110 millions pour un F-35, c’est trop !

2012/03/29 | Par Marcel Lapointe

S’adressant à un quotidien de Saguenay, le 2 mars dernier, le capitaine Patrick Gobeil pilote de CF-18 tenait ces propos : « La machine est superbe! C’est l’appareil le plus fiable et le mieux entretenu de l’armée canadienne! Je peux accomplir des manœuvres acrobatiques à 3000 pieds d’altitude, descendre progressivement jusqu’à 300 pieds du sol avec le seul appareil capable de faire un tonneau au décollage et le ‘‘looping’’ carré ». Les paroles d’un expert en la matière.

Et le colonel Prévost de la Base de Bagotville de poursuivre que grâce aux CF-18, le Grand Nord canadien est fort et libre; qu’il est prioritaire d’établir notre souveraineté dans l’Article!

La compagnie américaine, Lockheed-Martin, un État dans l’État, s’est, tout à coup, mise à avoir moins d’influence qu’auparavant sur nos politiciens « va-t-en-guerre» conservateurs à Ottawa.

Non seulement à cause de la déconvenue entourant le développement multinational d’avions de combat interarmées, mais aussi parce que l’avion de cette compagnie, le F-35, ne cesse de les décevoir par ses problèmes de conception et son coût unitaire qui pourrait, dépasser plus que les bornes.

Nos apprentis sorciers de la chose militaire commencent à trouver gênant, voire indécent et politiquement non rentable de s’entêter dans leur lubie qui ne frise rien de moins que la démesure et la folie des grandeurs.

En y réfléchissant bien, pourquoi les CF-18 de l’Aviation royale du Canada ne pourraient-ils pas continuer à faire l’affaire au-delà de 2020? C’est la date de fin de vie utile annoncée péremptoirement par tout ce qui bouge de spécialistes en la matière et de porte-parole associés de près ou de loin à l’armée de l’air.

Si la Commission « Mourir dans la dignité » ici au Québec a été capable de nous donner une définition claire de la « fin de vie » d’un être humain, comment se fait-il, depuis des mois que je suis le projet d’achat de nouveaux avions de guerre, ne suis-je pas encore capable de définir l’expression « fin de vie utile » d’un CF-18?

Quels sont les critères mis de l’avant pour dire que les CF-18 auront atteint leur durée de vie utile en 2020 ? L’usure des pneus? Des freins collés et le moteur « encrassé » par une immobilité trop longue de l’appareil? La rouille ou le manque de pièces de rechange? Ces avions qui viennent d’accomplir une mission humanitaire (!?) qualifiée de prestigieuse (!?) parce qu’effectuée aux côtés des Américains, des Anglais et des Français, ont-ils révélé leur inaptitude?

Et les autres missions au Kosovo, en Irak? Combien de CF-18 abattus en 30 ans? Y a-t-il déjà eu quelque défectuosité concernant le largage de bombes?

Environ cinq sorties dans le cadre des missions de l’OTAN, la surveillance du Grand Nord dans le cadre de NORAD, quelques missions de sauvetage et un certain nombre d’heures dévolues à l’entrainement pour ne pas rouiller. Sans oublier un ou deux écrasements lors de démonstration acrobatiques.

Messieurs Lagassé et Massie, professeurs à l’Université d’Ottawa, disaient récemment dans le même quotidien qu’une modernisation des CF-18 pourrait être une option de rechange réalisable à la place des F-35. Avions qu’il nous faudrait payer non 75 millions l’unité comme annoncé jadis, mais plutôt au-delà de 100 millions, ce qui ferait monter une facture déjà salée de plusieurs milliards. 65 milliards au bas mot.

Ce montant, nous ne l’avons pas. La question qu’il faut dès lors se poser: « Avons-nous, Canadiens, déjà très endettés, les moyens d’approfondir davantage notre dette par l’achat de 65 avions F-35 que nous devrons payer 110 millions l’unité, alors que des CF-18 retapés feraient très bien l’affaire pour une mission de bombardement de temps à autre, pour donner des spectacles aériens ou pour surveiller la présence éventuelle d’étrangers dans le Grand Nord canadien?

Poser la question c’est y répondre.

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