Une entreprise de solidarité

2011/08/20 | Par Ginette Leroux

Quatre générations de Blanchard, tissées serrées, vivent à Coteau Rouge, un quartier populaire de Longueuil. Honoré, le grand manitou du clan, (toujours aussi savoureux Paolo Noël) aime la pêche à la perchaude et, à l’occasion, se débarrasse des morts encombrants qu’on lui confie. Il aurait aimé que Fernand, son fils qui l’accompagnait quand il était p’tit gars, lui succède, mais ce dernier, plus conventionnel, a plutôt fait sa vie comme garagiste. On retrouve donc Fernand (Gaston Lepage en grande forme) marié à Micheline (l’excellente Louise Laparé) avec qui il coule des jours heureux, entre sa station-service et la pétanque, son loisir préféré. Ils ont deux enfants. Henri, (Mario Saint-Amand) boxeur raté, marié à Estelle, qui livre un combat contre un cancer agressif, et leur fils Alexis (Maxime Desjardins-Tremblay) jeune écolo et entrepreneur en herbe inventif de 15 ans. Hélène (fabuleuse Céline Bonnier), une jeune femme tête en l’air qui voue une admiration sans borne à son mari Éric Miljours (« c’t’écoeurant comme yé bon! dit, avec raison, André Forcier de Roy Dupuis) un promoteur immobilier, mafieux local, qui a l’ambition de transformer le quartier en condos luxueux. Tout ce beau monde forme un clan indivisible dans lequel la solidarité tient lieu de ciment familial.

Mais, comme dans toutes les familles québécoises, les Blanchard cultivent leur part de marginalité et de situations conflictuelles. Grand-maman Micheline porte le bébé de sa fille Hélène qui, pour cacher les apparences, décide d’une grossesse « ectopique ». À chaque matin, Éric gonfle un ballon de plastique à l’aide d’une pompe manuelle. Le faux ventre augmente de volume au fur et à mesure qu’approche la date prévue pour l’accouchement. Pendant ce temps, le conflit entre le promoteur Éric Miljours et Fernand n’affecte pas que son beau-père, son appétit féroce pour les transformations immobilières est insatiable et irrite plusieurs petits propriétaires du quartier. Ses jours sont comptés, comme ceux de Jason Singleton, le joueur de hockey anglophone, jaloux de sa femme Marine.

Allez, insomniaques et écologistes impatients, rêveurs d’une vie meilleure, Coteau Rouge vous attend! Vous comprendrez cette boutade lorsque vous verrez ce film.

QUÉBEC. 86mn.

Note : 

En compétition mondiale, le film d’André Forcier, une œuvre majeure, pèsera lourd dans la balance. Ce film met en lumière la culture populaire québécoise dans ce qu’elle a de plus savoureux. Sa langue colorée, ses valeurs traditionnelles, le jeu solide de ses grands acteurs à l’immense talent, ses dialogues aussi savoureux que la tarte à la farlouche de nos grands-mères, son scénario béton fait de situations loufoques, souvent teintées de magie, en somme un travail inventif et de grande qualité d’un cinéaste poète à la conscience éveillée, un homme tendre et passionné de son pays.

Le film est dédié à la mémoire de Catherine Thabourin, son assistante réalisatrice, morte en avril dernier, en plein tournage du film, d’un cancer des poumons foudroyant.

Une entrevue avec le réalisateur André Forcier paraîtra dans l’édition de septembre de l’aut’journal.

Coteau Rouge est présenté le 21 août au cinéma Quartier Latin. Il prendra l’affiche le 9 septembre prochain dans plusieurs cinémas du Québec.


Bookmark