Coalitions syndicales et coalitions politiques

2014/03/14 | Par Pierre Dubuc


Ce texte s’inscrit dans le débat amorcé entre Alexandre Leduc de Québec solidaire et Pierre Dubuc du SPQ Libre.

Il est une réplique au texte « PKP au PQ : Un cauchemar pour les travailleurs »

Que le premier réflexe d’Alexandre Leduc et des syndicalistes québécois devant la candidature de PKP ait été l’indignation est sain et légitime. Le contraire aurait été inquiétant. Mais du réflexe syndical normal, il faut passer à la réflexion politique.

La vigueur de la profession de foi souverainiste de PKP a surpris les souverainistes et l’ensemble du monde politique, si bien qu’on se demande si nous ne sommes pas devant une de ces « vocations tardives », dont on dit qu’« elles sont les plus ardentes ». Sa présence nous amène à parler de coalition politique.

De toute évidence, Alexandre Leduc confond les coalitions syndicales et populaires avec les coalitions politiques. Les Anglais qualifient souvent les coalitions politiques par l’expression « Politics make strange bedfellows ». Des individus, des groupes ou des pays aux intérêts divergents, voire opposés, s’unissent contre un ennemi commun.

Dans l’histoire récente, la plus illustre des coalitions est celle de la Grande-Bretagne, des États-Unis et de l’URSS contre l’Allemagne nazie.

Nous utilisons à dessein un exemple tiré de la scène internationale pour faire écho à l’exemple de la Révolution iranienne, citée par Amir Khadir. (Qu’on rassure les journalistes, nous ne comparons aucun des politiciens québécois à Khomeiny, Churchill, Roosevelt ou Staline.)

Amir nous dit que les progressistes iraniens n’auraient pas dû participer à la coalition qui a renversé le Shah parce qu’ils n’étaient pas hégémoniques dans cette coalition. Qu’auraient-ils dû faire? Se mettre en marge de la lutte et devenir des alliés objectifs du Shah?

Est-ce l’application à la situation québécoise de ces leçons iraniennes qui a conduit Québec solidaire, lors de son dernier congrès, à exclure toute entente avec le Parti Québécois et Option nationale?

Mais, ne nous y trompons pas, Québec solidaire est également une coalition. En son sein cohabitent une aile souverainiste et une aile fédéraliste.

En témoigne son programme qui prévaut, après l’élection d’un gouvernement QS, une Constituante suivie d’un référendum, dont on a « bon espoir » qu’elle débouche sur la souveraineté, mais qui pourrait tout aussi bien proposer une adhésion à la Constitution canadienne. « L’indépendance si nécessaire, mais pas nécessairement l’indépendance », comme l’a si bien résumé Amir.

En témoigne également l’appui de QS au NPD lors de la dernière campagne électorale fédérale, un appui qu’on rappelle subtilement avec la présence de la couleur orange sur les pancartes électorales de QS.

Dans cette alliance au sein de QS entre deux ailes, souverainiste et fédéraliste, la deuxième domine de façon ostentatoire. Pour QS, le PQ est l’ennemi principal. Les plus âgés y reconnaissent la politique des groupes maoïstes des années 1970. Ne manque que le slogan « Parti Québécois, parti bourgeois ».

Comme le Parti Québécois, Québec solidaire est donc aussi une coalition. Aux électeurs de choisir entre une coalition de souverainistes ou une coalition de souverainistes, de fédéralistes… et d’intégristes musulmans. Nous aurons l’occasion d’y revenir. Politics makes strange bedfellows, indeed!