Une enveloppe brune pour Noël ?

2010/12/07 | Par Pierre Demers

L’auteur est cinéaste et poète. Il habite Arvida


Le sujet brûle les lèvres de l’actualité. Tous les secteurs de la société semblent compromis par le phénomène.

Les politiciens, les journalistes, les médecins, les sportifs professionnels, les juristes, les syndicalistes, les enseignants sans doute (?) et j’en passe ont peut-être reçu ce genre de cadeau le moment venu, surtout durant le temps des Fêtes.

J’ai déjà commencé à en parler discrètement à mon garagiste pour qu’il s’active plus rapidement sur ma bagnole.

Il se peut donc que vous aussi soyez visés par THE cadeau idéal de Noël cette année, l’enveloppe brune ou multicolore selon l’originalité de l’expéditeur.

Que faut-il faire alors, comment réagir devant cet objet inusité quoiqu’interdit officiellement? Devant ce genre de faveur inattendue ?

Voici dix (10) conseils pratiques pour ne pas être pris au dépourvu et réagir plus vite que ceux qu’on connaît bien qui ont eu l’air fou au télé journal ou dans une réunion publique ou privée.

Je parle en connaissance de cause. Dans une autre vie comme correspondant agricole, j’avais reçu à l’approche de Noël d’une fédération en moyens un coffret en pin brun rempli de fromages du terroir. Je l’admets aujourd’hui, je les ai tous dévorés sans aucun remords. J’ai conservé le coffret en preuve pour m’incriminer un jour ou l’autre.


Dix conseils pratiques donc.

  1. Vérifiez tout de go sans lésiner si la couleur de l’enveloppe qu’on vous propose est bel et bien brune. Sinon, les choses vont mal pour vous. Le montant que renferme cette autre enveloppe blanche ou de couleur indéterminée n’est pas à la hauteur. Déjà c’est un aveu que votre influence laisse à désirer.

  1. Si l’enveloppe brune que vous trouvez par hasard porte déjà un nom ou des initiales qui ne sont pas les vôtres, méfiez-vous. Si vous avez trouvé la dite enveloppe avec les initiales (J.T. ou G.H.) près de l’hôtel de ville de Chicoutimi, ou près d’un lieu de culte ou d’un bureau touristique, laissez tomber. D’autres les remplaceront tôt ou tard.

  1. Si votre patron ou votre conseiller municipal ou votre supérieur immédiat vous convoque dans son bureau et, vers la fin de la rencontre, ouvre le tiroir gauche, levez-vous aussitôt et sans même le saluer sauvez-vous.

  1. Si l’enveloppe brune qu’on vous remet contient 75 000$, ne la prenez pas. C’est une erreur. On vous a pris pour le premier ministre du Québec.

  1. Si vous recevez par la poste une enveloppe brune, vérifiez discrètement son contenu. Si le montant dépasse les cinq (5) chiffres, demandez-vous pourquoi c’est vous qu’on tente de corrompre? Si vous trouvez la réponse, gardez l’argent.

  1. Dans les parties de bureau, cette année particulièrement, gardez les mains dans vos poches de veston ou laissez votre sac à main bien en vue.

  1. Si une enveloppe brune grand format se retrouve dans le pare-brise de votre voiture stationnée pas très loin de l’hôtel de ville, un élu municipal, un fonctionnaire ou un attaché de presse vous ont pris pour un journaliste. N’y touchez pas.

  1. Si on vous invite à une réunion politique quelconque, à un souper de chambre de commerce, vérifiez bien les enveloppes sur les tables. Pour plus de prudence, portez des gants chirurgicaux en prétextant une allergie cutanée récente.

  1. Si lors d’une fête de famille du temps des fêtes, une grand-mère rigolote a décidé de camoufler une enveloppe brune vide dans la tourtière, l’arbre de Noël, les bas de son mari, dites-lui que ce n’est pas drôle. Que surtout, on ne s’amuse pas aux dépens de la chose politique.

  1. Si vous voulez vraiment faire un cadeau de Noël qui dérange, procurez-vous donc via le site des Poèmes et des Vues animés, une poupée vaudou du maire ou de marina, ou copie dvd des courts métrages Le facteur cultivé ou Trous de mémoire. Emballage en papier brun compris. Pour paraphraser Adamus, le brun c’est la couleur des fêtes, cette année.



N.B. citations de la semaine.

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«La sous-traitance, c’est ce qui va permettre à nos usines d’être encore là dans 25 et 50 ans. La sous-traitance n’est pas un fléau. Elle permet de la flexibilité, de la productivité et de la polyvalence. » dixit Étienne Jacques, patron régional de Rio Tinto Alcan.(Le Quotidien, 3 décembre).

Le bon patron a oublié de dire que la sous-traitance permet aussi de réduire les salaires des employés et d’augmenter les profits des actionnaires.

Le plus triste c’est que la majorité des médias d’ici ont pris son discours et sa menace pour du cash. Le vent antisyndical souffle aussi fort ici qu’ailleurs.


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«Je veux que ça soit beau. Le mobilier que l’on retrouve sur les terrasses de la rue Racine n’est pas harmonisé. Les parasols Budweiser, ce n’est pas très beau. Il faut repenser la décoration. Penser à un programme pour la rénovation des façades. Donner du charme à la rue », Jean Tremblay devant les membres de la Chambre de commerce, jeudi 2 décembre.

La «vision » du développement urbain (Lire Chicoutimi) du maire frôle l’insignifiance.

On dirait qu’il est en train de décorer sa salle de bain ou son parterre.

Que des lieux communs, que des impressions personnelles fondées sur rien. Il vient de se rendre compte qu’un centre-ville a besoin de résidents, entre autres pour s’animer. Il vient de découvrir la musique dans les parcs, le cinéma, la bibliothèque municipale.

Quelqu’un va-t-il lui dire qu’il délire? Où vivent les 600 retraités du Manoir Champlain sur la Racine? Dans leur blockhaus et aux centres d’achat sur le boulevard Talbot.

Vivement un autre voyage pour repenser tout ça.