Contes urbains Édition 2011 à La Licorne

2011/12/02 | Par Marie-Paule Grimaldi

Tant pis pour l’originalité, le temps des fêtes est aussi le temps des traditions! En culture, pour certains, la fin de l’année veut dire revue de l’année, veillée traditionnelle ou Casse-Noisette, mais pour ceux qui aiment les bonnes histoires et le théâtre, depuis 1994, les Contes urbains sont là! Loin du folklore, tentant aussi d’éviter les clichés purs des légendes urbaines, l’édition 2011 se veut légèrement plus grand public et moins provocante qu’à l’habitude, mais demeure consistante.

Il y a tout de même une volonté de nous dépayser dans cette production : tous les interprètes de cette année sont des vedettes d’émissions jeunesse du passé et s’affichent bien sûr hors de cette image de marque, à la limite du contre-emploi.

Mais c’est surtout une solide et prometteuse distribution avec Marcel Sabourin, Louisette Dussault, Marie Eykel, Anne Casabonne, André Richard et Jean-François Gaudet, au service d’une série d’auteurs tout aussi intéressant avec Michel Marc Bouchard, Chrystine Brouillet, Fabien Cloutier et Dominick Parenteau-Lebœuf, Sabourin et Richard offrant leur propre texte. Moins de jeunes, moins de relève cette année, on a plutôt misé sur des valeurs sûres pouvant rejoindre peut-être un nouveau public.

Marcel Sabourin, très égal à lui-même, ouvre la soirée avec des pensées philosophiques plutôt qu’une histoire, dans un exercice pas tout à fait réussi mais inspirant. Marie Eykel le suit avec une histoire 100% Chrystine Brouillet , l’auteure de polar et la chroniqueuse gastronomique qui adore les voyages, des éléments qui seront tous présents dans cette histoire sans grande surprise.

On continue avec Bouboule de et par André Richard, le récit d’une sortie de prison qui se passe plutôt très mal et se décline en diverses horreurs qu’on comprend assez mal, entre chansons de Félix Leclerc et lecture du texte sur feuilles, alors qu’on atteint le moment le plus faible de la soirée.

Mais voilà qu’Anne Casabonne commence le très beau texte de Michel Marc Bouchard, infiniment tragique et pourtant drôle par moment, avec une langue unique, une dure histoire de drame en banlieue qui secoue et que Casabonne interprète avec finesse. On arrive donc à l’entracte avec un enthousiasme renouvelé.

Le retour mérite une note presque parfaite avec le texte assez engagé de Dominick Parenteau-Lebœuf écrit sur mesure pour une Louissette Dussault en pleine forme, et le charme opère complètement. Le clou de la soirée est laissé à un texte de Fabien Cloutier, qui connait bien les Contes urbains et qui excelle dans le genre, avec une histoire d’amour gaie, crue et irrévérencieuse à souhait avec un casting parfait en la personne de Jean-François Gaudet. Le public est alors réchauffé, apprivoisé et accueille avec convivialité une réjouissante vulgarité.

On trouve donc ce qu’on vient chercher aux Contes urbains 2011, soit de l’anti-bon sentiment, du rêve, du sang, du militantisme, de l’humour, quelques vérités et des grossièretés libératrices, et la soirée s’avère au final réussie.

Martin Desgagné à la mise en conte aurait pu pousser un peu plus les interprètes, les diriger afin d’éviter qu’ils tombent dans leur propres tics comme Sabourin ou les amener à donner ce qu’ils ont de meilleur, comme Marie Eykel ne l’a pas fait à la première.

La musique du fidèle Eric Asswad et de Charles Papasoff enveloppe la soirée avec soin et souffle, aussi complice du public que des comédiens. Sans surprise – mais là n’est pas l’effet recherché, les Contes urbains demeurent une tradition dont on ne voudrait se passer.

Contes urbains, du 29 novembre au 17 décembre, La Licorne, 4559 Papineau

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