Quand l’État Desmarais pique la curiosité de l’Ambassade des Etats-Unis

2011/05/12 | Par Robin Philpot

Robin Philpot est l’auteur de Derrière l’État Desmarais : Power (Les Intouchables 2008)

Qui n’a pas remarqué, au Québec, qu’une information n’est jamais considérée vraie si elle ne paraît pas en noir sur blanc dans le Globe and Mail ou dans le New York Times ? Ou qu’un Américain bien placé la répète ?

Là, l’ambassadeur des États-Unis vient simplement de constater – et nous le savons grâce à Wikileaks et au Devoir – ce que des milliers de Québécois disent depuis belle lurette. Mais personne dans les grands médias de Gesca et de Radio-Canada ne dit jamais : «… l’influence sur le milieu fédéral et provincial de cette société [Power Corporation] est indéniable. »

De plus, ce même ambassadeur accuse les journaux de Desmarais et de Power Corporation, dont La Presse, de marcher main dans la main avec Paul Desmarais pour faire infléchir la politique environnementale québécoise dans le sens des intérêts pétroliers des Desmarais, soit dans le sens favorable à l’exploitation sans contrainte des sables bitumineux de l’Alberta. Si c’est nous qui le disons, c’est parce que nous sommes de méchants indépendantistes. Mais là, ça doit être vrai !

Si l’ambassadeur Jacobson devait regarder encore plus près, il verrait beaucoup d’autres exemples où la famille Desmarais réussit, sans passer par des lobbyistes grâce à leurs lignes directes, à infléchir la politique québécoise, canadienne et même française dans le sens de leurs intérêts.

Pensons seulement à la santé : notre réseau se dégénère mais les Desmarais sont là avec une kyrielle de compagnies d’assurance par qui on va devoir passer pour se faire soigner.

Ou encore, à la politique étrangère : la France, par la bouche de l’ami Nicolas Sarkozy, a asséné aux Québécois une gifle sans précédent, nous traitant quasiment d’imbéciles parce que nous songeons à faire du Québec un pays indépendant. Ça vient tout droit des Desmarais.

Mais le cas de la politique environnementale du Québec est particulièrement important, et pour l’environnement et pour l’économie.

L’exploitation des sables bitumineux, qui est au cœur de la stratégie du gouvernement conservateur de Stephen Harper, est diamétralement opposée aux intérêts économiques nationaux du Québec. Et le Québec risque de payer cher cette politique canadienne.

D’abord le Québec a une excellente fiche à l’égard des gaz à effet de serre grâce à l’hydroélectricité. Dans nos relations économiques avec d’autres pays, si nous étions indépendant, ce serait un atout important, surtout parce que l’OMC a déjà statué que l’environnement l’emportait sur l’économie.

Si un pays ne respecte pas les conventions internationales sur les gaz à effet de serre, d’autres pays de l’OMC peuvent appliquer des pénalités sur les produits du pays récalcitrant.

Un Québec indépendant ne serait jamais pénalisé. Mais un Québec dans le Canada, avec une politique économique axée sur la production pétrolière sans contrainte comme celle de Harper et celle préconisée par les Desmarais, ces mêmes pays pourraient appliquer des pénalités sur tous les produits d’exportation québécois.

Merci à Wikileaks et au Devoir d’avoir dit tout haut ce que nous disons tout bas depuis des années.