Gabriel Nadeau-Dubois soulève les congressistes de la FTQ

2013/11/28 | Par Maude Messier


Les délégués avaient de la visite en cette troisième journée du Congrès de la FTQ. Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de la CLASSE pendant le « printemps érable », s’est adressé à l’assemblée mercredi matin pour leur parler de confiance, de lutte et de solidarité.

Face aux attaques antisyndicales et aux politiques néolibérales qui affectent le mouvement syndical, « la seule réponse possible, c’est de se défendre. Pas seulement devant les tribunaux, dans les médias, mais dans la rue, par la lutte », a –t-il lancé, ce qui n’a pas manqué de faire lever la salle, littéralement.

Confiance, a-t-il souligné, parce que les syndicats et les militants ne devraient pas avoir honte de ce qu’ils sont et de ce qu’ils font.

« Il faut que le mouvement syndical reprenne confiance en lui. » Le monde syndical doit, à son avis, s’adapter à un marché du travail qui change. Il a invité la FTQ à demeurer ouverte aux changements, à réfléchir constamment sur ses pratiques et à demeurer l’écoute de ses membres.

« Il y a nécessité de reprendre contact avec les membres. Oui, une remise en question s’impose, les critiques sont là. Ce n’est pas normal que tant de jeunes se désintéressent du mouvement syndical, tant de jeunes qui ne veulent pas être syndiqués. Il faut les écouter et les comprendre. » Et seule une FTQ forte pourra faire face à ces remises en question, a-t-il précisé.

« Mais il faut refuser de remettre en question la solidarité, la justice et le respect que tous les travailleurs et les travailleuses méritent, syndiqués ou non », ajoutant que le mouvement syndical est l’une des raison principales du mieux-être au Québec par rapport aux sociétés voisines.

« En 30 ans, la productivité a augmenté de 30% pendant que salaires ont augmenté de 15%. C’est la moitié. La vérité, c’est que la production augmente, mais pas les salaires. Si les salaires avait augmenté au même rythme, les Québécois auraient en moyenne 6 000 de plus dans leurs poches. Il est où cet argent là, s’il n’est pas dans les poches des travailleurs? »

On reproche souvent aux syndicats de chercher la confrontation. « Depuis 15 ans au Québec, qui confronte, qui attaque, qui détruit? Qui menace les retraites? Qui a instauré la taxe santé, qui coupe dans l’aide sociale? Qui est responsable de deux plus grands conflits de travail? Qui a jeté les travailleurs et les travailleuses du Journal de Québec et de Montréal dans la rue? Oui, il y a de la confrontation, mais il y a de la confrontation parce que le patronat et les partis qui le représentent ont choisi de saboter les moyens de solidarité. »

Sur cette note, Gabriel Nadeau-Dubois n’a pas manqué l’occasion de décocher une flèche au Parti Québécois pour avoir placé Pierre-Karl Péladeau à la tête de la plus importante société d’État québécoise.

Il a conclu avec un appel à la solidarité et à la mobilisation. « Nous ne sommes pas seulement des individus, nous sommes un groupe, une classe, peu importe comment on l’appelle. Et nous avons, comme groupe, des intérêts qui ne sont pas les mêmes que ceux qui nous dirigent. »

Il a rappelé qu’il y a deux ans, les étudiants entamaient la plus grande mobilisation sociale de l’histoire du Québec. « Il n’y a pas de recette miracle, mais un ingrédient essentiel : la mobilisation. La vraie mobilisation, celle qui se fait dans la rue, pas dans les tribunaux, pas dans les salles de réunion. »

GND avait aussi un message pour le maire de Québec, Régis Labeaume. « Je voudrais profiter de cette tribune pour lui dire que sa lutte contre les régimes de retraite, il n’a pas le droit de dire que c’est une lutte pour les jeunes parce que c’est faux », soulignant que les syndicats ne seront pas seuls dans cette lutte qui concerne aussi « tous ceux au Québec qui croient en la justice. »


Solidarité syndicale : lock-out chez Silicium

Comme le veut la tradition, un moment du Congrès est réservé pour les travailleurs en conflit de travail.

Ce mercredi, une délégation des membres de la section locale 184 du syndicat Unifor, représentant les travailleurs en lock-out à l’usine Silicium de Bécancour, est venue à la rencontre des délégués.

Les 145 syndiqués sont en lock-out depuis mai dernier. Depuis juin 2012, l’usine de Silicium à Bécancour est la propriété de l’entreprise américaine Globe Specialty Metals, l’un des plus importants producteurs de silicium au monde.

Rappelons que, voyant se dessiner un conflit de travail, les syndiqués s’étaient prononcés à 99% en faveur d’un mandat de grève au printemps dernier. Mais un lock-out a été décrété avant même qu’ils n’exercent des moyens de pression.

Pendant près de trente minutes, des délégués et des dirigeants syndicaux ont témoigné de leur solidarité envers ces travailleurs. D’abord, avec des mots, mais aussi avec des appuis financiers en soutien à leur lutte. Et les enchères ont monté vite : tout près de 95 000 $ ont été amassés seulement sur le plancher du Congrès.


Une politique énergétique globale

Les délégués ont adopté une déclaration de politique sur l’énergie, déclaration qui s’inscrit dans la foulée d’un colloque tenu en mai 2012 sur les ressources naturelles et l’élaboration d’une politique énergétique.

