Ingrid Jonker, une vie tragique

2011/08/18 | Par Ginette Leroux

Ingrid Jonker est une femme au tempérament fougueux, d’une sensibilité exacerbée par le rejet d’un père impitoyable et intransigeant. Incapable d’aimer sa fille, il dénigre son talent et finira par la renier. Après un mariage malheureux, duquel est née sa fille Simone, sa rencontre avec l’écrivain Jack Cope, engagé politiquement, sera déterminante. L’homme est marié, mais il est incapable de résister à cette femme-enfant que l’insatiable besoin d’être aimée enflamme. S’ensuit une relation tumultueuse au cours de laquelle ruptures et réconciliations renvoient Jack à ses responsabilités familiales et à sa carrière. Frustrée, elle se tourne alors vers Jan Rabie qui, comme Jack, est un écrivain politiquement impliqué. Avortements successifs, faillites amoureuses n’entraveront pas la route qui mènera Ingrid Jonker, affichant sa liberté de pensée opposée au pouvoir en place et à son père député nationaliste, vers les sommets de l’écriture poétique. Nelson Mandela reconnaîtra son talent et son engagement dans la défense des Noirs pauvres et opprimés de l’apartheid.

ALLEMAGNE/AFRIQUE DU SUD/PAYS-BAS. 1h40.Version originale anglaise

Note :


Inspiré de la vie mouvementée et tragique de la grande poétesse sud-africaine Ingrid Jonker, née en 1933 dans la province du Cap, le film de la réalisatrice néerlandaise Paula van der Oest prend la forme d’une biographie qui relate la vie adulte de l’écrivaine qui débute en 1960 à Cape Town, moment où l’apartheid est à son paroxysme au pays de Mandela. Les Afrikaners nationalistes, riches propriétaires terriens, règnent en rois et maîtres sur la population noire et pauvre à laquelle sont déniés tous les droits, réservés qu’aux Blancs. La caméra s’attarde sur une mer agitée dont les vagues se fracassent violemment sur les plages de la ville sud-africaine, des images métaphoriques qui s’accordent avec le tempérament impulsif de la jeune femme. Le jeu à la fois intense et sensible, doux et emporté de l’actrice néerlandaise Carice Van Houten rend le personnage d’Ingrid Jonker attendrissant. Malgré ses débordements, on voudrait la tenir dans ses bras pour l’apaiser. Les poèmes récités tout au long du film rend encore plus vivante l’immense femme de lettres qu’était Ingrid Jonker. Les rôles tenus par l’acteur néerlandais Rutger Hauer dans le rôle du père despote et l’Irlandais Liam Cunningham dans celui de Jack Cope rivalisent de talent. Un film captivant.

Trois raisons d’aller voir ce film : Un film intimiste réalisé avec beaucoup de sensibilité. La scène où, internée, elle se montre lucide devant Jack qui s’inquiète de son état d’esprit. Le dernier plan où l’on entend la voix de Nelson Mandela qui reconnaît son immense talent lors de son discours inaugural le 23 mai 1994, trente ans après la mort de la poétesse, alors qu'il lit à haute voix le poème L'enfant qui fut tué par les balles des soldats à Nyanga.

Black Butterflies est présenté le 19 août au cinéma Impérial et les 20 et 21 août au cinéma Quartier Latin.

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