Droits de scolarité : la FSS-CSN entre dans la bataille

2012/03/16 | Par Francine Lévesque

L’auteure est présidente de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN)

La Fédération de la santé et des services sociaux manifeste son appui indéfectible à la lutte que mènent actuellement des milliers d’étudiantes et d’étudiants au Québec.

De plus en plus de Québécoises et de Québécois réalisent aujourd’hui la justesse et la nécessité de cette bataille. Il leur apparaît qu’une telle mesure est injuste en plus de venir remettre en question les choix de société que nous avons faits dans les dernières décennies.

Mais pourquoi une organisation syndicale dont les membres œuvrent dans le réseau de la santé et des services sociaux appuie-t-elle la lutte contre la hausse des frais de scolarité?


Pour un financement public des services publics

Nous appuyons la lutte étudiante d’abord et avant tout parce que nous faisons la promotion d’un financement public des services publics.

Le gouvernement se fait le porte-parole de l’idée pernicieuse de l’utilisateur-payeur. Que celui qui utilise un service fasse sa « juste part » nous dit-il! Progressivement, ce type de pensée vient remettre en question un consensus social issu de la Révolution tranquille et voulant qu’au Québec, ce soit par le biais d’un impôt progressif que nous financions nos services publics.

Le recours à l’impôt progressif est en effet l’unique manière d’assurer un financement équitable à la hauteur des moyens de chacun d’entre nous. C’est aussi une façon efficace de réduire les inégalités sociales, de plus en plus criantes dans notre société.

Notre étonnement est grand lorsqu’on entend les chantres de la droite s’indigner que les mieux nantis contribuent à une hauteur plus considérable au financement des services publics. Quel détour sinueux avons-nous collectivement traversé pour que l’impôt progressif devienne une mesure subversive?

En santé comme en éducation, la volonté d’instaurer un paiement de type utilisateur-payeur n’a d’autres conséquences que d’accentuer un peu plus les inégalités sociales, en confinant les moins nantis dans leur situation sociale précaire et en resserrant l’étau autour de la classe moyenne.


Une mesure qui touchera directement les familles de la classe moyenne

La hausse des frais de scolarité de 1 625 $ par année aura un impact direct sur la vie de milliers de famille de la classe moyenne. Ce sont ces mêmes familles qui subissent actuellement les frais de la crise économique, en plus de devoir contribuer à la taxe santé et à la hausse annoncée des frais d’hydroélectricité. Ce sont ces mêmes familles dont sont issus nos membres. Voilà la deuxième raison de notre appui à la lutte étudiante.

Alors que le gouvernement Charest a réduit les impôts et éliminé progressivement la taxe sur le capital depuis 2006, il tente de nous faire croire que la hausse des frais de scolarité est un non-choix, une obligation urgente, sans quoi nous risquons de dévaluer la qualité de nos universités.

Toutefois, ces deux mesures budgétaires que le gouvernement a accordées aux mieux nantis et aux entreprises sont autant de revenus sur lesquels nous ne pouvons plus collectivement compter.

Il est temps que nous cessions de croire à cette fausseté grotesque voulant que la caisse soit vide, qu’il faut que les familles de la classe moyenne se serrent un peu plus la ceinture. Nous faisons chaque jour les efforts nécessaires pour assurer le financement des services publics.

Le discours supposément responsable porté par le gouvernement et la droite n’est fondé que sur des demi-vérités. Si le trésor québécois est aminci, c’est uniquement parce que les choix du gouvernement ont été d’accorder des baisses de contribution aux mieux nantis de notre société. Ce sont ces mesures qui ont diminué les revenus de l’État québécois et ce sont de telles mesures qu’il faut rétablir pour financer nos services publics.


Se sortir la tête du sable

La FSSS-CSN appuie le mouvement étudiant parce que la lutte qui est actuellement menée est de la plus haute importance. Faire reculer le gouvernement sur cette mesure inéquitable bénéficiera non seulement aux étudiantes et étudiants, mais aussi à toute la société québécoise.

C’est en choisissant collectivement de maintenir des frais de scolarité bas que nous sommes parvenus à avoir le meilleur taux de fréquentation postsecondaire au Canada.

C’est ainsi que tant de Québécoises et de Québécois ont pu fréquenter nos universités, alors que leurs ancêtres n’auraient jamais espéré tant.

C’est par un financement public de nos universités et de nos services publics que nous avons pu rattraper le retard historique que le Québec avait accumulé et ainsi devenir le coin d’Amérique où les inégalités sociales sont les moins élevées.

Enfin, dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans le secteur de la santé et des services sociaux comme dans l’ensemble de la société, l’accessibilité aux études est un enjeu incontournable.

C’est tout cela que le gouvernement Charest remet en cause avec sa décision de hausser les frais de scolarité. Qu’il cesse de nous faire croire qu’il est question ici d’une stricte décision budgétaire. Les Québécoises et Québécois comprennent que sa décision n’est qu’idéologique et que son legs à notre société ne se résume qu’au démantèlement.

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