Revoir le financement du réseau collégial

2011/01/24 | Par Maude Messier

La Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) s’inquiète de la décroissance du nombre d’étudiants dans plusieurs régions du Québec. Une situation qui frappe de plein fouet l’ensemble du réseau collégial québécois.

« Les fluctuations asymétriques des effectifs étudiants sur le territoire du Québec affecte tout le réseau collégial. Il y a longtemps que l’on connaît les problèmes que ça engendre de même que les solutions à apporter. Il est temps d’agir », de déclarer en entrevue à l’aut’journal Léo Bureau-Blouin, le président de la FECQ.

D’après la Fédération, le nombre d’étudiants inscrits au Cégep de Gaspé aura reculé de 40% entre 1996 et 2015. Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, la baisse des effectifs pour la même période atteint 42% et 70% pour le Nord du Québec.

En conférence de presse vendredi dernier, la FECQ annonçait le lancement d’une résolution d’appui constituée de sept demandes favorisant une vision d’ensemble pour un réseau collégial public de qualité. Les propositions seront soumises à la ministre de l’Éducation, Mme Line Beauchamp, à l’occasion de la prochaine Rencontre des partenaires en éducation prévue pour le printemps prochain.

La FECQ propose notamment l’adoption d’un mode financement des cégeps qui tiendrait compte des particularités régionales et des fluctuations d’effectifs. Elle préconise aussi un développement accru des créneaux d’excellence.

« Actuellement, environ 70% du financement des collèges est fait par tête de pipe. Il faut revoir cette formule mise en place dans les années 1990 alors qu’il y avait une augmentation des étudiants dans le réseau. La situation est différente maintenant et ce système n’est plus adapté. Il faut tenir compte des besoins asymétriques des établissements. »

Léo Bureau-Blouin soutient que le mode de financement actuel perpétue l’affaiblissement des cégeps en régions. Moins les collèges ont de clientèle, moins ils reçoivent de financement, ce qui se traduit par moins d’offre et de diversité dans les programmes, et donc, moins d’étudiants ...

« Or, le développement économique, culturel et social des régions passe notamment par les cégeps. Cafés, restos, commerces, salles de spectacles, etc. dépendent de cette clientèle. L’occupation dynamique du territoire du Québec passe impérativement par des cégeps dynamiques. »

La réussite de certains programmes désignés comme des créneaux d’excellence, tels Arts et technologie des médias à Jonquière, Techniques du milieu naturel à St-Félicien et Techniques de thanatologie à Rosemont, constitue aux yeux de la FECQ une partie de la solution pour attirer les étudiants.

« À la lumière de ces succès, il semble que le développement de créneaux d’excellence soit une avenue intéressante, particulièrement pour les régions dont les effectifs sont en baisse et qui cherchent à attirer des étudiants. Par exemple, la Gaspésie connaît un développement économique important grâce à l’éolien, mais aucun programme relié à cette spécialité n’est offert dans les cégeps de la région. »

La Fédération propose que soit également attribué un bassin de recrutement aux cégeps pour éviter la concurrence nocive, malsaine pour le développement des cégeps selon Léo Bureau-Blouin. «On propose qu’un nouvel outil de gestion de la carte des programmes qui tiendrait compte de la spécificité des programmes et des bassins de main-d’œuvre soit adopté. Un outil qui permettrait la concertation de tous les acteurs concernés, pas seulement les directions des collèges. »

Le président de la FECQ déplore que le système actuel confine les directions des cégeps à toujours chercher une façon d’augmenter leur clientèle pour maintenir leur financement. Or, ce système décentralisé rend difficile la concertation des acteurs du réseau, chacun se repliant sur ses intérêts.

Par exemple, il soutient qu’un cégep de Montréal fait de la publicité et du recrutement à Rimouski pour son programme de graphisme, alors que le cégep de cette ville offre ce même programme. Une aberration courante selon lui.

Il cite aussi en exemple le Saguenay-Lac-Saint-Jean où plusieurs cégeps offraient un programme de bureautique. L’offre étant trop grande pour le bassin d’étudiants, aucun des programmes n’état viable. Il a pourtant été difficile de rationaliser puisque certains établissements y perdaient au change.

« Cette situation est loin d’être nouvelle. On pense que la prochaine Rencontre des partenaires sera une bonne fenêtre pour discuter de tout ça.»

La résolution de la FECQ a déjà reçu l’appui des conseils d’administration des cégeps de Gaspésie-les-Îles, Rimouski et Jonquière de même que de l’organisme Place aux jeunes, qui favorise la migration des jeunes en région.

La Fédération compte soumettre ses propositions à l’ensemble des conseils d’administration des collèges et à différents groupes concernés d’ici le printemps. « On souhaite rallier le plus grand nombre d’intervenants possible autour d’une position commune pour faire avancer le dossier une fois pour toute. »