Le Mouvement des étudiants socialement irresponsables du Québec

2012/03/14 | Par Réjean Parent

Par son nom même, le Mouvement des étudiants socialement responsables du Québec (MESRQ) est une supercherie. En revendiquant une hausse des frais de scolarité, ces étudiants mériteraient beaucoup plus le titre de Mouvement des étudiants socialement IRRESPONSABLES du Québec. Je m’explique.

Il suffit d’écouter le discours même des porte-parole du MESRQ, discours qui leur est soufflé notamment par les prétendus chercheurs de l’Institut économique de Montréal (IEDM), pour prendre conscience de l’énormité de la couleuvre que ces Don Quichotte de la droite essaient de nous faire avaler.


Le sophisme des libertariens du MESRQ

Le problème fondamental des ultraconservateurs qui tirent les ficelles du MESRQ est leur définition même de la société. Pour eux, la société en tant qu’entité n’existe tout simplement pas. Dans leur esprit, la société n’est que la somme d’individus ayant chacun leurs propres intérêts et valeurs. Il n’y a donc pas pour eux de « valeurs sociales » comme nous l’entendons généralement.

Ainsi donc, lorsqu’un libertarien prétend être « socialement responsable », il trompe la majorité des gens à qui il s’adresse. Comment peut-on se prétendre socialement responsable quand on met en doute l’existence même de la société ? C’est d’ailleurs ce que voulait dire l’ex-première ministre britannique, Margaret Thatcher, une héroïne des pamphlétaires du Prince Arthur Herald, lorsqu’elle répondait ce qui suit à ceux qui lui reprochaient ses coupes drastiques dans les programmes sociaux : « La société, ça n’existe pas. Il n’existe que des individus ! »


Quand l’impôt devient du vol

Et puisqu’il n’y a pas de société, l’État brime les droits des individus, leur liberté, lorsqu’il les impose pour financer des programmes sociaux conformes aux valeurs de la majorité des citoyens. Plusieurs libertariens n’hésitent pas d’ailleurs à dénoncer la part des impôts recueillis par l’État pour financer les programmes sociaux comme un odieux vol.

Dans l’esprit des libertariens, l’État doit être réduit à sa plus simple expression se limitant à assurer la paix et la protection de la propriété privée, ainsi que des services convenant moins à la libre entreprise et au marché. Pour le reste, tout devrait être confié au secteur privé. C’est d’ailleurs cette mentalité qui anime les idéologues de l’Institut économique de Montréal (IEDM) et du Réseau Liberté-Québec (RLQ) dans leurs attaques incessantes contre la lourdeur de l’État québécois, leurs appels constants à la privatisation de certains services publics et leur obsession de la dette publique.


La
liberté chérie des ultraconservateurs

Ce n’est également pas le fruit du hasard si les libertariens ont si souvent le mot liberté dans la bouche. À leurs yeux, la liberté, individuelle il va sans dire, est la valeur suprême et toute intervention de l’État pour leur imposer des valeurs sociales est une grave attaque contre leur liberté.

Cette obsession de la liberté individuelle allant jusqu’à nier l’existence de la société est une idée aux conséquences dangereuses. C’est elle qui pousse ces ultraconservateurs à nier le droit de l’État à venir en aide aux plus démunis ou aux sans-emploi. Pour eux, un gouvernement n’a pas le droit de les obliger, en les imposant, à faire preuve de solidarité à l’égard des gens moins privilégiés. À les entendre, il faudrait abandonner les plus démunis à leur triste sort, dépendant de la charité que les plus riches de la société voudront bien leur témoigner sur une base individuelle.


La philosophie du « Aide-toi toi-même ! »

Dans un monde où la société n’existe pas, il va de soi qu’il ne peut y avoir de citoyens. Pour cette raison, vous entendrez rarement le mot citoyen être prononcé par un libertarien. Il était d’ailleurs fort intéressant d’écouter l’une des porte-parole du MESRQ, Arielle Grenier, lors de son récent passage à l’émission Tout le monde en parle. Aux arguments de son opposant dénonçant la hausse des frais de scolarité en invoquant la nécessité de protéger l’accessibilité aux études supérieures pour tous et justifiant la grève par le vote démocratique de la majorité des étudiants citoyens, Arielle Grenier semblait être littéralement sur une autre planète.


Quand les citoyens deviennent de simples clients

Les arguments invoqués par la libertarienne avouée étaient d’un simplisme effarant. Elle ne faisait que répéter qu’elle était une cliente, qui avait payé pour ses cours, et que c’était son droit d’avoir accès à sa classe. Arielle Grenier est allée jusqu’à dire qu’elle n’hésiterait pas à franchir la ligne de piquetage pour se prévaloir de son droit individuel comme cliente afin de recevoir ce produit pour lequel elle a déjà payé.

Sur les ondes de Radio-Canada, Arielle Grenier a alors fait une brillante démonstration de l’idéologie individualiste qui anime les militants du MESRQ qui ont remplacé la société par le marché, un marché quasi divinisé, et les citoyens par de vulgaires clients où votre droit à la liberté, qui leur est si chère, est directement dépendant des moyens financiers dont vous disposez.


La loi de la jungle comme valeurs sociales

Les libertariens et autres ultraconservateurs de même acabit voudraient remplacer les valeurs de la société québécoise, nos valeurs sociales, par une froide loi de la jungle économique, celle qui dit que c’est au plus fort la poche. Ils ont tort.

Le combat que mènent actuellement des dizaines et des dizaines de milliers d’étudiants pour assurer l’accessibilité aux études supérieures à tous les étudiants du Québec, peu importe leurs moyens financiers, est crucial. Le droit à l’éducation pour tous doit être défendu et protégé par l’État québécois pour la simple et bonne raison que l’éducation est une responsabilité qui doit être partagée entre tous.


Des étudiants socialement irresponsables

Les étudiants qui militent pour la hausse des frais de scolarité, inspirés par le Prince Arthur Herald, l’IEDM et le RLQ, ne peuvent certainement pas prétendre au titre de citoyens socialement responsables.

Photo : Radio-Canada

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