Hôpital de Lachine : Pour le moment, je ne peux porter le carré mauve

2013/02/21 | Par Claude G. Charron

L’auteur est Lachinois d’adoption

La photo à la une du Messager de la semaine dernière (le 14 février) nous montrait les maires de Lachine et de Dorval portant fièrement le carré mauve. Le cliché devant servir à ce que leurs concitoyens imitent leur geste, c’est une invitation que je me refuse d’accepter. Pour l’instant du moins.

Au printemps érable, je me fis un devoir d’épingler au revers de mon veston un carré à la couleur très rapprochée de ceux portés par nos deux magistrats. Quand je crois en une cause, je m’implique totalement. C’est ainsi que, quand on imposait à l’urgence de notre hôpital des demi-tours systématiques et imposés aux ambulances qui s’y présentaient, j’ai avec ardeur participé aux manifestations contre ce moyen détourné de faire mourir à p’tit feu une institution hospitalière presque centenaire.

J’ai manifesté pour la survie de notre hôpital, non seulement à titre personnel, mais en tant que président de la section Marguerite-Bourgeoys de la Société Saint-Jean-Baptiste. C’est à ce titre que j’ai présenté un mémoire à une commission d’enquête concernant sa future vocation.

Il reste que je n’ai jamais accepté que la solution à sa survie passe par son affiliation au Centre universitaire de santé McGill. Je suis désagréablement surpris de voir que personne ne réalise comment la direction du CUSM a exercé un chantage éhonté avec la fermeture de 20% des lits uniquement pour que le gouvernement lui accorde quelques millions de plus malgré le déficit de 115 millions accumulés pendant la gestion frauduleuse d’un conseil d’administration présidé par un certain filou, un dénommé Arthur Porter.

Et nos élites politiques, toutes d’allégeance libérale, refusent que l’Hôpital de Lachine réintègre le réseau normal des institutions hospitalières, celui d’être régi par le C3S local. On s’appuie sur le fait que c’est le CSSS Dorval-Lachine-Lasalle qui, dans le passé, avait décidé de changer la vocation de notre hôpital. C’est peu faire de cas qu’à cette époque, Monique Jérôme-Forget avait la sacoche bien garnie pour favoriser l’Hôpital de Lasalle et que notre un peu trop discret François Ouimet ne pouvait faire grand-chose contre le dictat de la grande argentière.

Dernièrement, je me suis présenté à l’hôpital pour une prise de sang. Il arriva que l’infirmière n’avait pas encore placé le garrot autour de mon bras qu’elle me demanda si je voulais bien signer une pétition pour que l’hôpital reste affilié au CUSM. J’avais deux raisons pour ne pas signer, la première étant que je suis contre cette affiliation, la seconde étant qu’on me confortait dans mes convictions puisque trois des feuillets uniquement disponibles dans la salle avaient un énoncé en anglais seulement.

Quand j’ai manifesté tout haut mon indignation, les trois infirmières présentes ont dit que ce sont les soins que l’Hôpital donne aux citoyens qui comptent « et non les banales questions de langue ». J’eus beau leur signifier que, quand des institutions comme la leur communiquent toujours dans les deux langues, elles donnent un message clair aux immigrants, le message que le français n’est pas plus important que l’anglais au Québec. Les trois infirmières, toutes trois d’origine haïtienne, ne semblaient pas me comprendre. Seule une patiente en face de moi semblait saisir toutes les nuances de mon point de vue. Celui que défendait Camille Laurin quand il a parrainé la loi 101.

Au sortir de l’hôpital, trois grandes affiches tapissaient le mur de l’institution, une pour souligner le centenaire de l’hôpital, les deux autres pour nous signaler où étaient rendus les travaux de restauration de l’hôpital. Le tout dans les deux langues. Et encore, sans aucune prédominance du français. Dire que mon ami Mario Beaulieu se bat pour que l’Hôpital de Lachine reste « le seul hôpital francophone dans l’ouest de l’île». Moi qui pensais que les hôpitaux québécois n’ont plus à être francophones ni anglophones, mais québécoises. Uniquement québécoises.

Tous ces constats font que je ne suis aucunement prêt à porter le macaron mauve, ni à signer la pétition pour que l’hôpital reste au CUSM. Je m’exécuterai en ce sens que quand on me dira que le gouvernement actuel refuse d’accorder les 66 millions promis pour l’agrandissement de l’hôpital. Ce qui semble loin d’être le cas puisqu’on nous annonce en plein mur d’hôpital que les travaux sont en phase d’exécution.

J’ai été d’autant plus conforté dans mes positions quand, le 31 janvier dernier, aux mamours d’un Jean-François Lisée, Don Macpherson a répondu que sa communauté est en continuelle compétition avec la majorité franco-québécoise afin d’assimiler le plus grand nombre possible d’immigrants à la culture anglo-saxonne.

Lachine et Dorval constituent un territoire de chasse aux immigrés privilégié pour les Don Macpherson et…Robert Libman. Le 4 février dans The Gazette, celui-ci reprenait la même diatribe contre le ministre Hébert à propos de l’Hôpital de Lachine que celui-là nous avait servi le 20 janvier. Nos deux maires ayant de si encombrants alliés, comment puis-je accepter leur invitation?