Fiscalité : Rendez-vous manqués

2014/11/07 | Par Lucie Martineau

L’auteure est présidente générale du SFPQ

Indéniablement, le Québec fait face à de nombreux défis économiques et environnementaux. Avec les changements climatiques, la fin de l’ère pétrolière et l’endettement chronique des citoyens qui résulte de l’accroissement des inégalités, le 21e siècle nous obligera à changer nos façons de faire.

Une partie des solutions apportées proviendra nécessairement de la fiscalité, étant donné qu’il s’agit d’un des outils les plus puissants dont nous disposions pour façonner notre société.

Par contre, la mascarade de la Commission d’examen sur la fiscalité, dont l’objectif restreint est de trouver 650 millions dans un contexte d’austérité, n’est certainement pas l’occasion de grandes réflexions. Les choix de ceux qui l’ont créé étaient déjà faits bien avant que les témoignages ne commencent à s’y faire entendre.

Ainsi, par des moyens depuis longtemps dépassés, les libéraux tentent de nous imposer une logique périmée depuis le 19e siècle. C’est à croire que Philippe Couillard rêve de reprendre la canne, la queue-de-pie et le chapeau haut de forme.

La vente à rabais de nos ressources naturelles, la destruction des outils de redistribution de la richesse, un a priori idéologique au profit de la grande entreprise qui se traduit dans la fiscalité et la réduction de la place de l’État dans l’économie sont autant d’exemples de mesures qui se sont avérées nuisibles depuis bien longtemps.

L’accroissement des inégalités et les catastrophes environnementales actuelles sont d’ailleurs des symptômes de cette « logique » du profit à tout prix. On comprend aisément que les libéraux préfèrent continuer de parler de dette publique et de déficit : on est toujours spécialiste quand vient le temps de régler des problèmes que l’on a soi-même créés.

Rappelons rapidement les derniers mandats libéraux : baisse d’impôt (un milliard), abolition de la taxe sur le capital des banques (500 millions), laissez-faire dans la corruption généralisée dans l’octroi de contrats publics, redevance minimaliste pour l’industrie minière, etc. La dette publique à résorber, nous la leur devons en grande partie.

Comme bien d’autres, nous pensons que nous n’avons pas à sacrifier les acquis d’hier pour faire face aux défis de demain. Au contraire, nous devons, pour avancer, chercher du côté de ce qui n’a pas encore été tenté.

Par exemple, plusieurs pays se sont dotés d’un régime public d’assurance médicaments. Ces régimes ont permis de centraliser l’achat de médicaments et ainsi d’engendrer d’importantes économies (un potentiel d’un milliard pour le Québec).

Nous pourrions aussi limiter les inégalités et la spéculation du même coup en augmentant le taux d’imposition des gains en capitaux à 75% en les rendant inversement proportionnels à la durée de rétention des actifs (ce qui rapporterait 200 millions de dollars). Ces gains ne profitent essentiellement qu’aux plus riches de notre société.

D’autre part, nous sommes contraints d’offrir des crédits d’impôt à des entreprises multinationales qui jouent les pays les uns contre les autres et utilisent impunément des paradis fiscaux pour éviter de payer leur juste part.

Comme plusieurs pays, nous devons arrêter de tolérer ces comportements et réduire les avantages fiscaux que nous leur offrons. Ce ne sont que quelques exemples de mesures concrètes et positives qui pourraient renverser la vapeur et nous permettre d’aller plus loin.

J’invite toutes les citoyennes et tous les citoyens à refuser les limites à la réflexion que tente de leur imposer le gouvernement libéral et à plutôt chercher ce qu’ils espèrent comme société pour nos enfants.