La jeunesse « réaliste » du sondage de l’Institut du Nouveau Monde

2015/04/15 | Par Pierre Dubuc

Les résultats du sondage Léger-Institut du Nouveau Monde sur l’état d’esprit de la jeunesse, paru lundi dernier dans Le Devoir, sont particulièrement troublants.

Le journal a titré « À l’ère de la génération ‘‘ réaliste’’ – Les 18-34 ans tournent le dos à la révolution sociale ». Cette génération, selon l’analyse du sondage par le journal, « ne compte plus sur l’État, les entreprises ou les syndicats pour améliorer la société ».

Examinons d’un peu plus près leur attitude à l’égard des syndicats. Selon le sondage, 54 % ont déjà occupé un emploi syndiqué, 66 % trouvent que cela a représenté « quelque chose de positif », mais à peine 27 % aimeraient occuper un emploi syndiqué !

Incompréhensible comme attitude? Pas si on met ces résultats en relation avec les réponses à une autre question. Près de la moitié des 18-34 ans (43 %) ont déjà songé sérieusement à fonder une entreprise et à devenir leur propre patron!

Comment Le Devoir a-t-il pu qualifier de « réaliste » une jeunesse avec un rêve aussi irréaliste ? !

En fait, il existe une réelle possibilité que ces jeunes deviennent « leur propre patron », c’est-à-dire qu’ils soient du nombre de ces travailleurs autonomes, mal payés, sans protection sociale, souvent à temps partiel, qui forment aujourd’hui un contingent en pleine expansion, qui représente déjà plus de 15 % de la main-d’œuvre au Québec!


Une jeunesse qui plaît à Mariol Dumont et Richard Martineau

En ces temps de « manifestations étudiantes » et de « saccages d’universités », Mario Dumont et Richard Martineau n’allaient pas manquer si belle occasion.

Dès le lendemain, ils commentaient dans le Journal de Montréal le sondage. Pour Martineau, c’est une « jeunesse québécoise ni rose ni noire » et pour Dumont, c’est « l’autre jeunesse québécoise ». Enfin, s’exclament-ils en chœur, une jeunesse « pragmatique ».


La solidarité, selon Martineau

« Terminée, écrit Martineau, l’époque où les Québécois levaient le nez sur les entrepreneurs. Les jeunes rêvent désormais de fonder leur propre entreprise – afin, j’imagine de mieux contrôler leur avenir et, pourquoi pas, leur emploi du temps ».

Martineau enchaîne : « La meilleure façon de bien aider les autres est d’abord de s’aider soi-même. En fondant une entreprise, tu assures ton avenir. Mais tu crées aussi des emplois et tu participes à remplir les coffres du gouvernement ».

En fait, si 43% fondent leur propre entreprise, ils ne pourront pas créer beaucoup d’emplois, faute de travailleurs disponibles.

De plus, ajoute le chroniqueur transformé en orienteur écologiste, tu peux « créer des entreprises spécialisées dans la fabrication de technologies vertes » et « tu participes à la croissance économique tout en travaillant à créer un monde moins polluant ».

Wow ! « Qui a dit que l’économie et l’écologie ne pouvaient pas coucher dans le même lit? », d’écrire Martineau en concluant : « Ça montre que les jeunes ne sont ni égoïstes ni naïfs. Ils continuent à rêver à un monde meilleur… mais ils gardent les deux pieds sur terre ».

Et, bien entendu, selon Dumont et Martineau, les « rêveurs », les « idéalistes », les chantres des « lendemains qui chantent », ce sont ces étudiantes et ces étudiants qui prennent la rue pour dénoncer les mesures d’austérité!