Popotes roulantes: la saga continue

2011/03/22 | Par Maude Messier

Alors qu’elle s’apprêtait, lundi après-midi, à faire l’annonce d’une aide financière de 683 089 $ à deux organismes communautaires dispensant des services alimentaires aux aînés, la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, a été interpellée par le collectif Solidarité La Petite Marmite sur la disparition imminente de ce service offert depuis 20 ans dans les quartiers St-Louis-du-Parc et Plateau-Mont-Royal.


Pourquoi les uns?

Dans le cadre de la 6e édition de la Semaine québécoise des popotes roulantes, 233 089 $ seront versés sur trois ans à Santropol Roulant inc., un organisme communautaire de Montréal fondé et géré par des jeunes au sein duquel œuvrent près de 900 bénévoles.

Ces sommes sont destinées au programme « La pelle et le sceau », un projet d’évaluation, de recherche et de partage d’informations avec les autres popotes roulantes visant à améliorer l’offre de services alimentaires à Montréal.

450 000 $ sur trois ans seront également versés au Regroupement des popotes roulantes et autres services alimentaires bénévoles (PRASAB) pour la mise sur pied d’un système de repérage via Internet permettant aux aînés et aux aidants d’accéder plus facilement aux informations relatives aux services alimentaires et aux organismes desservant leur région.

Le regroupement compte environ 300 popotes roulantes à travers le Québec et livre annuellement plus d’un million de repas à domicile.


Et pas la Petite Marmite?

Avec un financement annuel de 40 000 $ et le dévouement d’une cinquantaine de bénévoles, La Petite Marmite distribue annuellement 10 374 repas, 7 jours par semaine, 365 jours par année. L’organisme a ainsi pourvu aux besoins alimentaires de 115 personnes différentes en 2010.

Dans la foulée des compressions budgétaires de 16,5 millions $ au Centre de Santé et de Services Sociaux (CSSS) Jeanne-Mance, la direction a choisi de ne pas renouveler le financement accordé au Projet Changement, un centre communautaire pour aînés, pour assurer ce service de maintien à domicile, à défaut de quoi La Petite Marmite s’éteindra le 31 mars prochain.

Manifestant d’abord à l’extérieur de l’édifice abritant Santropol où se déroulait la conférence de presse de la ministre, des bénévoles se sont ensuite introduits à l’intérieur pour signifier leur mécontentement et leurs appréhensions quant aux choix qui guident les investissements du gouvernement.

Ils s’expliquent mal pourquoi leur organisme, pourtant bien implanté dans la communauté, se voit privé d’un financement d’à peine 40 000 $ alors que le gouvernement accorde de l’aide financière d’importance à d’autres organismes.


La ministre passe le couvert au CSSS

Interrogée à cet effet par l’aut’journal, la ministre soutient que la décision budgétaire de retirer le financement de La Petite Marmite ne relève pas d’elle, mais bien de la direction du CSSS Jeanne-Mance. Elle souligne toutefois s’être assurée que les personnes âgées concernées continueront de recevoir les services alimentaires à domicile, lesquels seront désormais assurés par des organismes membres du PRASAB, notamment l’Association des popotes roulantes du Montréal Métropolitain.

« Si ça ne fonctionne pas bien, soyez assurés qu’on va s’asseoir ensemble et trouver des solutions. Mais laissons la chance au coureur », a insisté la ministre à plusieurs reprises.

Si l’objectif poursuivi par le ministère des Aînés est d’assurer des services de maintien à domicile de qualité et d’encourager les initiatives pour combattre l’âgisme, briser l’isolement et prévenir les problèmes de malnutrition, pourquoi la ministre refuse-t-elle d’intervenir auprès de la direction du CSSS Jeanne-Mance pour assurer la survie de La Petite Marmite, comme la coalition lui en a fait la demande répétée? « Parce que ce n’est pas mon mandat », a-t-elle répondu.

Pourquoi retirer d’un côté pour remettre de l’autre et désincarner un modèle d’organisation fonctionnel? « Mon rôle est de m’assurer que les aînés reçoivent les services, ce qui sera fait. Je ne peux pas juger d’une organisation qui n’est pas sous ma gouverne. »

La balle est ainsi renvoyée dans le camp de la direction du CSSS et du ministère de la Santé et des Services Sociaux, où l’on tient sensiblement le même discours, à savoir que les services seront assurés pour les personnes visées.

La ministre souligne que, de 900 000 $ par année il y a quatre ans, le financement des organismes communautaires est passé à 11 millions pour l’année 2010-2011 afin d’améliorer les conditions de vie des aînés.

Faut-il comprendre que le gouvernement compte sur des ressources bénévoles pour assurer le maintien à domicile des aînés? « Non, pas du tout. On est en train de consolider et de développer des assises. Ça signifie plus de popotes roulantes et plus de services pour l’avenir. »