Oser, agir, influencer… La FIQ passe en mode action

2011/06/10 | Par Maude Messier

Après trois jours de « mises en bouche », les 600 délégués de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) sont passés au « plat principal » ce jeudi.

Déjà, en conférence de presse précédant l’ouverture de ce 9e Congrès de la Fédération, l’organisation syndicale avait clairement indiqué qu’elle entendait passer en « mode action ». Ce que l’exécutif propose, c’est ni plus ni moins qu’un changement de paradigme. Désormais, la FIQ sera en mode proactif.

Neuf recommandations ont été adoptées, la majorité d’entre-elles à l’unanimité, confirmant ce virage pragmatique qui place les professionnelles en soin au cœur des solutions à apporter aux problèmes qui gangrènent le réseau public de la santé.

Pour le moment, c’est sur l’orientation que le débat a eu lieu. Aucune solution concrète n’est donc pour le moment avancée. C’est la stratégie qui est adoptée. La FIQ a désormais les coudées franches pour établir un plan d’action qui sera soumis au vote auprès des membres dès cet automne.

Certaines pistes d’orientation se dégagent toutefois des réflexions. Par exemple, il semble que certaines pratiques déjà implantées ailleurs, comme les cliniques ambulatoires et les cliniques « nursing » fassent d’emblée partie des options à envisager.

La gestion « mur à mur » actuellement préconisée dans le réseau semble également créer de nombreuses insatisfactions, on parlera plutôt de modèles adaptés aux différentes réalités sur le terrain.

En somme, étudier ce qui se fait ailleurs, développer des partenariats avec des groupes de recherches et mettre à profit les succès de modèles expérimentés dans les différentes régions du Québec font partie des actions qu’entreprendra la Fédération dans les prochains mois.

La FIQ misera aussi sur le développement de partenariats avec d’autres organisations syndicales, des groupes communautaires et populaires pour mettre en valeur les solutions qui seront proposées, augmenter le rapport de force et ancrer les propositions dans l’opinion publique. « Leadership » est assurément le mot clé de la démarche entamée par la Fédération.


Changer de paradigme syndical

Dans une entrevue accordée à l’aut’journal à la veille des élections fédérales, la présidente de la FIQ, Mme Régine Laurent, confiait son désir de voir les organisations syndicales se détacher d’un syndicalisme « défensif », replié sur les seuls intérêts des membres, pour aller vers un syndicalisme plus « proactif », qui défend des orientations progressistes, en phase avec les besoins de la population.

L’objectif avoué de la Fédération par ce changement de cap est de combattre les idées de la droite économique, présenter des alternatives viables et des solutions qui passent par le réseau public de santé. Après tout, qui de mieux placés pour proposer des modèles novateurs que les professionnels à pied d’œuvre auprès des patients jour après jour?

À l’heure où les Gérard Deltell de ce monde souhaiteraient bien voir les syndicats se replier sur la défense exclusive des conditions de travail de leurs membres et délaisser la sphère publique, la FIQ a plutôt choisi de s’engager dans une bataille politique et sociale beaucoup plus importante.

L’ensemble des activités et des présentations du congrès ont fait état du contexte politique turbulent, de la montée du populisme, de la prédominance du discours économique de droite et des menaces qui plane sur le réseau de la santé laissé à ses problèmes et démanteler peu à peu par l’incursion du secteur privé.

Les délégués ont pu se faire une tête sur la nécessité et l’urgence d’agir concrètement à ce point-ci.


Revenir à la base

Après plusieurs années passées loin de l’action politique, la FIQ renouait à l’occasion de son congrès en 2008 avec un syndicalisme dit de « mouvement social ». C’est finalement la suite logique des choses qui s’est conclue ce jeudi.

Pour développer des modèles et proposer des solutions en phase avec les besoins de la population et des professionnels, l’exercice de la consultation et de la concertation devra être mené à un autre niveau et ce, à tous les paliers de l’organisation.

C’est d’ailleurs la principale préoccupation qui s’est dégagée des différentes interventions faites par les délégués en plénière lors des discussions sur les recommandations. Pour réussir son pari, la FIQ devra assurer une rétroaction continue entre les directions syndicales et les membres. Bref, c’est tout un changement de structure et de culture que s’impose la FIQ.

Un syndicalisme d’action qui défend non seulement les conditions de travail de ses membres, mais qui milite surtout pour une société plus juste et plus équitable, doit invariablement impliquer les membres de près.

Ce n’est pas une mince affaire. Sur la première ligne au front, les quelque 60 000 membres de la Fédération sont débordés et sollicités de partout. C’est pourquoi les votes sur les recommandations constituaient le moment attendu du congrès; ils représentent le pouls des militants. Sans eux, rien de tout ce projet n’est possible.

Photo : Jacques Nadeau