Brèves syndicales

2012/12/14 | Par Maude Messier

Michigan : 24e « right to work state »

Lansing, É-U. – Ce mardi, le Michigan a adopté une législation faisant primer le « droit au travail », qui élimine l’obligation pour un salarié de payer des cotisations syndicales et limite le pouvoir de négociation des syndicats.

Le Michigan, au cœur de la région industrielle qui longe les Grands Lacs (la « Rust Belt »), constitue le berceau du mouvement ouvrier américain. En devenant le 24e « right to work state », selon l’expression consacrée, c’est un symbole important du syndicalisme qui est mis à mal.

Le gouverneur républicain Rick Snyder, qui a fait campagne pour l’adoption cette législation, a souligné qu’elle « améliorera la vie des familles du Michigan en rendant les milieux de travail plus justes et plus équitables. »

Une vision que ne partagent pas les travailleurs syndiqués ainsi qu’une part importante de la population, à en juger par les manifestations qui se sont tenues cette semaine dans la capitale de l’État, Lansing.

Même le président Obama, de passage dans le Michigan lundi, a déclaré que « ces soi-disant lois appelées right to work n’ont rien à voir avec l’économie. Elles ont tout à voir avec la politique. » Il a ajouté qu’elles confèrent ultimement « le droit de travailler pour moins d’argent ».

Elles ont pour principal objectif de miner les organisations syndicales en diminuant leur membership, en s’attaquant à leur financement, en sabotant leur organisation. C’est à la fois une belle jambette aux démocrates, les syndicats représentant une part cruciale de leur financement et de leur organisation, et une tape dans le dos aux entreprises privées.

Dans un excellent article publié ce mardi, le correspondant à Washington de la CBC, Neil Macdonald, souligne l’aberration de l’appellation « right to work ». Il précise que c’est comme de ne pas reconnaître le mariage gay par une loi qui s’appellerait « Loi pour la défense du mariage ».

À l’époque glorieuse de mouvement ouvrier américain, dans les années 1950, le taux de syndicalisation frisait les 50%. Aujourd’hui, moins de 10% des travailleurs américains sont syndiqués. Dans le secteur privé exclusivement, ce taux descend à 7%.

Selon Neil Macdonald, les syndicats ont parfois couru à leur perte : accointances avec le crime organisé, corruption et régimes de retraite qui menacent les économies de plusieurs États et municipalités.

Les partisans du droit au travail utilisent ces arguments pour dénigrer les organisations ouvrières et faire l’éloge de la liberté individuelle d’adhérer ou non à un syndicat.

Ils allèguent que ces lois sont par ailleurs bénéfiques pour l’économie, prenant garde de taire les répercussions négatives sur les conditions de travail des salariés. Mais il semblerait qu’il y ait effectivement une hausse des activités économiques dans ces États.

« Mais l’on peut aussi argumenter que c’est surtout en raison du fait que les entreprises migrent vers les juridictions qui n’accordent pratiquement aucun pouvoir aux travailleurs, tout comme les compagnies de crédit bougent vers les États où il n’y a pas de loi interdisant les prêts usuraires, comme le Dakota du Sud et le Delaware », de conclure MacDonald.

Néanmoins, ces changements profonds dans le monde du travail ne seront certainement pas sans conséquences, à plus ou moins long terme, pour les travailleurs ontariens, voisins immédiats du Michigan. Concurrence oblige…

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Un premier « Staples » syndiqué

Winnipeg – Les employés du Staples Business Depot (Bureau en gros) situé sur l’avenue Leila, à Winnipeg, se sont prononcés à 65% en faveur de la syndicalisation.

Ils seront représentés par la section locale 832 du syndicat des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce Canada (TUAC).

Il s’agit du premier établissement de la chaîne à se syndiquer en Amérique du Nord.

Le président de la section locale, Jeff Traeger, a souligné que les TUAC avaient une longue expérience dans le secteur des services et de la vente au détail et que c’était donc un choix tout indiqué pour ces travailleurs.

