Les voyous

2015/03/18 | Par Michel Rioux

In illo tempore, à une époque où les scieries ne produisaient pas encore de la langue de bois, le chef du NPD, David Lewis, un vrai socialiste celui-là, avait qualifié les grandes entreprises vivant aux crochets de l’État de Welfare Corporate Bums.

On peut constater aujourd’hui que les voyous ont la fâcheuse tendance de se reproduire. Les voyous ne sont donc pas une race en voie d’extinction comme l’est le caribou forestier, par exemple.

Parmi les causes qui ont fait perdre à Produits forestiers Résolu sa certification FSC (Forest Stewardship Council) au Lac-St-Jean, il y a ce désaccord entre les Cris et les Innus autour d’un territoire revendiqué par ces deux nations. Il y a aussi le cas du caribou forestier, que les projets d’exploitation de Résolu menacent d’extinction.

Comme le faisait remarquer quelqu’un, les Étasuniens, grands visionnaires, ont réglé depuis longtemps ces questions. Au Tennessee, des Indiens, il n’y en a plus depuis des lunes, boutés dehors, sinon exterminés. Quant aux bisons, ils ont subi le même sort que les Indiens. Il n’y en a plus depuis des lunes au Tennessee.

Pourquoi parler du Tennessee ? Tout simplement parce que les récents sparages de Produits forestiers Résolu au Québec ne sont rien d’autre qu’un feu d’artifices pour détourner l’attention d’Alma, de Clermont, de Beaupré et de Grand’Mère, où PFR a mis fin aux opérations de plusieurs machines, quand elle n’a pas fermé l’usine, pour transférer sa production au … Tennessee. Un investissement de 100 millions $ !

Il ne faut pas oublier que l’année dernière, les ouvriers de l’usine Volkswagen établie dans cet État antisyndical ont rejeté leur syndicat sous la pression des élites locales ? Il ne faut pas non plus oublier la fermeture de l’usine Electrolux à l’Assomption, en 2014, et son transfert dans ce même État, qui a allongé 150 millions $ à la multinationale pour l’appâter ? Tennessee : un paradis terrestre pour le capitalisme sauvage !


Peut-on attendre autre chose de ces voyous ?

PFR s’appelait d’AbitibiBowater jusqu’en 2011. Quelques semaines avant de se placer en avril 2009 sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers, et alors que des centaines de travailleurs réclamaient ce qui leur était dû au chapitre de leurs caisses de retraite, son président John Weaver s’était vu attribuer une somme de 24 millions $.

L’opération avait été tellement honteuse que même un ministre libéral, Raymond Bachand en l’occurrence, s’en était ému. Indigné, il avait donné mandat aux avocats du gouvernement de s’assurer que la garantie de prêt de 100 millions $ consentie par Investissement Québec ne servirait pas à financer cette prime.

(En passant, c’est une curieuse mentalité qui prévaut dans ces milieux. Que dire en effet de Target, qui se retire piteusement d’un marché canadien mal évalué. En guise de récompense, son président congédié, Gregg Steinhafel, a reçu une somme de 61 millions $ US, un parachute vraiment doré. Pendant ce temps, les 17,500 travailleuses et travailleurs à la rue se partageront une somme de 56 millions $ comme paie de séparation ! On peut vraiment parler ici d’un cheval … et de plusieurs lièvres … )

Question d’argent, le gouvernement Couillard a accordé à Me Lucien Bouchard un contrat de 500 000 $, d’une durée de six mois, pour trouver une solution au différend qui oppose les deux nations autochtones. Si mes calculs sont corrects, il faudra nous priver des objurgations de ce monsieur, totalement absorbé qu’il sera par son mandat. 450 $ l’heure lui sont versés, avec comme conséquence qu’il devra consacrer pas moins de 40 heures par semaine à ce seul contrat. La pauvreté le guette.

Or on peut bien penser ce qu’on veut de Greenpeace, ce ne sont tout de même pas ces écolos qui ont retiré à Résolu quatre certifications FSC . La concurrence se conforme pourtant à cette norme établie, entre autres, par l’industrie du papier elle-même.

Le maire Lâlâ n’est pas foutu de voir qu’il est manipulé par Résolu quand il se livre à un tir groupé, c’est le cas de le dire, contre Greenpeace et les intellectuels. Pour sa part, la CSN soutient que « même si tous les écologistes se retiraient complètement de ce dossier demain matin, ça ne ferait pas en sorte que PFR retrouve sa certification. C'est FSC qui est en charge de ça », a dit le président Jacques Létourneau.

Résolu, qui réduit lentement mais sûrement ses opérations sur le territoire québécois, rend responsable de ses déboires la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier. Résolu veut continuer à bûcher comme dans le bon vieux temps, en coupant à blanc, en massacrant des territoires, en déménageant les populations, aussi bien autochtones qu’animales.


Vraiment, Résolu … ment !