Une « révolution culturelle », prétend Bachand.

2011/03/03 | Par L’Intersyndicale des femmes

À l’aube du prochain budget du gouvernement Charest, il est clair que ce dernier s’apprête à poursuivre son opération de déconstruction des services publics et à maintenir les mesures de tarification qu’il a adoptées dans son dernier budget, pompeusement placé à l’enseigne d’une « révolution culturelle ». Pour l’Intersyndicale des femmes, l’expression « révolution contre elles » serait plus appropriée puisque les mesures proposées ont des impacts majeurs sur les femmes.


Les services publics : les femmes n’ont pas les moyens de s’en priver

Les femmes sont déjà particulièrement affectées par ces mesures et elles le seront encore davantage. Pour bon nombre d’entres elles le parcours vers l’égalité ne pourra qu’être compromis.

Après lecture du rapport La révolution tarifaire au Québec, l’Intersyndicale des femmes a demandé à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) de se pencher sur le cas des familles monoparentales.

Les données obtenues démontrent qu’avec un revenu après impôt de 25 000 dollars, elles devront affecter près de 20 % de leur revenu au paiement de tarifs (de frais de santé, d’électricité, de services de garde), soit une hausse de 6,3 % alors que les familles avec deux parents ayant un revenu après impôt de 194 500 dollars n’y consacreront que 3 %1.

De plus, le démantèlement de l’État se fait sur le dos des femmes. Non seulement travaillent-elles en majorité dans le secteur public mais elles sont aussi de grandes utilisatrices de ses services (soins de santé, services de garde).

En outre, elles pallient de plus en plus les lacunes de ces services en s’occupant de leurs proches (enfants, parents). Tout ceci se fait au détriment de leur propre santé et de leur autonomie financière, présente et future.

Toutefois, l’argument martelé pour justifier cette dite révolution, soit le manque de ressources de l'État, n’est pas une fatalité comptable. Plusieurs avenues pourraient être explorées si nos élus avaient la volonté politique de maintenir des services publics de qualité. Instaurer un quatrième palier d’imposition, par exemple à un taux de 28 % pour les revenus les plus élevés (soit 127 000 dollars et plus), permettrait de récupérer 950 millions de dollars.

Des mesures de contrôle du coût des médicaments, pour leur part, permettraient d’économiser jusqu’à un milliard de dollars par année. Lorsqu’on se donne la peine d’explorer d’autres options, on réalise qu’il existe des moyens de renflouer les coffres de l’État sans piger dans les poches des personnes les plus économiquement vulnérables.

L’Intersyndicale des femmes a présenté ses recommandations récemment en commission parlementaire dans le cadre du bilan du plan d’action 2007-2010 « pour que l’égalité de droit devienne une égalité de faits ».

Elle a souligné à la ministre Christine St-Pierre l’incohérence existant entre les déclarations publiques du gouvernement en faveur de l’égalité pour les femmes et les décisions budgétaires qui minent les efforts des femmes et des citoyens les plus vulnérables.

Nous attendons de notre gouvernement qu’il fasse preuve de cohérence. Nous ne voulons pas de sa « révolution culturelle ». Il doit agir concrètement pour que toutes et tous, sans égard aux revenus, aient un véritable accès à la santé, à l’éducation, aux services de garde et aux services essentiels, car nous sommes et serons toujours en action, pour le respect de nos droits !


Ont signé cette lettre :

Marie-Claire Baigner, Jeanne Bouchard, Michèle Boisclair, Louise Chabot, Élaine Giroux, Lucie Grandmont, Geneviève Lantier, Micheline Laplante, Chantal Locat, Renée Rodrigue, Monique Voisine.

L’Intersyndicale des femmes est composée de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), de la Centrale des syndicats démocratique (CSD), de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), du Syndicat des professionnelles et des professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).

1 L’étude est basée sur la méthodologie utilisée dans La révolution tarifaire au Québec, rapport de recherche de l’IRIS, octobre 2010. Y sont pris en considération les tarifs annoncés dans le budget Bachand, soit les frais de santé, d’électricité, de services de garde. L’impact du ticket modérateur en santé est inclus, même si par la suite le gouvernement a annoncé qu’il abandonnait cette mesure.