Wapikoni mobile 2010

2010/11/01 | Par Marie-Paule Grimaldi

Peut-être un des plus perspicaces exemples d’art communautaire au Québec, Wapikoni mobile revient pour la septième année nous présenter sa cuvée annuelle de courts métrages.

Par des propos aussi crus que poétiques, les jeunes des Premières Nations du Québec nous présentent avec franchise leur réalité, leur imaginaire, leurs espoirs, mettant toute ombre en lumière, dans un esprit de retour à soi et de dialogue.

Initié et orchestré par Manon Barbeau de concert avec le Conseil de la Nation Atikamekw et le Conseil des Jeunes des Premières Nation, le projet Wapikoni mobile met à la disposition des communautés un studio de création cinématographique et musicale qui leur rend visite dans la roulotte, maintenant bien connue.

Celle-ci a d’ailleurs dû faire peau neuve dernièrement, car de l’Abitibi à Shefferville, c’est maintenant dix-huit communautés qui guettent son retour chaque année, dont huit d’entre elles présentent des courts dans la sélection 2010.

Conçus, réalisés et produits en totalité par les jeunes participants avec le soutien de cinéastes accompagnateurs et de coordonnateurs autochtones, faiseurs de liens, les films abordent leurs sujets sans détour et sans gêne.

Ce qui n’empêche pas, loin de là, une grande beauté et une grande poésie dans le traitement, une qualité de création qui peut surprendre si on ne s’arrête qu’à la démarche. Documentaires, fictions, animations, vidéo-clip, tout y passe, parfois de manière très humoristique, comme Kiss en concert, en verres de styrophone, de Vanessa Turner de la Nation Cri de Mistissini, ou encore par de véritables poèmes vidéographiques comme Tremblement de Terre de Réal Junior-Leblanc de la communauté Innu d’Uashat-Maliotenam sur la Côte-Nord.

Le thème de la consommation est plus présent cette année dû à un concours autour de celui-ci, ce qui produit des œuvres graves mais abordées avec une authenticité, un « voici ma vie » qui semble parfois léger, mais qui dans tous les cas désarme et touche.

Le soir de la projection montréalaise, Erick Papatie a gagné le prix du public pour son film Glitch, une fable charmante sur une télévision qui peut littéralement faire le monde en noir et blanc. Dans ce grand rassemblement où étaient venus tous les cinéastes du territoire, la rencontre était possible, à travers l’émotion et le rire partagés.

Et la rencontre se poursuit sur le nouveau site web où on trouve tous les films avec journaux de bord des créateurs et informations sur les communautés visitées, une vitrine pénétrante pour ceux qui veulent découvrir la culture amérindienne au Québec ou s’y immerger.

Mais au-delà de ce mouvement généré contre l’isolement des Premières Nations, de ce regard lancé sur des réalités si proches, fières ou blessées, drôles ou criantes de désabusement, toujours riches de ceux qui s’y inscrivent et trop peu connues, Wapikoni mobile est un vecteur de talent qui rend possible la réalisation d’excellents courts métrages.

Tant pour sa portée sociale qu’artistique en renforçant une culture sectionnée mais bien vivante et en donnant un souffle de beauté né de l’entraide, ce projet est essentiel. Courts films, grandes actions.


www.wapikoni.ca


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