« Check point »  israélien à Dorval

2012/06/01 | Par André Le Corre

Cette année, pour une troisième année consécutive, le projet « Bienvenue en Palestine », prévoyait envoyer, du 15 au 21 avril dernier, des personnes en Cisjordanie pour y rencontrer des associations palestiniennes.

Cette année figurait dans le programme la participation à un projet de construction, près de Bethléem, d’une école internationale moderne pour les enfants palestiniens.

Le rendez-vous était prévu à l’aéroport Ben Gorion, près de Tel Aviv, le 15 avril, et de là, des autobus devaient conduire les participants à Bethléem. Il faut préciser que l’aéroport de Ramallah, en Cisjordanie, ayant été détruit par les forces d’occupation israélienne, Ben Gourion demeure le passage obligé pour se rendre dans les territoires palestiniens.

Il faut aussi rappeler qu’à la suite des accords d’Oslo en 1993, la Cisjordanie a été divisée en trois zones : la zone A, sous contrôle total de l’autorité palestinienne, la zone B, sous contrôle conjoint israélien et palestinien et la zone C, entièrement sous contrôle israélien (qui comprend la majeure partie du territoire de la Cisjordanie).

Bethléem se trouve en zone A donc sous contrôle palestinien et devrait être facilement accessible à tous et toutes.

Pour la troisième année consécutive, Israël a tout fait pour empêcher les participants de se rendre à Bethléem. Sur un total de 1 500 personnes en provenance de neuf pays, une quarantaine seulement a réussi à se rendre à cette ville.

Comme en 2011, les compagnies aériennes ont reçu des listes de noms de passagers qu’elles « devaient » refuser  de transporter.

Nous avons pu, à Dorval, être témoins de cette violation flagrante du droit de libre circulation. Deux des membres de la délégation québécoise avaient reçu, par téléphone de la compagnie Air France, un avis qu’elles ne pourraient pas embarquer à Montréal.

Elles se sont malgré tout présentées au comptoir Air France et il a fallu de longues négociations pour leur permettre d’accéder au vol avec la mise en garde qu’elles seraient refusées sur le vol Paris -Tel Aviv.

Bien sûr, un groupe de militants les ont appuyé avec banderoles et drapeau palestinien et keffiehs. La police était présente, mais n’est pas intervenue, contrairement à ce qui s’est passé à Paris, Bruxelles, Genève et même Istanbul (le gouvernement Turc a-t-il oublié les neufs morts du Mavi-Marmara en 2010?).

À Bruxelles, on a pu voir un escadron de polices anti-émeute avec armes et chiens à l’œuvre. Ceux et celles, qui ont pu se rendre à Tel Aviv, ont dû affronter des centaines de membres de la police israélienne avec le choix de reprendre le prochain vol ou d’être arrêtées.

Comme quoi «Bienvenue en Palestine» n’est pas «Bienvenue en Israël»!

En ce qui concerne la délégation québécoise, qui comprenait 16 personnes, le bilan de l’opération s’établit comme suit: 6 ont réussi à atteindre la Cisjordanie, 5 ont été interdit de vol à Paris et 5 ont été refoulées ou emprisonnées à l’aéroport Ben Gourion.

Le cas le plus typique est celui de Charlotte Gaudreau-Majeau, une étudiante montréalaise de 19 ans, qui, après avoir refusé de reprendre l’avion a été emprisonnée dans la prison de Givon en Israël pendant trois jours.

Finalement, après avoir débuté une grève de la faim, elle a été extraite de sa cellule sous le prétexte fallacieux d’un examen médical, et rembarquée de force dans un avion avec menottes et fer aux pieds. Une dangereuse terroriste!!!

Face à ces événements récurrents on se pose la question : Qu’y a-t-il de si terrible en Cisjordanie pour que l’on empêche ainsi les visiteurs de s’y rendre?

La réponse est connue de tous ceux et celles qui ont visité les territoires palestiniens occupés : arrestations arbitraires, «check points» innombrables, meurtres, démolitions de maisons, arrachage d’oliviers etc.… L’horreur totale!

Mais ce qui est le plus révoltant, c’est la passivité des Occidentaux face à une situation dont ils connaissent forcément tous les détails.

Les événements du 15 avril dernier mettent au jour un fait pire encore. C’est qu’il ne s’agit pas seulement de passivité, mais de complicité. Comment des pays souverains peuvent-ils permettre que des compagnies aériennes, sur leur propre sol, refusent de transporter de leurs ressortissants parfaitement en règle aux vu de listes de personnes supposément indésirables, établies par les services secrets israéliens?

L’existence même de ces listes est troublante puisqu’elles mettent en lumière un nouveau délit de portée internationale, le crime d’opinion anti-sioniste. Il faut remarquer que les participants à cette visite de solidarité avec la Palestine provenaient de neuf pays, en plus du Québec, France, Espagne,Angleterre, Suède, Grèce, Italie, Suisse,Turquie.

Au Canada, le ministère des Affaires extérieures avait même déconseillé de se rendre en Israël autour du 15 avril. D’ailleurs, aucun des pays concernés n’a protesté auprès du gouvernement israélien pour les mauvais traitements subis par ses ressortissants.

En dehors de ces violations de droits internationaux reconnus, ce contrôle absolu de l’accès à la Cisjordanie, montre bien que, pour Israël, ces territoires sont déjà, à toutes fins pratiques, annexés. Ce qui rend dérisoire ce supposé « processus de paix » devenu une véritable mascarade.

Fort de l’appui inconditionnel des États-Unis, Israël se croit tout permis. Imaginant déjà avoir réglé le problème palestinien, Israël se consacre maintenant à la préparation à des frappes aériennes contre les sites nucléaires iraniens. (Rappelons qu’Israël possède quelques 200 têtes atomiques).

Reste un problème majeur, c’est la présence en Palestine historique (incluant Israël) de cinq millions de Palestiniens dont la détermination à survivre est inébranlable.

Le Grand Israël, dont les sionistes rêvent depuis si longtemps, ne pourra exister que comme un État d’apartheid. Mais, l’opinion internationale acceptera-t-elle une nouvelle Afrique du sud?

Des observateurs de plus en plus nombreux pensent, qu’à terme, Israël en tant qu’État juif est condamné à l’autodestruction.

Bookmark