Profession : écrivain

2011/10/05 | Par UNEQ

Écrire ne fait pas vivre, concluait Benoit Allaire en 2002, responsable de la première enquête de l’Observatoire de la culture et des communications (OCCQ) sur les écrivains.

Huit ans plus tard, Marie-Hélène Provençal, chargée de projet d’une nouvelle série d’enquêtes sur les professions artistiques et de communication, relève que 65 % des 1 510 écrivains professionnels, soit la population visée par l’enquête, ont tiré moins de 5 000 $ de leur travail de création littéraire. Elle précise que le revenu médian est de 2 450 $, avant déduction des dépenses.

Parmi les 410 écrivains (27 %) qui consacrent plus des deux tiers de leur temps de travail à l’écriture, 51 % se situent dans la tranche des revenus personnels les plus faibles. Non seulement « écrire ne fait pas vivre », mais « plus les écrivains consacrent de temps à leurs activités de création, moins leurs revenus sont élevés ».

Si 81 % des écrivains possèdent un diplôme universitaire (contre 21 % de la population québécoise), leur revenu personnel médian, tous gains confondus, est de 39 400 $, nettement inférieur à celui des Québécois de 25 ans et plus, titulaire d’un diplôme universitaire, qui est de 50 750 $.

Il ressort également de cette enquête, dont les données de revenus font référence à 2008 et les données sociodémographiques à 2010, que la population des écrivains est à prédominance masculine, plutôt âgée, très majoritairement francophone et fortement concentrée dans la région montréalaise.

Quant à la sous-représentation des jeunes, elle pourrait s’expliquer, selon les auteurs de l’enquête, par les longues études de la plupart des écrivains et par l’obligation d’avoir publié deux livres chez un éditeur reconnu pour être considéré comme un écrivain professionnel.

Les revenus tirés de la création littéraire varient selon la catégorie éditoriale. Ainsi, les écrivains pour la jeunesse sont en grand nombre parmi les écrivains dont les revenus de création sont les plus élevés, alors que les poètes et les romanciers, proportionnellement, sont plus nombreux dans la tranche des très faibles revenus.

Les plus courants sont les revenus obtenus du Droit de prêt public, 86 % des écrivains en ayant perçu ; les droits d’auteur (80 %) et les droits de reprographie (76 %) suivent.

Le tiers des écrivains touchent 10 % de leurs gains en revenus de prestation (lectures publiques, conférences, ateliers, etc.), alors qu’un cinquième d’entre eux ont reçu des bourses et des prix représentant également 10 % des gains attribuables à la création littéraire.

Comme la plupart des artistes, des créateurs et des travailleurs autonomes, ils sont rarement couverts par un régime de protection sociale ou de sécurité du revenu.

Finalement, le quart des écrivains, en 2008, n’étaient pas liés par contrat avec une maison d’édition.

Il ressort de ce deuxième portrait approfondi des conditions de pratique de la profession littéraire au Québec qu’écrire est autant, sinon plus, une vocation qu’une profession. À la limite, on pourrait presque dire que la grande majorité des écrivains professionnels paient pour écrire…

Comment les soutenir davantage et les aider à poursuivre l’édification d’une littérature nationale, sans laquelle les cultures québécoise et canadienne ne seraient que peau de chagrin

D’abord, en appuyant les démarches de l’UNEQ auprès du gouvernement fédéral pour que, à l’instar du gouvernement du Québec, il mette en place des mesures fiscales de non-imposition des revenus de droits d’auteur, augmente et indexe le financement du programme de Droit de prêt public, victime de son succès, et modifie en profondeur son projet de loi sur le droit d’auteur qui menace de faire disparaître les sociétés de gestion collective et d’affaiblir considérablement la propriété intellectuelle.

En appuyant également les démarches pour que les deux paliers gouvernementaux cessent de grever les bourses et les prix en les mettant à l’abri des ponctions fiscales, adoptent des mesures pour soutenir financièrement les écrivains âgés et sans ressources et pour que le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec accouche enfin d’une véritable révision de la Loi sur le statut de l’artiste.

Il est injustifiable que, en 2008, le quart des écrivains professionnels aient pu être publiés sans contrat d’édition…


·    Revenus tirés de la création littéraire :

0 $ – 5 000 $ : 65 % ;
5 000 $ – 20 000 $ : 22 % ;
plus de 20 000 $ : 13 % (dont 2 %, c’est-à-dire une trentaine d’écrivains : plus de 60 000 $)



· Temps consacré à l’écriture :

plus des deux tiers : 27 % ;
entre le tiers et les deux tiers : 27 % ;
moins du tiers : 46 %


·    Population des écrivains : masculine : 55 % ; féminine : 45 %


·    Groupe d’âge : 55 64 ans, prédominant en 2010 ; 45–54 ans, prédominant en 2002


·    Lieu de résidence : 44 %, dans l’île de Montréal, en 2010 ; 51 % en 2002 ; présence accrue dans la grande région de Québec et en périphérie de Montréal (hausse de 4 % dans chaque région)


·    Satisfaction quant au travail de promotion, de diffusion et de commercialisation accompli par les éditeurs : satisfaits : 58 % ; insatisfaits : 43 %


(Les écrivains québécois. Portrait des conditions de pratique de la profession littéraire au Québec, 2010, Québec, Institut de la statistique du Québec, OCCQ, 2011, 83 p. : www.stat.gouv.qc.ca/observatoire)


Bookmark