Brèves syndicales

2013/10/11 | Par Maude Messier


Labeaume, les régimes de retraite et le droit de lock-out

Québec – Le maire sortant de Québec, Régis Labeaume, entend procéder à une ponction de 17 millions $ par année dans la rémunération des employés municipaux de la ville, ce qui représente une baisse de 6% des conditions salariales. Les employés devront également travailler une demi-heure de plus par jour.

C’est ce qu’il a déclaré, mardi dernier, lors du dévoilement du volet « relations de travail » de sa campagne, un enjeu électoral majeur à son avis.

Régis Labeaume veut réduire l’écart entre la rémunération des employés municipaux et celle des fonctionnaires provinciaux, et de la moyenne des syndiqués d'entreprises de 200 employés et plus. Il soutient que cet écart est actuellement de 33% et il souhaite le faire passer à 21%.

« Ce matin, je parle à la population de Québec et non pas aux syndiqués », a-t-il indiqué en conférence de presse. C’est qu’il y a deux semaines, M. Labeaume a fait valoir qu’il était « muselé » par les syndicats et limité dans ses déclarations par le fait qu’un employeur ne peut s'ingérer dans les négociations en s'adressant aux employés syndiqués sans passer par le syndicat (article 12 du Code du travail).

Les sommes récupérées par ces mesures permettraient de payer environ 50% du déficit des fonds de pension de la Ville, selon lui. « S’ils ne veulent pas négocier, nous allons retenir nos augmentations de salaire et on va se payer nous-mêmes. »

Du côté du Syndicat des cols bleus de Québec (SCFP-FTQ), on déplore que M. Labeaume se serve de la campagne électorale pour négocier sur la place publique.

Dans un communiqué paru mardi, le SCFP dénonçait « l'ignorance abyssale du maire en matière de relations de travail », comme en témoigne sa condamnation pour un lock-out illégal des auxiliaires cols bleus en 2012 et pour la sous-traitance illégale de la collecte des ordures ménagères.

Rappelons que Régis Labeaume mène une cabale pour que le gouvernement du Québec adopte les recommandations du rapport d’Amours sur les régimes de retraite qui touchent les municipalités. Il souhaite que les villes puissent bénéficier du droit de lock-out, du droit de décréter les conventions collectives après un an de négociations, de pouvoir tasser les syndicats de l’établissement de la liste des services essentiels. Il remet aussi en question l’objectivité du processus d’arbitrage.

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Gestion Toyota (LEAN) : entre le bien et le mal

Montréal – L’implantation de la méthode de gestion LEAN (ou Toyota) a créé beaucoup de vagues dans le réseau de la santé.

Avec une nouvelle vague d’implantations dans une dizaine d’établissements au cours des prochaines semaines, l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) a voulu documenter et outiller ses membres, qui seront alors plongés dans d’importants changements organisationnels.

Pour faire la part des choses et démystifier l’approche LEAN en milieu de travail, le syndicat a réalisé une vidéo dans laquelle des travailleurs témoignent de leur expérience : ici

L’APTS s’oppose aux projets d’optimisation de type «autoritaire» confiés à des firmes privées comme Proaction, cherchant à dégager des gains de productivité au détriment de la qualité des services offerts à la population et de la détérioration du climat de travail.

Si la ligne est parfois mince et que certains projets LEAN connaissent des ratés, l’APTS participe au processus dans la mesure où il n’y a pas d’abolition de poste, que les conventions collectives sont respectées, et qu’il y a une véritable consultation et implication du personnel aux comités décisionnels.

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Syndicats : la clef dutravail décent

Québec - À l'occasion de la Journée mondiale pour le travail décent, l'Alliance sociale a tenu une journée de réflexion collective sur le rôle stratégique des syndicats, le 7 octobre dernier à l’Hôtel Delta de Québec. Quelque 200 personnes ont assisté à l’événement.

L’Alliance sociale, un regroupement de neuf organisations syndicales et étudiantes représentant plus d’un million de personnes, fait valoir que le déclin relatif des syndicats est une cause importante de la croissance des inégalités économiques, au Canada comme aux États-Unis.

