Les F-35, l’arme nucléaire et les Artistes pour la Paix

2012/04/11 | Par Pierre Jasmin

L’auteur est Vice-président des Artistes pour la Paix, professeur titulaire à l’UQAM, membre des exécutifs de Pugwash Canada et du Réseau canadien pour l’abolition de l’arme nucléaire, nommé « porteur d’eau » par Eau-Secours et nommé au Cercle des Ambassadeurs de Paix (Genève)

Aujourd’hui, 4 avril, le scandale des avions de combat furtifs et agressifs F-35 éclate dans tout le pays, un scandale que les Artistes pour la Paix dénonçaient en priorité depuis juillet 2010.

Mon université, l’UQAM, est impliquée. La présidente de son conseil d’administration, madame Isabelle Hudon, préside CIRANO et le Conseil des festivals de Montréal. Jusque là rien de répréhensible. Mais l’informatif site www.dontbankonthebomb.com mis sur pied par ICANW.org (International campaign to abolish nuclear weapons) révélait le mois dernier dans sa section du Canada que la Sun Life Financial, présidée au Québec par madame Hudon, est la seule institution canadienne à financer et Lockheed Martin et Northrop Grumman.

Ce sont deux compagnies américaines associées à la construction des bombes atomiques américaines, un objectif encouragé contre le président Obama par les Républicains (« Dieu a créé les États-Unis pour dominer le monde », Mitt Romney, 2011).

Mais ces compagnies sont aussi associées à la construction des F-35 que le gouvernement canadien a eu l’indécence de s’engager à acheter au nombre de soixante-cinq au coût projeté de 29 milliards de $, ce qui représente la gratuité universitaire pour toutes les institutions canadiennes pendant des décennies.

C’est surtout soixante-cinq fois 6500 logements sociaux, selon les chiffres du FRAPRU, seul organisme avec les Artistes pour la Paix et l’Institut Rideau à dénoncer inlassablement depuis vingt-et-un mois cet achat guerrier d’avions sans aucune utilité défensive qui ne font qu’entretenir les lubies militaristes d’intervenir en Iran ou en Chine - sans doute cela donnerait bien des emplois pour leur vie entière, si courte soit-elle, à nos étudiants désargentés que les Forces Armées ne manqueraient pas de solliciter dans leur propagande post-hausse des droits de scolarité…

Le 25 novembre 2010, en un tête à tête orageux avec M. Gilles Duceppe, auquel assistait le bloquiste Robert Dupuy, ex-webmestre des APLP, je semonçais vigoureusement le leader bloquiste pour son vote en faveur des F-35 qui venait d’associer en Chambre des Communes Conservateurs et Bloquistes, battant une motion des Néodémocrates et Libéraux qui voulaient en débarrasser le Canada.

J’ai rappelé cette trahison du bien commun par le Bloc dans un article publié une semaine avant sa déconfiture électorale.

Revenons un peu en arrière. Au Centre Pierre-Péladeau, le 3 mai 2010, je donnais un récital sous la présidence d’honneur de Pierre J. Jeanniot, chancelier de l’UQAM pendant quinze ans. À cette occasion, qui marquait le début de la session du Traité de non-prolifération nucléaire à New-York (ONU), M. Jeanniot a présidé à la remise d’une œuvre d’art par l’artiste pour la paix Frédéric Back à Murray Thomson, collègue à l’exécutif de Pugwash Canada.

Revu à Ottawa à une réunion du Réseau canadien pour l’abolition de l’arme nucléaire, cet aviateur pendant la Seconde guerre mondiale a récolté à ce jour 570 signatures de membres de l’Ordre du Canada pour presser le gouvernement canadien de convoquer une Convention internationale contre l’arme atomique.

J’ai aussi aidé Murray à rassembler rapidement une pétition de 108 collègues universitaires professeurs derrière cet objectif énoncé en priorité en 2008 par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, priorité qu’il a tenu à réaffirmer en sollicitant son 2e mandat.

Un mois et demi après ce 3 mai, le sénateur conservateur et ami de Jeanniot, monsieur Hugh Segal, présentait la motion en italiques au Sénat qui l’a approuvée unanimement, puis le député néo-démocrate Bill Siksay (maintenant à la retraite) réussissait le même exploit à la Chambre des Communes en décembre 2010.

Silence total de nos journaux, qui ont aussi tu notre réunion de tous les partis au Parlement pour relancer cette motion devant l’inaction de M. Harper, le 5 décembre dernier. Ah, j’ai oublié de signaler que Power Corporation est ciblé par ICAN comme financier de Northrop Grumman.

Nos médias n’ont pas rendu compte de la visite à l’UQAM du fondateur des Maires pour la Paix, M. Tadatoshi Akiba, ex-maire de Hiroshima, pour qui j’avais donné deux récitals à titre de président des Artistes pour la Paix.

Ils ont ignoré mon colloque de février 2008 coorganisé avec Louise Vandelac, animé par Dany Laferrière, avec des conférenciers illustres à l’origine de la fondation la même année du Mouvement Sortons le Québec du Nucléaire, avec Dr. Éric Notebaert, alors président des Professionnel-les de la Santé pour la Survie Mondiale, auquel s’est joint Michel Duguay, docteur en physique nucléaire de Yale.

Les coûts de réfection de Gentilly 2 explosent vers les 3 milliards (La Presse, article de Paul Journet, 24 mars 2012) et malgré la conférence de presse que j’ai organisée le 21 mars 2011, le gouvernement libéral dépense encore des centaines de millions, beaucoup plus que ce qu’il croit épargner avec la hausse des frais de scolarité, en vue de ce projet insensé : 275 millions de $ inscrits dans le dernier budget provincial que ni Clément Gignac ni Raymond Bachand n’ont su expliquer, pressés de questions par Bernard Drainville la semaine dernière.

Le nucléaire étant un sujet tabou, aucun journal n’a commenté notre spectacle à la Place des Arts du 26 avril dernier avec Raoûl Duguay, Jici Lauzon, Hélène Monette, Pol Pelletier, Caroline Harvey et nos amis Mohawks et métis en commémoration des vingt-cinq ans de Tchernobyl.

Qu’arrivera-t-il à ma présentation à propos du Plan Nord au Scientifique en chef du Québec, où je m’insurge contre les projets de mines d’uranium, entre autres celui de Matoush dans les monts Otish en territoire Cri ?

La paix sociale est devenue subversive, mais nous avons nommé Dominic Champagne artiste pour la paix de l’année et à la suite de son très bel appel, nous invitons la population à une manifestation pour défendre simplement le Jour de la Terre le 22 avril prochain.

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