Phase II des États généraux sur la souveraineté

2013/04/22 | Par Gilbert Paquette

L'auteur est président du Conseil de la souveraineté du Québec

La grande assemblée des États généraux sur la souveraineté du 6 avril 2013 nous a fourni la preuve tangible qu’au delà de nos allégeances partisanes, il y a entre chacun de nous un ciment bien solide, celui de la quête de la liberté, d’une véritable démocratie, de l’indépendance de notre pays.

Si les dernières années ont pu laisser croire que le mouvement vers notre émancipation nationale ralentissait, aujourd’hui nous savons que ce n’est qu’une question de temps et d’organisation pour se donne un deuxième souffle. Comme disait notre poète national, Gaston Miron «  tant que l’indépendance n’est pas faite, elle reste à faire », et nous avons défini ce samedi-là les moyens de le faire.

Tous ceux qui ont participé à l’assemblée du 6 avril ont souligné l’enthousiasme, le vent nouveau, la volonté d’implication et la détermination qui s’y sont manifestés. Même si l’alliance entre partis souverainistes semble difficile sur le plan électoral, l’alliance entre les militants des différents groupes de la famille souverainiste est solide autour de l’objectif.

Les 630 délégués de toutes les régions du Québec, de tous les partis politiques, de la plupart des mouvements souverainistes ou sociaux apportent un démenti éclatant à tous ceux qui aiment bien se moquer ou se désoler de la division des indépendantistes. Cette division elle est électorale comme c’est le cas en Écosse ou en Catalogne où coexistent plus d’un parti pour l’indépendance.

Au contraire, le 6 avril, nous avons fait preuve de convergence et de solidarité au delà des divisions électorales. C’est cette union autour de l’objectif principal que le Conseil de la souveraineté se doit de consolider maintenant autour des États généraux sur la souveraineté.

L’assemblée, réglée au quart de tour, a défini les orientations de la phase II des États généraux sur la souveraineté qui toutes misent sur l’action de la société civile et des citoyens pour remettre au cœur du débat public la question fondamentale de notre émancipation nationale.

Il importe en effet de mettre fin à la confusion qui existe entre cette question existentielle et l’appui ou le rejet des politiques de tel ou tel parti dans le cadre provincial qui nous est imposé de l’extérieur.

L’appui à la souveraineté ou à l’indépendance est un objectif beaucoup plus large. D’ailleurs, l’appui à la souveraineté dépasse celui accordé à chacun des partis. Simplement en additionnant les votes pour du Parti Québécois, de Québec solidaire et d’Option Nationale à la dernière élection et dans les plus récents sondages, on obtient un total de plus de 40%, et donc plus de 50% de la population francophone, sans compter les appuis à la souveraineté égarés à la CAQ ou au parti vert.

Cela signifie une chose incroyable : même sans promotion ou presque de la souveraineté depuis le référendum de 1995, l’appui à la souveraineté demeure majoritaire chez les francophones.

Dans tous les pays qui ont atteint leur indépendance, un mouvement populaire non partisan a pavé la voie. Il faut sortir des rangs partisans pour parler aux citoyens de notre avenir collectif, de citoyen à citoyen.

Pour mettre l’accent sur l’indépendance, il faut cesser d’agir et de discourir les yeux braqués sur l’action partisane. Ce n’est pas notre rôle de défendre toutes les politiques gouvernementales ou de faire la promotion des tel ou tel partis. Il y a des appareils en place et bien financés pour cela.

Concentrons plutôt nos énergies à convaincre nos concitoyens de la nécessité de notre émancipation nationale. Donnons-nous les moyens de concerter les organisations de la société civile, avec l’appui des partis politiques souverainistes, pour créer cette grande coalition de la société civile pour l’indépendance nationale. 

Les décisions de la grande assemblée des États généraux du 6 avril vont toutes dans cette direction. La phase 1 des États généraux a identifié 92 blocages que subit le Québec dans tous les domaines dans le cadre de ce régime canadien qui nous a été imposé unilatéralement en 1867 et en 1982. Les 92 résolutions de la dépendance !

Voilà la réponse du Canada aux 92 résolutions des patriotes de 1837, 175 ans plus tard !

Notre réponse à nous, elle se déploie sur trois plans.

  • Sur le plan de l’accession à l’indépendance, les militants des États généraux veulent définir et s’engager dans une démarche constituante sur la base de la souveraineté populaire, au cours de laquelle on établira un consensus sur la démarche du peuple québécois et les grands principes d’une constitution qui remplacera la constitution canadienne qui nous régit sans notre accord, éliminant ainsi la source des blocages actuels.

  • Sur le plan du développement du Québec, les États généraux définiront des projets concrets que l’indépendance rendra possible sur des questions comme le développement régional, la fiscalité et la sécurité du revenu, le développement durable et le transport, la politique de l’emploi et la main d’ouvre, les ententes de commerce international et le développement agroalimentaire, la culture et les communications.

  • Sur le plan de l’action politique, l’Assemblée demande au Conseil de la souveraineté de créer « une grande organisation permanente de la société civile » dotée d’organes nationaux de communication et de mobilisation pour diffuser le message indépendantiste par une variété de moyens qui ont été répertoriés et qui seront regroupés dans un plan d’action d’ici le début de juin.

En fait, ces orientations répondent aux trois seuls arguments qui restent aux chantres de la dépendance et de la démission nationale. Les indépendantistes sont divisés (sur le plan électoral oui, mais pas sur l’objectif) et incapables de rallier une majorité derrière le projet de pays ; donc, oubliez cela, l’indépendance ne se fera pas.

Cela ne dépend d’ailleurs pas de nous car il faudra l’approbation du Canada et des autres provinces (niant ainsi le droit du Québec à l’autodétermination).

L’indépendance est une obsession sans rapport avec les « vraies affaires », occupons nous de l’économie, comme si la privation de nos pouvoirs économiques, de nos relations internationales et des 50 milliards par années de taxes et impôts envoyés à Ottawa chaque années n’avait rien à voir avec notre développement.

À l’accusation de division nous répondrons par un plan d’action commun soutenus par les mouvements de la société civile et tous les partis souverainistes/indépendantistes.

À notre soi-disant incapacité d’émancipation, nous répondrons en mettant en route une démarche constituante fondée sur la souveraineté populaire, invalidant de fait la constitution canadienne qui nous régit par défaut.

À l’opposition entre économie et souveraineté, nous répondrons par des projets concrets de développement où nous avons besoin de mobiliser toutes les ressources d’un État québécois indépendant.

Au printemps 2012, les citoyens se sont mobilisés pour l’accès à l’éducation, la solidarité sociale, le développement durable. Ces luttes préparent la prise en main populaire de la lutte pour l’indépendance nationale.

Elles nécessitent de passer à un niveau politique global, elles nécessitent l’indépendante pour dépasser les contraintes qui nous minorisent et nous enferment dans l’attentisme et l’impuissance collective. Il est plus que temps de relever le défi.