Desjardins et Antidote au secours de la langue française au travail

2012/05/03 | Par Isabelle Doré

Au moment où, de l’avis de tous les observateurs québécois, la pratique de la langue française au travail n’enregistre que revers et reculs, quand elle ne stagne pas depuis des années, une annonce faite par le président du Conseil d’administration de la Caisse de la Culture Desjardins, lors de l’assemblée générale du 16 avril dernier, fait état d’une embellie inespérée.

Jacques L’Heureux avait de bonnes raisons d’être fier du rôle qu’a joué sa caisse dans une entente audacieuse intervenue récemment entre deux fleurons québécois : le Mouvement Desjardins et Druide informatique, créateur d’Antidote, l’un des plus grands logiciels d’aide à la rédaction au monde.

On se souviendra qu’en novembre 2011, les lecteurs de La Presse Affaires apprenaient, sous la plume de Francis Vailles, que l’anglais se faisait de plus en plus présent à la Banque Nationale en devenant la principale langue de travail de l’institution, surtout depuis l’arrivée de John Cieslak comme patron du secteur des technologies de l’information.

Pour sa chronique, le journaliste avait recueilli des témoignages de plusieurs employés : « Dans une réunion, s’il y a un seul anglophone sur cinq ou six personnes, la réunion est en anglais », disait l’un, « plusieurs employés ont dû quitter pour trouver un autre emploi en français », disait l’autre. Et tout cela dans un contexte où le premier ministre du Québec et ses ministres de l’Éducation, de la Culture, et de l’Immigration, n’ont de cesse d’affaiblir les mesures de protection de notre langue officielle en adoptant des lois et des mesures pour le moins alarmantes.

Alors qu’on ouvre la porte aux écoles passerelles, à l’enseignement intensif de l’anglais en sixième année, au programme de maîtrise en anglais des HEC, à la fragilisation de l’accès continu à la francisation pour les immigrants, l’article de Vailles ne pouvait faire autrement que d’en faire sursauter plusieurs. On peut compter parmi ceux-là tous les membres du Conseil d’administration de la Caisse de la Culture Desjardins.

Depuis sa création en 1994, la Caisse de la Culture ne s’est pas seulement donné la mission de soutenir et promouvoir la créativité québécoise, elle se définit aussi comme une « institution financière coopérative qui valorise la langue française et son bon usage dans son milieu de travail. » Or, d’aucuns avaient constaté que, parfois, la qualité du français dans les communications écrites du Mouvement Desjardins ne reflétait pas toujours la qualité d’excellence de notre grande institution coopérative. En décembre 2011, lors d’une réunion du Conseil de la caisse de la Culture Desjardins, on décide donc de poser un geste concret.

Druide informatique fait partie de la galerie de réussites commerciales, informatiques et linguistiques au Québec et ce, grâce à Antidote, à sa convivialité et à son efficacité redoutable, qui en font le numéro un mondial des logiciels d’aide à la rédaction.

Des membres du Conseil d’administration de la Caisse de la Culture sont allés rencontrer un responsable de Druide qui les a assurés qu’une installation d’Antidote à grande échelle (en l’occurrence sur la majorité des postes de travail de l’ensemble du Mouvement Desjardins) était techniquement possible.

Les administrateurs de la Caisse de la Culture se sont empressés de transmettre le message à la présidente et chef de la direction du Mouvement Desjardins, madame Monique Leroux. La réponse de cette dernière n’a pas tardé. Le 10 mars 2012, l’équipe d’approvisionnement et technologies du Mouvement prévenait le Conseil d’administration de la Caisse de la Culture du fait que des rencontres avec les techniciens informatiques de Druide avaient abouti à une entente.

C’est ainsi que, le 16 avril dernier, monsieur Jacques L’Heureux pouvait annoncer à l’assemblée générale de la Caisse de la Culture que, bientôt, on allait pouvoir installer Antidote sur plus de 45 000 postes de travail au Mouvement Desjardins.

À l’heure actuelle, la Caisse de la Culture fait office de projet pilote pour voir à la bonne implantation des logiciels, mais on nous dit que tout se passe très bien et que l’antipoison devrait se répandre dans les semaines qui viennent !

Cette initiative du Mouvement Desjardins indique le chemin à suivre à toutes les institutions bancaires implantées chez nous, la Banque Nationale en premier. Elle doit également servir d’exemple à nos grandes écoles, comme les HEC en haut de la liste. En fait, plus qu’un exemple, c’est un geste concret qui dicte leur conduite à toutes nos institutions, en leur rappelant que la francisation de la langue de travail n’est pas un défi technique insurmontable, mais une question de volonté politique.

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