Tous responsables ? Vraiment ?

2012/09/12 | Par Jean-François Thibaud

Il est de bon ton par les temps qui courent d’accuser les partisans du vote « stratégique » de pratiquer le « bipartisme aveugle » au point de véhiculer une idéologie du « Parti Unique ».

Personnellement, je crois que si l’on est indépendantiste, il était irresponsable de ne pas voter Parti Québécois aux dernières élections dans les vingt comtés chauds qui ont fini par être perdus. Les données des sondages étaient consultables avant le vote.

C’est ainsi qu’une écrasante majorité d’anglophones et une grande majorité d’allophones ont voté pour le deuxième Parti Unique, le Parti Libéral du Québec malgré un record de corruption inégalé dans l’histoire du Québec depuis Tashereau et Duplessis.

Pour cette partie de l’électorat, le verdict demeure sans appel. Comme disait Michel Rioux dans un excellent billet, « mieux vaut un corrompu qu’un indépendantiste ».

On m’avance que Québec Solidaire, même s’il n’obtient que deux sièges à l’assemblée nationale et en a fait perdre vingt au PQ introduit un élément de radicalité sain dans le débat démocratique.

Je crois que le seul élément de radicalité que Québec Solidaire introduit dans la réalité politique concrète de cette élection, c’est la presque déconfiture du mouvement souverainiste, malgré les circonstances qui lui étaient favorables, et l’annonce d’un possible renversement irréversible du rapport de force en faveur de la droite fédéraliste.

Je suis convaincu que la radicalité la plus grande possible qui pourrait résulter d’une action démocratique pacifique serait la séparation du Québec d’avec le Canada.

À mon sens, tout le reste n’est que verbiage.

Cependant la démarche démocratique et non-violente des Québécois n’implique pas le suicide collectif comme voudrait le pratiquer un certain Nicolas Lévesque, fin psychologue et essayiste des salons radio-canadiens qui déclare sans ambages dans le Devoir : « Nous sommes tous responsables du Métropolis »

Cet extrait est la chute :

« Que faire, alors, quand on se retrouve collectivement devant le Tueur contre les Souverainistes ? Devant le Fou ? L’Anglo ? Il faut faire bouger les symboles, les mélanger, les penser, les mettre en mouvement, casser les images figées et les clichés, admettre la nouveauté, se rappeler qu’il n’y a pas de Bons et de Méchants. Avec toute l’imagination et la créativité que l’exercice exige. On cherche tout de suite à comprendre. Alors qu’il faut d’abord penser. »

Assez intéressant de constater qu'après quelques notables efforts pendant la grève étudiante, Le Devoir retourne à sa médiocrité habituelle en propageant ce galimatias de psycho pop post-moderne qui enjoint les Québécois à se considérer collectivement responsables de la tentative de meurtre de la première ministre Pauline Marois par un extrémiste anglophone.

Dans une interview à Radio Canada littéraire avec un Bizz légèrement inconfortable, ce Nicolas Lévesque déclarait: « On est dans une idéologie de nationalisme exclusif à la limite du fascisme ou on est plusieurs dans une sorte de multiculturalisme où disparaît toute forme d’identité unique rassembleuse possible. »

Faut-il faut comprendre que c’est le Parti Québécois qui pratique le« nationalisme exclusif à la limite du fascisme» et que Québec Solidaire constitue le deuxième pôle de ce monde binaire dans lequel nous sommes enfermés?

Monsieur veut dépasser ce monde binaire pour en faire la synthèse ? Fort bien. Veut-il lancer un nouveau parti de gauche ? Ce parti aurait-il l’étiquette « semi-inclusif » ou « semi-exclusif »? Histoire de bien faire rigoler les organisateurs du deuxième Parti Unique ?

Il est quand même fort décevant de voir Le Devoir se compromettre en publiant de telles sottises et rivaliser avec Radio-Canada qui se surpasse pourtant en cette semaine tristement historique à des niveaux inégalés de propagandes


Tous responsables ? Vraiment ?

Le peuple québécois mérite mieux que ce verbiage en apparence inoffensif. Encore heureux qu’il ait eu, dans l’ensemble, la sagesse d’ignorer ce genre de fatras et les imprécations conservatrices des Duhaime, Martineau et consorts pour tenter, pour la troisième fois de son histoire, d’obtenir sa libération nationale.

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