Savez-vous ce que c’est d’avoir faim tellement que ça fait mal?

2013/03/28 | Par Amélie Châteauneuf

L’auteure est porte-parole du Front commun des personnes assistées sociales

Le 27 février dernier, votre parti, le Parti Québécois, surprenait tout ce qui lui restait de base sociale-démocrate en annonçant dans la Gazette officielle des coupures massives à l’aide sociale. Ces coupures, les plus importantes des dix dernières années, visent les personnes de 55 à 57 ans, les familles avec de très jeunes enfants et les personnes ayant des problèmes de toxicomanie.

La ministre responsable du dossier, Agnès Maltais minimise l’impact de ces coupures en disant que ces personnes et ces familles pourraient avoir accès à des allocations de 195$, si elles participent à des programmes d’aide à l’emploi.

Or, la ministre refuse de nous fournir des détails et des documents écrits sur ces programmes qui devraient pourtant accueillir des milliers de personnes dès le 1er juin prochain.

Dans ses interventions publiques, la ministre entretient aussi la confusion sur le nombre de personnes affectées par sa réforme, car elle ne parle que des personnes de 55 à 57 ans et ignore complètement les 9500 familles qui seront frappées de plein fouet par les coupures.

Est-ce que ces parents, ces enfants existent pour vous, au Parti Québécois ? Parce que ce sont des personnes aussi, vous savez.

Il est tout-à-fait possible pour le gouvernement de mettre en place des projets d’aide à l’emploi personnalisés, tout en renonçant aux coupures à l’aide sociale que votre parti planifie de mettre en vigueur au 1er juin 2013.

En effet, dans le système actuel, les personnes assistées sociales qui participent à un programme d’aide à l’emploi (avec allocation de 195$) se font déjà couper, sur une base individuelle, leur allocation pour contrainte temporaire à l’emploi (129$). Les coupures collectives prévues pour le 1er juin ne sont donc pas nécessaires.

Mais, si vous choisissez d’aller de l’avant avec cette réforme, soyez certain que des familles vont perdre leur logement, faute de pouvoir équilibrer leur budget après des coupures de 1548$ sur leur budget familial annuel.

D’autres familles ne se retrouveront pas à la rue, mais elles devront couper ailleurs, alors soyez certain qu’il y aura davantage d’enfants et d’adultes dans les banques alimentaires.

Le gros problème avec ça, à part toute la question morale évidemment (mais ça ne semble pas vous déranger plus que ça), c’est que les banques alimentaires n’arrivent déjà pas à fournir pour toutes les demandes.

Bref, la mise en place de votre réforme, ça veut dire plus de personnes affamées. Savez-vous ce que c’est d’avoir faim tellement que ça fait mal, parce que vous n’avez même plus assez d’argent pour payer le bus pour vous rendre à la banque alimentaire ou parce que ladite banque alimentaire n’a plus rien à vous donner ?

Vous ne trouvez pas ça gênant d’être membre d’un parti qui a comme projet de mettre une limite de trois mois aux soins en hébergement que peuvent recevoir les personnes assistées sociales ayant des problèmes de toxicomanie ?

Est-ce que c’est ça que vous voulez comme société ? Non ? Alors vous n’avez qu’une chose à faire : annuler les coupures imposées aux plus pauvres d’entre nous.

D’ici là, la mobilisation populaire contre cette réforme odieuse s’intensifie alors que des évènements ont eu lieu et sont prévus à la grandeur du Québec (pétition, distribution de tract, manifestations à Sherbrooke, Trois-Rivières, Québec, Montréal, St-Hyacinthe, Chicoutimi, etc.).

Nous ne nous tairons pas parce que ce qui est en jeu, c’est la capacité des personnes assistées sociales de se nourrir et d’avoir accès à des soins pour traiter leurs problèmes de toxicomanie. En fait, ce qui est en jeu, c’est la survie de vos concitoyens et concitoyennes.