La France perd un économiste incontournable

2015/01/09 | Par Gabriel Ste-Marie

L’auteur est économiste et enseignant au Cégep régional de Lanaudière à Joliette

L’Attentat contre Charlie Hebdo a fait douze victimes. L’une d’entre elles est l’économiste Bernard Maris.

Ce libre-penseur a constamment cherché à provoquer notre réflexion concernant notre conception de l’économie et de la société. Il était très critique de l’économie orthodoxe, ayant notamment écrit l’Antimanuel d’économie, Petits principes de langue de bois économique, et bien sûr sa Lettre ouverte aux gourous de l'économie qui nous prennent pour des imbéciles.

Cette critique ne l’a pas empêché d’être salué par ses antagonistes, ayant été nommé membre général de la Banque de France. Il entretenait aussi des rapports cordiaux avec le néolibéral Jean-Jaques Laffont, décédé en 2004, qui enseignait à l’Université de Toulouse, son alma mater.

Bernard Maris était un adepte de la pensée de John Maynard Keynes et trouvait essentiel de bien connaître les penseurs classiques, pour bien comprendre et situer les enjeux actuels. Il écrivait dans Charlie Hebdo. Il a aussi longtemps collaboré à Alternatives économiques et on pouvait aussi l’écouter à France Inter.

Si j’ai été un lecteur assidu de Maris depuis mes études universitaires, c’est à la base parce qu’il était un proche de mon professeur et ami, Gilles Dostaler, décédé en 2011. Ils avaient notamment coécrit Capitalisme et pulsion de mort. Cet essai cherche à rapprocher la pensée de Keynes à celle de Freud, afin de mieux comprendre le désir d’accumulation d’argent infini qui régit notre société capitaliste.

Maris a passablement réfléchit à la place que la monnaie occupe dans la société, comme vecteur de violence. Cet altermondialiste et pacifiste était particulièrement sensible à l’écologie, ayant été candidat pour les Verts aux législatives de 2002.

Auteur prolifique, il a écrit plus d’une vingtaine de livres, dont quelques romans.

L’attentat contre Charlie est une tragédie qui laisse un immense vide dans toute la société française. Avec le décès de Bernard Maris, c’est aussi le monde de la pensée économique qui perd l’un de ses principaux animateurs.