Comptes publics et contribution santé

2011/12/13 | Par Jacques Fournier

Au début de décembre, le ministre de la Santé et des Services sociaux a rendu public un document intitulé « Comptes de la santé 2008-2009 à 2010-2011 ».

On y ventile les grands postes de dépenses (salaires, RAMQ, etc.) et les principales sources de revenus du MSSS.

Le document explique que le gouvernement a créé, en 2010-2011, un fonds particulier destiné à la santé et qu’il appelle le FINESSS ou Fonds de financement des établissements de santé et de services sociaux. Le FINESSS a consacré, en 2010-2011, entre autres, la somme de 20 M $ pour des investissements à l’égard des personnes âgées, 78 M $ pour les Groupes de médecine familiale (GMF) et divers autres postes de dépenses pour un total de 180 M $.

En théorie, comme aînés, nous pourrions nous réjouir de la création de ce fonds. Mais il y a un hic (je mentionne la situation des aînés, car c’est une « clientèle » vulnérable… dans les mains de politiciens). D’où proviennent les 180 millions ? Ils viennent de la contribution santé, une forme de taxation qui a été presqu’unanimement décriée, car elle taxe les petits contribuables (sauf les plus démunis) autant que les nantis.

Que vous gagniez 25 000 $ ou un million $ par an, vous paierez la même contribution santé : 25 $ en 2011, 100 $ en 2012 et 200 $ en 2013.

Il faut parfois prendre le temps de démailler ce que le gouvernement a tricoté pour nous emberlificoter.

Au fond, il tente de nous faire croire que, pour améliorer les services aux aînés, il fallait absolument qu’il créée une contribution santé uniforme alors qu’il aurait tout aussi bien pu, comme le propose l’IRIS (Institut de recherches et d’informations socio-économiques) et d’autres groupes de recherche innovateurs, ajouter quelques paliers d’imposition pour rendre le système d’imposition plus progressif.

Ce faisant, le gouvernement aurait pu décréter que le produit (ou une partie du produit) de cette hausse irait au fameux FINESSS. Il aurait pu alors générer les mêmes sommes que la contribution santé : 180 millions $ en 2010-2011, 575 M $ en 2011-12 et 945 M $ en 2012-13.

Créer un fonds particulier n’est pas nécessairement une mauvaise idée en soi. Les contribuables sont davantage d’accord pour payer quand ils souscrivent à la destination de la taxe : pour les routes, pour la santé, etc. Mais il y a un effet pervers possible : si le gouvernement multiplie les fonds particuliers, l’acceptabilité sociale des impôts généraux (qui vont par exemple à la lutte contre la pauvreté) pourrait être compromise.

Quant à une hausse du taux marginal d’impôt (le taux payé sur le dernier dollar gagné), rappelons qu’aux États-Unis, la tranche supérieure des revenus des plus riches était imposée à 91 % jusqu’en 1964.

Au Royaume-Uni, ce taux s’élevait à 83 % lorsque Margaret Thatcher est arrivée au pouvoir en 1979. En France, les plus riches payaient entre 60 et 80 % d’impôt sur la tranche supérieure de leurs revenus durant toute la période de l’après-guerre. De nos jours, ces pays ont abaissé leur taux maximal d’imposition autour de 35 à 40 %. (Source) Il n’y aurait donc aucun scandale à augmenter le nombre de paliers d’imposition au Québec… et ailleurs.


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