Le syndicat entame les préparatifs en vue de la négociation d’une première convention collective. Aucune date de rencontre n’a encore été fixée.

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La pauvreté au Québec, 10 ans plus tard

Québec – Le 13 décembre 2002, l’Assemblée nationale adoptait, à l’unanimité, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale.

Dans un communiqué soulignant le 10e anniversaire de cette loi, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, ministre du Travail, Agnès Maltais, reconnaît qu’il reste du chemin à faire, mais indique tout de même que « plusieurs actions ont permis de faire reculer la pauvreté et l'exclusion sociale. Il reste néanmoins encore du travail à faire et tel qu'annoncé dans le budget, le gouvernement entend revenir avec de nouvelles propositions ».

De son côté, le Front de défense des non-syndiquéEs (FDNS) profite de l’occasion pour rappeler au gouvernement que le salaire minimum au Québec, malgré les multiples hausses au cours de la dernière décennie, ne permet pas de se sortir de la pauvreté, même en travaillant 40 heures par semaine.

Pour Mélanie Gauvin, porte-parole du FDNS, le salaire minimum n’a pas augmenté suffisamment pour sortir les personnes de la pauvreté, en proportion avec la hausse du coût de la vie.

« Le Québec a plutôt reculé de façon importante par rapport aux autres provinces. Alors qu'il était au deuxième rang au Canada en 2002, notre taux du salaire minimum est maintenant au huitième rang, à la traîne, derrière les autres provinces canadiennes. »

Le FDNS, une coalition qui regroupe 25 organismes populaires et syndicaux, demande au gouvernement du Québec de faire un bilan et de rectifier le tir.

« Une personne qui travaille 40 heures par semaine au salaire minimum devrait avoir un revenu de travail équivalant au seuil de faible revenu de Statistique Canada avant impôts pour une personne seule. Une telle mesure se base sur l'équité et l'inclusion sociale et non seulement la quantité minimale des biens nécessaires à la survie. »

En 2012, le taux du salaire minimum aurait dû atteindre 11,20 $ l'heure selon le FDNS, alors qu’il est de 9,90 $ l’heure. 

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Couche-Tard : Et de 8!

Montréal – Le syndicat des employés du dépanneur Couche-Tard situé au 6331 boulevard Henri-Bourassa Est, à Montréal-Nord, a été accrédité mardi par la Commission des relations du travail (CRT). Il s’agit du 8e établissement de la chaîne à se syndiquer.

Les travailleurs ont remporté cette victoire à l’issue d’un vote secret mardi.

Dans les cas où, suite à une révision de la liste des employés après le dépôt d’une requête en accréditation, seulement 35 % à 50 % des signatures sont obtenues, la CRT organise la tenue d’un vote secret impliquant l’ensemble des employés visés par la requête pour confirmer la volonté de la majorité à se syndiquer.

La CSN déplore que l’employeur ait, une fois de plus, tenté d’influencer le vote par des menaces et de l’intimidation.

« Nous formons un syndicat pour nous faire respecter et mettre fin à l'arbitraire par exemple en ce qui a trait aux horaires de travail. Nous considérons que notre gérant abusait de son pouvoir en nous menaçant pour des riens, en changeant nos conditions de travail au gré de ses humeurs. Ce temps-là est fini ! », a fait valoir une employée, Marie-France Chalifoux.

Rappelons que les employés de Couche-Tard réclament des hausses salariales pouvant aller jusqu’à 12,80 $ de l’heure, le respect des normes du travail, des améliorations quant à la santé et à la sécurité du travail et quatre journées de maladie payées. Ils n’en ont aucune actuellement.

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Les méthodes de Proaction sont une fois de plus dénoncées

Gatineau – Une centaine de professionnels membres de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) ont manifesté, mercredi, leur exaspération envers le projet d’optimisation piloté par la firme Proaction au Centre régional de réadaptation (CRDP) La RessourSe, à Gatineau.

