Sables bitumineux et émissions de CO2 irréconciliables

2015/04/10 | Par Greenpeace

À la veille de la rencontre des premiers ministres provinciaux à Québec la semaine prochaine qui portera sur les changements climatiques et la mise en place d’une stratégie énergétique canadienne, Environmental Defence et Greenpeace Canada publient une étude selon laquelle la croissance de l’industrie des sables bitumineux rendrait pratiquement impossible l’atteinte des maigres objectifs du Canada en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).

« C’est ridicule! Les politiciens prétendent lutter contre les changements climatiques, mais souhaitent en même temps augmenter la production de sables bitumineux. Ces deux ambitions sont complètement incompatibles, dénonce Dale Marshall, responsable du programme national d’Environmental Defence. Nos dirigeants doivent comprendre que la lutte du Canada contre les changements climatiques ne pourra pas être efficace tant que les émissions de GES en provenance des sables bitumineux continueront d’augmenter en flèche. »

L’étude Le Canada s’enlise : Comment l'exploitation des sables bitumineux rend impossible toute stratégie énergétique canadienne pour la lutte contre les changements climatiques démontre que les émissions canadiennes ont crû de 18 % depuis 1990. L’Alberta est responsable de 73 % de cette hausse, entraînée par son industrie des sables bitumineux. Tandis que les autres sous-secteurs de l’industrie pétrolière et gazière ont vu leurs émissions se stabiliser ou diminuer, celles des sables bitumineux sont montées en flèche, si bien qu’elles ont doublé depuis l’an 2000.

Si les sables bitumineux poursuivent leur croissance, d’ici 2020, les émissions de l’Alberta, une province qui compte seulement 11 % de la population canadienne, approcheront le total combiné de l’Ontario, du Québec et de la Colombie-Britannique (qui, ensemble, comptent 75 % de la population).

D’après cette étude, les autres provinces et les autres secteurs économiques devront fournir des efforts herculéens pour compenser l’augmentation des émissions en provenance des sables bitumineux et pour que le Canada puisse atteindre ses maigres objectifs de réduction de GES en 2020. Pour y parvenir, il faudrait par exemple convertir tout le parc automobile du pays en véhicules électriques ou faire en sorte que la Colombie-Britannique, les provinces de l’Atlantique et les territoires n’émettent plus de GES (zéro émission de carbone).

« C’est bien de voir les premiers ministres provinciaux constater qu’ils ne peuvent pas parler d’une stratégie énergétique pancanadienne sans que cette dernière fasse également office de stratégie climatique, confie Patrick Bonin, responsable de la campagne énergie-climat de Greenpeace Canada. Les données d’Environnement Canada que nous publions aujourd’hui montrent que tout politicien qui prétendrait qu’il est possible de lutter contre les changements climatiques tout en développant l’industrie des sables bitumineux serait aussi crédible qu’une infopubs promettant qu’on peut perdre du poids sans modifier son alimentation ni faire plus d’exercice. S’ils veulent être crédibles dans la lutte aux changements climatiques, le Premier ministre du Québec et ceux des provinces doivent s’opposer à l’expansion des sables bitumineux et des infrastructures de transport, comme les pipelines, trains et bateaux dont elle dépend. »

L’étude soutient qu’en intégrant la lutte aux changements climatiques à une stratégie énergétique nationale, cette dernière doit avoir comme premier objectif d’accélérer la transition qui éloignera le Canada de la production et de l’usage des combustibles fossiles. « Ce sera un test, ajoute M. Marshall. Cette stratégie nous amènera-t-elle à nous affranchir des combustibles fossiles ou en augmentera-t-elle la production? Une stratégie énergétique favorisant la construction de pipelines aurait moins de valeur que le papier sur lequel elle serait écrite. »

Cette étude paraît à quelques jours de la Marche Action Climat qui aura lieu ce samedi à Québec, où des milliers de Canadiens descendront dans les rues pour exhorter nos élus à poser des gestes significatifs pour la protection du climat.

L’étude est accessible ici.