Alma : Rio Tinto Alcan préparait le conflit depuis un an

2012/01/20 | Par Francis Ouellet

Je n’y crois pas. Le lock-out a peu de liens avec les négociations. Pour Rio Tinto Alcan (RTA), ce conflit n’est qu’une occasion d’affaires. La production est en baisse, mais c’est une conséquence négligeable. Présentement RTA fait d’énormes profits avec la vente d’électricité. Ils font du dumping la nuit vers les États Unis. La baisse de production à Alma, Shawinigan et d’Alcoa diminue les inventaires mondiaux et augmente le coût de la tonne d’aluminium. Déjà, la semaine passé, le coût avait augmenté de 100 $.

RTA possède plusieurs entreprises au Québec. Nous allons servir d’exemple pour les négociations futures. Ils vont tout faire pour rentabiliser leur décision de nous fermer.

Je suis à mon 7ième contrat et je travaille pour Alcan depuis 25 ans. Depuis toutes ces années, c’est la première fois que je voie une telle préparation de la part de l’entreprise.

Ils menaçaient de nous sortir en lock-out depuis un peu plus d’un an. Ils nous disaient sur le plancher « qu’ils allaient mettre des sous-traitants dans tous les services. Que tous les travailleurs qui allaient sortir à la retraite allaient être remplacés par des sous-traitants ».

RTA a très bien préparé le terrain pour la fermeture. Ils savaient qu’en diffusant sur le plancher de telles allégations, leurs offres seraient refusées.

Je les ai tellement pris au sérieux que j’ai vendu ma grosse maison à Jonquière pour m’acheter un petit bungalow près d’Alma, en avril. J’ai payé toutes mes dettes. Je me prépare à ce conflit depuis un an. J’ai demandé à ma conjointe de se trouver du travail, elle a été femme au foyer presque 30 ans.

Pour ceux qui ont des doutes sur cette décision, je leur dis : pourquoi j’aurais accepté de voyager pour me rendre travailler pendant 15 ans sans jamais me plaindre et que, subitement, je décide de changer de vie à l’approche de ma retraite?

Le seul intervenant qui peut mettre fin à ce lock-out déguisé est RTA. Nous avons donné un vote de grève à près de 90%, le but était de négocier à force égale.

Je dis depuis le début : « Ce lock-out n’a aucune raison d’être ». La compagnie nous a sorti sans aucun prétexte valable. Aucune baisse de production, aucun bris sérieux, aucune agression envers les cadres. Malgré tout RTA essaie de faire porter l’odieux par le syndicat.

Il ne faut pas oublier que c’est RTA qui nous a sortie sauvagement le 30 au soir. Le 31 si les travailleurs ne s’étaient pas présentés au travail pour réclamer leur « jobs »,  RTA se serait fait un plaisir de dire que nous étions en grève pour cause de ne pas s’être présenté au travail à la fin de notre contrat.

Présentement nous croyons avoir encore suffisamment de force pour négocier. Mais dans un contexte de mondialisation où le rendement des entreprises est proportionnel à l'appétit démesuré des actionnaires, la disparition des valeurs syndicales sonnerait le glas de conditions de travail décentes et acceptables pour tous.

Nous les 780 travailleurs de l’usine Alma, sommes bien petits devant la machine RTA. D’où l’Importance de nous rallier toute la population du Québec et d’ailleurs.

Avec tous ceux qui croient à la possibilité de garder de bonnes conditions de travail dans le futur pour nos enfants et les générations à venir.

Photo : R-C

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