Pour l’APTS, la méthode de Proaction met en péril la qualité des services offerts à la population, notamment en favorisant les services directs au détriment des services indirects.

Par exemple, l’intégration en milieu scolaire d’un enfant atteint de paralysie cérébrale nécessite beaucoup de recherches pour du matériel adapté, de l’assistance technique, de la concertation avec d’autres professionnels, etc. Autant d’actes considérés comme superflus aux yeux de Proaction et pourtant essentiels selon l’APTS.

Outre la baisse de la qualité des services, le syndicat s’inquiète aussi pour ses membres. « La pression à la performance et l'obsession des statistiques pourrissent le climat de travail. Le stress et le découragement sont à leur comble », indique Johanne McGurrin, première vice-présidente de l'APTS. Dans un contexte de pénurie pour ces titres d’emplois, la situation est préoccupante puisque plusieurs professionnels envisageraient de quitter leur poste.

La Fédération de la santé et des services sociaux de la CSN dénonce aussi l’implantation de différents projets d’optimisation confiés à grands frais à la firme Proaction.

En somme, partout où elle passe dans le réseau public de santé, Proaction crée des remous importants, ses méthodes instaurent un climat de travail malsain et tendu. Ses méthodes n’ont rien à voir avec l’amélioration de la qualité des services pour la population selon les syndicats puisque les résultats sont uniquement comptabilisés en termes quantitatifs et non pas qualitatifs.

À l’occasion du conseil fédéral de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), les délégués ont adopté un plan d’action visant à contrer les projets d’optimisation à la sauce Proaction.

« Il est souhaitable que des outils et des processus soient mis en place pour améliorer les soins aux patient-e-s, mais des projets tels que ceux développés par la firme privée Proaction, c'est inacceptable! L'outil qui vise la standardisation des pratiques professionnelles entraine non seulement une détérioration du climat de travail, mais il évacue tout le jugement professionnel et porte atteinte à la qualité des soins et des services », de déclarer la présidente de la FIQ, Régine Laurent.

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Pas de traitement VIP pour le syndicat au Cinéplex du Quartier 10/30 

Brossard – Le cinéma Brossard Dix30, propriété de la chaîne Cinéplex Divertissement, vient tout juste d’ouvrir son premier cinéma VIP au Québec, une installation annexée au cinéma.

Or, en dépit du fait que les employés du cinéma soient syndiqués et que les deux établissements soient non seulement situés au même emplacement, mais également reliés, Cinéplex refuse de reconnaître l’accréditation syndicale des employés du cinéma VIP.

Les travailleurs syndiqués du cinéma, représentés par la section locale 262 de l'Alliance internationale des employés de scène, théâtre, techniciens de l'image, artistes et métiers connexes (AIEST-FTQ), sont actuellement en négociation pour le renouvellement de leur convention collective.

Le syndicat allègue que l’employeur a même demandé aux nouveaux salariés du cinéma VIP de démissionner du cinéma Brossard si leur candidature était retenue au nouveau cinéma VIP.

La section locale 262 est également en négociation dans sept cinémas de Cinéplex.

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RockTenn : 90 travailleurs à la rue

Ville Saint-Laurent – La cartonnerie RockTenn, de ville St-Laurent, a annoncé cette semaine qu’elle fermerait ses portes au plus tard au début de mars 2013.

Quelque 90 travailleurs perdront leur emploi. Le Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier (SCEP-FTQ) a fait valoir qu’il mettrait tout en œuvre pour replacer ces travailleurs. Des rencontres sont prévues avec l’employeur pour tenter d’obtenir le maximum d’opportunités pour les employés.

À l’approche des Fêtes, cette annonce tombe plutôt mal. « On se doutait de quelque chose puisqu'au début de l'année 2012, nous avions fait des concessions afin de garder notre usine en bonne position, mais malgré cela, ça n'a pas été suffisant », a déclaré Claude Vaillancourt, président de la section locale.