Un programme de fidélisation des couples

2011/10/31 | Par Jacques Fournier

L’auteur est organisateur communautaire retraité

Ne reculant pas devant les innovations sociales prometteuses, et toujours inspiré par l’entreprise privée, le gouvernement Charest a décidé, courageusement, de mettre en place un « programme de fidélisation des couples », copié sur le programme de fidélisation de la clientèle des Supermarchés Métro.

Tout d’abord, vous demandez-vous, pourquoi le gouvernement met-il un tel programme en place ? En qui cela le concerne-t-il ? Il est bien connu que les ruptures conjugales augmentent les coûts sociaux de l’État. Les divorces et les séparations entraînent diverses dépenses publiques, reliées, entre autres, au versement de prestations d’aide sociale à certaines femmes chefs de familles monoparentales. Par ailleurs, les enfants des couples séparés utilisent un peu plus que la moyenne les services des psychologues et des travailleuses sociales dans les écoles. Pour réduire ces coûts, le gouvernement doit agir. Il n’y a pas de petites économies !

Le gouvernement a donc décidé d’offrir sur une base volontaire à tous les couples une « carte de fidélisation », gérée par le ministère de la Famille. Chaque matin, si l’homme embrasse sa femme, il perçoit cinq points sur sa carte. S’il lui apporte des fleurs le soir, vingt points. Si elle l’amène au restaurant, cinquante points. Tous ces points sont échangeables, bien sûr, contre des points-argent qui doivent être troqués contre des services qui renforcent le couple : fins de semaine à deux dans un gîte champêtre, heures de gardiennage d’enfants, Viagra, etc. Il faut être logique. Par contre, une petite chicane fait perdre trente points. Évidemment, une aventure extraconjugale enlève pas moins de 1000 points : c’est un pensez-y bien. Avec ce programme, un homme ou une femme y pensera à deux fois avant de « donner un coup de canif dans le contrat ».

Le programme ne coûte rien au gouvernement : il est commandité par l’entreprise privée, entre autres les Supermarchés Métro. Il est très simple à gérer, contrairement aux autres programmes gouvernementaux. Chaque soir, chacun des membres des couples adhérant au programme remplit sur internet, conjointement et solidairement, une brève fiche indiquant les points gagnés et les points perdus. Le programme auto-déclaratoire se base sur la probité proverbiale des contribuables. Dans un objectif de renforcement positif, et de contrôle indirect par les pairs, le programme est, évidemment, relié à Facebook de façon à ce que vos amis suivent vos efforts pour « nourrir votre couple » Go, Nicole ! Go, Jean ! Go ! Go ! (J’aime) « Big brother », craignez-vous ? Oui, mais convenons qu’il faut faire quelques compromis pour réduire l’épouvantable déficit des fonds publics.

Dans quelques années, le taux de divorce et de séparation au Québec aura chuté significativement. Tous les coûts sociaux reliés à ces événements malheureux auront fondu comme la crème glacée sur un gâteau de noces. Merci, Jean Charest ! Merci, Métro!

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