dans les négociations n’est pas le fruit du hasard et n’est certainement pas étranger au fait que ce groupe soit constitué à 99% des femmes. »

Elle maintient que de nombreux préjugés parsèment le cheminement de ces travailleuses en quête d’une juste reconnaissance de la valeur de leur travail, de leurs compétences et de leurs responsabilités.

« Dans la lutte pour leur syndicalisation, il a été reconnu par la juge Grenier de la Cour supérieure qu’il y avait discrimination systémique à l’endroit de ces travailleuses. Encore aujourd’hui, ces préjugés persistent. Plusieurs estiment que les tâches reliées à leur travail relèvent du rôle traditionnel de la femme, qu’elle entretiendrait leur maison de toute façon, qu’elles feraient l’épicerie, etc. »


Travailleriez-vous en deçà du salaire minimum?

Adoptée en juin 2009, la Loi 51 instaure un régime de représentation et de négociation d’une entente collective pour les responsables de service de garde en milieu familial.

Cette négociation cruciale jettera les bases de la toute première convention collective des RSG. Travaillant actuellement de 60 à 65 heures par semaine pour un salaire inférieur au salaire minimum ces travailleuses aspirent à des conditions de travail décentes.

Elles sont sujettes aux mêmes normes et réglementations que les Centres de la petite enfance (CPE), doivent offrir des services au minimum 50 heures par semaine, suivre le programme éducatif du ministère, respecter des guides alimentaires très stricts et perfectionner leurs qualifications régulièrement.

En d’autres mots, elles sont à la fois éducatrices, cuisinières et administratrices. Pourtant, leurs conditions de travail sont bien en deçà de leurs consœurs des CPE et même des normes du travail en vigueur au Québec.

Le réseau de service de garde québécois compte 93 000 places en milieu familial et 80 000 places en CPE selon la CSQ. « Il en coûte deux fois moins cher au gouvernement actuellement pour une place en milieu familial que dans un CPE. Le gouvernement a fait de grosses économies sur le dos de ces travailleuses alors qu’elles font le même travail que les éducatrices en établissement. »

Les ajustements des conditions de travail des RSG et leur harmonisation avec celles des éducatrices en établissement feraient passer la subvention gouvernementale pour une place en milieu familial de 19 $ à 31,82 $. La contribution parentale, fixée à 7$ par enfant, peu importe s’il fréquente un service de garde en milieu familial ou un CPE n’en serait toutefois pas affectée.


Répercussions

Au sempiternel argument selon lequel les syndiquées vont prendre les parents en otage, Louise Chabot rétorque que les RSG mènent une lutte pour la reconnaissance de leur travail depuis 1997 et que bien d’autres moyens ont été épuisés, visiblement sans succès.

« Les travailleuses sont conscientes que l’arrêt de travail est un moyen d’action lourd et qu’il entraîne inévitablement des conséquences pour les parents. » Elle explique que les RSG misent sur leur relation privilégiée avec les parents pour les sensibiliser et les informer. « De façon générale, elles ont l’appui des parents qui comprennent bien les prétentions de leur lutte. »

Pour plus d’informations sur les RSG, lire « Le nouveau visage du syndicalisme ».


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