Tables rondes et discussions sur les thèmes suivants étaient au programme du colloque : définition d’un travail de qualité, comparaison des milieux syndiqués et non syndiqués, travail étudiant, travail atypique, modération des coûts salariaux et impacts sur les conditions de travail, les droits du travail et les programmes sociaux, législations « right to work» et légitimité syndicale.

Un débat sur le modèle américain des relations de travail et ses conséquences entre Youri Chassin, économiste à l’Institut économique de Montréal (IEDM), et Pierre-Antoine Harvey, économiste à la CSQ, a clôt la journée.

Pour une liste complète des conférenciers : ici

Une captation vidéo de l’événement doit être disponible ce vendredi : ici

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Règlement chez Rio Tinto Fer et Titane de Sorel-Tracy

Sorel-Tracy – Au terme de plusieurs mois de négociation intense, les 1 200 travailleurs syndiqués de Rio Tinto Fer et Titane ont entériné à 76,5 %, le 3 octobre dernier, l'entente de principe intervenue plus tôt avec leur employeur.

La convention collective des membres du Syndicat des ouvriers du fer et titane, affilié à la Fédération de l'industrie manufacturière (FIM-CSN), était échue depuis le 29 avril 2013.

Le président du syndicat, Jacques Boissonneau, estime que cette ronde de négociation a été l’une des plus difficiles qu’il a connue, mais qu’au final, cette entente protège les emplois des salariés affectés par une réorganisation du travail, priorité du comité de négociation, tout en améliorant la rémunération globale.

Par exemple, certaines catégories d'emploi, particulièrement dans l’entretien, seront appelées à disparaître parce que confiées en sous-traitance, sans toutefois entraîner de mise à pied. L'employeur s'est aussi engagé à ne pas utiliser la sous-traitance pendant un éventuel conflit de travail.

« Nous avons dû faire des choix parfois déchirants en raison du contexte économique très précaire, mais aussi à cause de décisions d'affaires discutables de Rio Tinto, comme l'achat d'Alcan à un prix exorbitant en 2007 », a-t-il déclaré, ajoutant que cette transaction a entraîné une dépréciation de certains actifs de l'entreprise, qui se chiffrait à plusieurs milliards de dollars.

La nouvelle convention collective, en vigueur jusqu'au 29 avril 2019, prévoit une hausse globale de la masse salariale de 35,7 % pour la durée de la convention collective, laquelle pourrait même atteindre 41,9 % si l'inflation s’avère de 2,2 % par année.

Ces bénéfices incluent notamment des hausses des salaires de 14 %, une indexation des salaires selon une formule avantageuse de protection des revenus et des améliorations au régime de retraite.

Rappelons qu’au printemps dernier, alors que s’amorçaient les négociations, la direction de Rio Tinto Fer et Titane annonçait la mise en place d’un plan de restructuration faisant craindre des pertes d’emplois. On parlait alors d’au moins 230 emplois.

Joint par l’aut’journal, Jacques Boissonneau confirme que ce plan ne faisait pas partie de la négociation et qu’une soixantaine de mises à pied ont eu lieu en septembre dernier.

« Mais de ce nombre, certains ont déjà été rappelés. Combien ce sera de mises à pied au final? On n’en a aucune espèce d’idée, il n’y a rien de défini. »

Le départ à la retraite sera facilité pour ceux qui souhaiteront partir avant le 31 décembre 2014.

Un montant forfaitaire totalisant près de 5 millions de dollars, soit 4000 $ pour chacun des 1200 employés, sera versé à la signature de la convention collective.

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L’avantage syndical en $$$

Ottawa – En 2012, 32% de la main-d’œuvre au Canada était syndiquée. Ces travailleurs gagnaient en moyenne 4,97 $ de plus de l’heure que ceux qui ne l’étaient pas, ce qui se traduit par 786 millions $ supplémentaires par semaine pouvant être réinvestis dans l’économie canadienne.

Vacances, bons salaires, équité, retraite décente, milieux de travail sécuritaires, congé parental : l’action du mouvement syndical entraine des bénéfices pour l’ensemble des travailleurs.

Comment? C’est le sujet de la campagne du Congrès du travail du Canada : «Ensemble pour un monde plus juste».