Les sages-femmes décrochent une entente

2014/01/10 | Par Maude Messier


Après deux ans et demi de négociation avec le ministère de la Santé et des Services sociaux et une importante impasse cet automne qui a donné lieu à un mouvement de mobilisation, les sages-femmes ont finalement entériné ce mercredi une entente de principe dans une proportion de 87%.

L’entente prévoit notamment une bonification de la compensation pour les horaires défavorables et les heures de garde, principal élément en litige.

Jointe par l’aut’journal, la présidente du Regroupement Les Sages-femmes du Québec, Claudia Faille, souligne que, s’il s’agit d’une entente somme toute satisfaisante, elle ne constitue toutefois qu’un pas dans une « bataille vers la justice et l’équité de nos conditions de travail avec les autres professionnelle du réseau de la santé. »

Elle explique que le RSFQ, association professionnelle et porte-parole officiel représentant quelque 150 sages-femmes au Québec, a recommandé l’adoption de cette entente même si elle ne répond qu’à un certain nombre de demandes des sages-femmes.

« Il reste beaucoup de chemin à faire, mais dans le contexte actuel, nous pensions qu’il n’était pas possible d’obtenir plus pour l’instant. »

L’entente qui se terminera le 31 mars 2015 est rétroactive à 2010. Le RSFQ ne fait pas partie, à proprement dit, des négociations du secteur public, puisque les sages-femmes ont un statut de travailleuses autonomes, mais le renouvellement de cette entente se fera au cours de la même période.

Les sages-femmes réclamaient une compensation, en pourcentage des heures travaillées équivalente à ce qui est offert aux professionnels du réseau de la santé, pour leurs horaires défavorables. Le ministère a refusé cette demande, alléguant que la compensation pour les heures de garde inclue ce dédommagement.

Claudia Faille estime que ce n’est que partie remise. « C’est une belle démonstration de notre trop petit rapport de force. Un petit groupe de femmes qui défendent les intérêts d’une profession de femmes. »

Au chapitre de la rémunération des heures de garde, la compensation passe de 1$ de l’heure à 2 $ de l’heure, ce qui revient à une compensation de 16 $ pour une garde de 8 heures. En comparaison, les autres professionnels reçoivent une heure de salaire pour 8 heures de garde, fait-elle valoir. « C’est facile de dire que la compensation est doublée, mais en réalité, on est loin en deçà de la parité.»

Cette problématique, au cœur du litige, repose sur le fait que les sages-femmes ne sont pas reconnues à la hauteur de leurs compétences et que les responsabilités liées à leurs fonctions sont niées selon Mme Faille. Elle souligne que leur statut est pourtant similaire à celui des médecins de famille qui pratiquent en obstétrique.

« Nous faisons le même travail en suivi de grossesse, nous avons les mêmes responsabilités par rapport à l’acte médical qu’est l’accouchement et au suivi post-natal du bébé et de la mère jusqu’à six semaines. »

L’entente qui vient d’être entérinée comprend d’autres éléments, pour la plupart déjà acquis par les autres professionnels de la santé, dont la reconnaissance de la formation universitaire additionnelle, la possibilité de bénéficier d’un congé sans solde pour travailler en région nordique, participer à un projet humanitaire ou développer de nouveaux services de sage-femme au Québec.

Mme Faille estime que la mobilisation des sages-femmes et le soutien de la population ont considérablement contribué à l’avancement de leur cause dans ces négociations. « C’est la première fois que les sages-femmes se battent pour leurs conditions de travail. Et dans cette lutte, nous avons reçu un soutien extraordinaire de la population, des familles qui sont venues dans nos manifestations, ont écrit des lettres au ministère et se sont largement manifesté en notre faveur sur les réseaux sociaux. »

Mme Faille reproche au ministère de vouloir faire des économies sur le dos des sages-femmes alors que leur travail a fait ses preuves. « D’ailleurs, le gouvernement va de l’avant avec le développement des services sage-femme et différents projets d’ouvertures de maisons de naissance. » La profession sage-femme est donc appelée à grandir au cours des prochaines années, ce qui leur permettra aussi d’augmenter leur rapport de force.

Le salaire annuel des sages-femmes au Québec se situe autour de 50 000 $, 55 000 $ en comptant les primes et les gardes. En Ontario, elles gagnent jusqu’à 92 000 $ par année pour du temps complet et jusqu’à 124 000 $ en Colombie-Britannique.


Photo : Ledevoir.com