Par cette adoption, le Congrès dote la FTQ et ses syndicats affiliés de neuf principes et orientations qui guideront leurs actions et leurs décisions : développer des liens avec les groupes environnementaux, sociaux et les peuples autochtones sur des enjeux énergétiques; revendiquer la mise en œuvre de mesures transitoires équitables pour les travailleurs et les communautés affectés par des pertes d’emplois encourues par des changements vers une économie verte; participation des entreprises et de l’État dans le financement de ces programmes de soutien au revenu, de formation et d’adaptation, pour ne nommer que ceux-là.

La déclaration réclame du gouvernement l’élaboration d’une politique sur l’énergie cohérente articulée autour d’une politique industrielle, qui préconise la gestion collective des ressources énergétiques, la création d’emplois et qui favorise l’implantation d’industries de deuxième et de troisième transformation.

Dans l’éventualité où le Québec exploiterait les hydrocarbures sur son territoire à la suite de réflexions approfondies avec les différents partenaires sociaux, la FTQ revendiquerait la création d’une société d’État responsable du développement des ressources fossiles, le respect de normes socio-environnementales plus strictes et une plus grande responsabilité financière des entreprise en cas de dommages environnementaux.

La déclaration comporte aussi un volet sur l’électrification des transports collectifs, de même que sur les tarifs, la préservation du bloc patrimonial et l’utilisation industrielle de l’électricité. Sur ce chapitre, les contrats secrets entre Hydro-Québec et les entreprises doivent être renégociés pour qu’une situation telle que vécue lors du lock-out à l’usine Rio Tinto Alcan à Alma ne se répète pas.

Rappelons qu’en vertu de ces contrats, Hydro-Québec a dû acheter les surplus d’électricité produit par RTA au coût de 148 millions $, faisant dire aux organisations syndicales que le conflit de travail a été en partie financé par l’argent des contribuables.

Pour voir la déclaration de politique sur l’énergie : ici


Résolutions du jour

Au nombre des résolutions débattues sur le plancher du Congrès, notons la prédominance d’un débat sur la possibilité pour des syndicats qui se sont vus contraindre d’accepter que les nouveaux employés ne puissent rejoindre le régime de retraite à prestations déterminées en place de pouvoir permettre à leurs membres de joindre le RRFS-FTQ.

Le Régime de retraite par financement salarial (RRFS-FTQ) est un régime multi-employeurs initialement mis en place pour les employés de la FTQ et pour les syndicats qui ne pouvaient négocier la mise en place d’un régime de retraite. Le RRFS garantie une prestation la retraite venue, mais le risque est entière assumé par les participants au régime.

Le dilemme soulevé par cette résolution, c’est la crainte d’encourager la multiplication des clauses orphelins liées aux régimes de retraite et de déresponsabiliser les employeurs sur cette question, une problématique importante qui devrait d’ailleurs être débattue plus tard cette semaine.

D’une part, il y a donc cette crainte de banaliser, voire légitimer la question des clauses orphelins et, d’autre part, le « test de la réalité » qui confirme que la discrimination est actuellement bien réelle et que de trop nombreux travailleurs, surtout des jeunes, n’ont pas accès à une régime de retraite de qualité. Ouvrir l’accès au RRFS vise à les aider, de plaider les délégués qui ont pris le micro en faveur de la résolution.

Au terme de plusieurs interventions, la proposition a finalement été adoptée. Ainsi donc, dans les milieux de travail où les nouveaux travailleurs n’auront pas accès au régime en place, l’option du RRFS-FTQ leur sera ouverte, à condition que la cotisation de l’employeur pour le service courant soit au minimum équivalente pour les travailleurs effectuant la même tâche dans un même milieu de travail.

Cette condition vise à éviter que les employeurs se débarrassent à rabais de leurs obligations envers les nouveaux employés. En bref, la cotisation leur coûtera le même prix, mais ils n’auront pas la responsabilité de la gestion du risque du régime.

Les RRFS-FTQ, c’est aussi une façon de ramener dans le giron syndical la responsabilité des régimes de retraite et d’offrir à des travailleurs un régime de qualité garantissant une sécurité du revenu à la retraite.

« Un jour peut-être, la FTQ et ses affiliés vont contrôler les fonds de pensions du Québec avec la même philosophie que le Fonds de solidarité. Regarder les rendements du fonds. On est capable, on sera capable avec le RRFS un jour », de déclarer Michel Arsenault, en marge des interventions.


Salutations du Comité jeunes

Quatre anciens présidents du Comité jeunes FTQ, Maxime Valade (syndicats d’Hydro-Québec), Éric Rancourt (AIMTA 712), Dominic Lemieux (Métallos) et Nicolas Lemieux (TUAC 500), ont pris la parole pour remercier Michel Arsenault de son apport pour la pérennité et la continuité du comité.

Ils ont souligné que, sous sa présidence, le camp de formation des jeunes a pris son essor, passant de 35 participants en 2007 à 130 en 2013, avec la mise en place de la semaine de la relève syndicale et les 5 à 7 jeunes visant à favoriser le réseautage avec d’autres organisations jeunesses.

« Quand j’ai su que vous vouliez faire un cocktail avec les jeunes d’autres organisations et surtout, les jeunes libéraux, j’ai eu des craintes. Mais j’ai compris quand les jeunes libéraux ont voulu augmenter et renforcir la loi anti-scab suite au conflit au Journal de Québec. Je me suis dit que les jeunes de la FTQ avaient fait un bon coup! », de répondre le président sortant.


Citation du jour

« C’est dans l’eau trouble qu’on reconnaît les vrais marins. Michel Arsenault, c’est le Mylène Paquette du monde syndical. Il a ramé dans la gravelle! » - Jean Lapierre, chroniqueur politique, alors qu’il soulignait l’ouverture et la disponibilité du président sortant dans une allocution mercredi après-midi.