Au hockey avec Gabriel Nadeau-Dubois et Patrick Lagacé

2014/12/19 | Par Martin Lachapelle

Comme le veut la blague classique et ridicule sur le raisonnement binaire, « les bananes sont jaunes, les Chinois sont jaunes, les Chinois sont donc des bananes », la droite anti-carré rouge de Radio X a particulièrement aimé le scoop de l’année publié par Patrick Lagacé sur Gabriel Nadeau-Dubois, dit le « communiste », qui serait apparemment un faux « gauchiste » en contradiction avec ses convictions sous prétexte que GND aime le CH et les millionnaires du hockey…

Quel scoop troublant! GND ne serait pas un vrai « gauchiste » à 200 %... Le chroniqueur de La Presse, Patrick Lagacé, dans « Avec GND, au hockey », aurait démasqué le révolutionnaire vedette de la grève étudiante de 2012 en l’attirant à un match des Canadiens de Montréal. Un scandale ! Busted, le faux « gauchiste » !

Mon carré rouge est en berne. GND, un imposteur ? Je n’ai jamais été autant sous le choc depuis le scandale de Milli Vanilli…


GND piégé ou opération de relations publiques ?

Un révolutionnaire opposé à un projet d’exportation par pipeline du pétrole sale d’Alberta accepte de se faire payer un billet du CH par un journal appartenant à une multinationale ayant des actifs dans cette même industrie pétrolière ?

Voilà peut-être le seul élément contradictoire pour GND dans toute cette affaire, s’il devait s’avérer que La Presse / Gesca / Power Corporation / Total a payé son billet, même si Lagacé n’en a pas parlé...

Pour le reste, on présume que GND ne se serait pas fait « piéger » par Lagacé, comme un flic dans une voiture fantôme ayant incité un automobiliste à courser pour pouvoir ensuite l’arrêter. Car GND, l’intello organique à la Gramsci, n’a pas dénoncé l’article de Lagacé et a même curieusement affirmé que sa passion du hockey s’apparente à une contradiction… Ce qui laisse présumer qu’il se serait probablement prêté à cet exercice « d’autoflagellation » visant à casser son image de radical, via une séance médiatisée de « pipolisation », comme dirait les Français.


Les pseudos dogmes du parfait « gauchiste », selon Patrick Lagacé

« Pendant l'entracte, j'ai glissé à l'oreille de GND qu'il y a quelque chose comme une contradiction quand lui, l'auteur de Tenir tête, pourfendeur du capitalisme débridé, emmerdeur de pipelines, tripe sur un sport de millionnaires... »

Le hockey professionnel et les requins de la finance de Wall Street, même combat, même capitalisme débridé ?

La perle des énormités demeure toutefois le lien entre une passion pour le hockey et l’opposition au projet d’Énergie-Est de GND, « l’emmerdeur de pipelines ». Quand même surprenant que GND n’ait pas fait remarquer à Lagacé que l’opposition à ce projet de pipeline relève pourtant du simple gros bon sens en matière d’environnement, en réunissant à la fois des opposants de gauche et de droite…

Et, comme si les joueurs de hockey, après avoir été longtemps exploités par les propriétaires aujourd’hui milliardaires, devraient s’excuser d’être devenus au moins millionnaires. Que les proprios payent mieux les « petits » employés de tout acabit des équipes professionnelles, entièrement d’accord. Mais les joueurs sont aussi de simples employés et non les patrons.

Le problème avec les écarts de revenu d’une société n’est pas tant la fameuse création de richesse, mais bien plutôt sa redistribution. Et les joueurs de hockey ne sont pas responsables des taux d’imposition et de taxation.

Lagacé n’est peut-être pas millionnaire, mais il est grassement payé et fait peut-être même partie du 1 % des plus riches québécois (dont le seul minimal se situe environ à 180 000$). Selon son propre raisonnement, Lagacé le chroniqueur « gauchiste » n’est-il pas en contradiction avec ses convictions ? Ne devrait-il pas nous inviter à boycotter le journal néolibéral de ses patrons milliardaires détenant Gesca ? On a ben hâte de lire l’article. Il pourrait d’ailleurs s’inspirer de Jean-Pierre Ferland pour le titre : « Lisez pas ça ».


La gauche, condamnée à être plus catholique que le pape

On savait déjà que les personnes qui veulent changer les choses ont le fardeau de la preuve. Tout porte à croire qu’ils ont également le fardeau de la perfection à 200 %.

Les militants de la gauche collectiviste tel que GND devraient détester un sport d’équipe comme le hockey. Les artistes indépendantistes comme Loco Locass ne devraient pas pouvoir obtenir des subventions fédérales même s’ils payent des impôts fédéraux. Et les environnementalistes milliardaires comme Al Gore devraient donner leur fortune et vivre dans un deux et demi pour vivre en consommant un minimum d’énergie. Tous condamnés à être plus catholiques que le pape lui-même.

Un vrai gauchiste en harmonie avec ses principes devrait aussi boycotter tous les artistes ayant eu le malheur de devenir très populaire. Quoi? Tu te dis de gauche pis tu aimes un band de musiciens devenus millionnaires?! Vas te cacher avec ton CD d’artistes capitalistes néolibéraux! Espèce de fan fini de… Rage Against The Machine ?

Selon ce stupide raisonnement manichéen, les amateurs de Loco Locass, un band non millionnaire mais de gauche et indépendantiste, seraient doublement en contradiction d’aimer un groupe fan des riches joueurs du CANADIEN?

Tant qu’à délirer, aucun « gauchiste » digne de ce nom ne devrait posséder un produit quelconque fabriqué par une grande entreprise privée. (Le pire est que c’est pratiquement impossible! On imagine que la gauche est sûrement responsable du manque d’alternative…) Pas de char (un vélo recyclé ou une cariole), pas d’ordi pis pas de téléphone intelligent.

Et attention à la « surconsommation »… même artisanale. Quoi ? Tu possèdes plus qu’une paire de bas tricotés, pis tu vas fêter Noël avec ta famille en faisant un échange de cadeaux équitables fabriqués à la main valant 30 $ ? Méchant matérialiste, le faux « gauchiste »!

Au bout du compte, la droite individualiste agacée par la supériorité altruiste de la gauche collectiviste a toujours aimé répéter que la gauche n’aurait pas le monopole de la vertu. La gauche ne possèderait visiblement que le monopole de l’obligation d’être au parfait diapason avec ses convictions à laquelle la droite n’est visiblement pas tenue.

Car avez-vous déjà vu un seul chroniqueur des grands médias parler des contradictions de la droite individualiste lorsqu’un riche homme d’affaires néolibéral fait un important don à une œuvre de charité ? Ben non voyons. On dit justement que c’est bien la preuve que la gauche n’a pas le monopole de la vertu. Et on critique plutôt les mauvaises langues de la gauche qui soulignent que ce don charitable équivaut à un crédit d’impôts…