Peut-on accroître le militantisme et le bénévolat chez les aînés ?

2015/08/24 | Par Jacques Fournier

L’auteur est organisateur communautaire retraité

De nombreux organismes communautaires ont besoin de bénévoles. Peut-on favoriser une augmentation du militantisme et du bénévolat chez les aînés ? Si oui, comment ?

 

26% des aînés font du bénévolat

Selon le Réseau de l’action bénévole du Québec et l’Institut de la statistique du Québec, plus de 2,4 millions de Québécoises et Québécois âgés de 15 ans et plus font annuellement du bénévolat au Québec. La proportion de bénévoles parmi les 65 ans et plus est d’environ un quart (26,4 %) alors que 32% des Québécois âgés de 15 ans et plus font du bénévolat auprès d’organismes. Les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont le groupe d’âge qui ont le plus haut taux de bénévolat (66%). Par contre, ils donnent beaucoup moins d’heures que leurs aînés: les jeunes de 15 à 19 ans fournissent 110 heures en moyenne par an comparativement aux personnes âgées de 65 à 74 ans, qui donnent 231 heures en moyenne.

Le nombre total d’heures que les personnes âgées de 65 ans et plus offrent compte pour près du cinquième (19 %) des heures dont profitent les organismes au Québec. Les aînés ont une plus grande disponibilité mais, par contre, leur état de santé est souvent plus fragile.

 

Déterminer nos priorités

Quand on arrive à la retraite, on doit redéfinir nos priorités de vie. Certains choix s’imposent rapidement : si notre entourage immédiat a besoin d’aide, on se retrouve aidant naturel (ou proche aidant). On peut évidemment concilier plaisir et responsabilité : la garde des petits-enfants est habituellement plus gratifiante que l’entretien ménager chez un beau-frère malade. La théorie de la pyramide des besoins de Maslow s’applique ici : il faut combler les besoins essentiels dans notre environnement immédiat avant, par exmple, de faire du bénévolat pour le club de loisirs voisin. L’état de santé est par ailleurs un facteur déterminant de la capacité à s’impliquer.

L’objectif est d’avoir une retraite équilibrée : sport et plein air (se tenir en santé), loisirs et culture, voyages, voir les amis, cours de toutes sortes, etc. Chacun varie le dosage entre les diverses activités possibles. Normalement, il y a place dans cet équilibre pour le bénévolat. Tout simplement parce qu’on se dit : il faut rendre un peu ce qu’on a reçu. Quand on étudie les diverses motivations possibles du bénévolat (suivre l’exemple des amis, se constituer un réseau, rencontrer des gens, mettre à profit compétences et expériences, être personnellement touché par la cause, contribuer à la communauté, etc.), on se rend compte que plusieurs de ces motivations rejoignent les préoccupations réelles des aînés.

Depuis sept ans que je fais du bénévolat-militantisme à l’AQDR (Association québécoise pour la défense des droits des retraités), j’ai constaté cependant que plusieurs personnes que je croyais être des bénévoles potentiels (des baby-boomers avec de belles expériences au plan professionnel) ont choisi d’une certaine manière de « lever le nez » sur le bénévolat. Elles préfèrent faire davantage de sports ou avoir davantage de loisirs personnels. On pourrait poser l’hypothèse que l’individualisme que certains aînés prêtent aux jeunes en général caractérise également une partie des personnes plus âgées. Cette question mériterait d’être approfondie. Quelles sont les valeurs reçues ? Quelles sont les valeurs que l’on veut transmettre ? Dans quel genre de société voulons-nous vivre ? Qui suis-je ? Un consommateur passif de loisirs et de gratifications matérielles ? Un (modeste) acteur social ? Un cynique qui croit qu’on ne peut rien changer ou qui utilise cet argument pour « se défausser » ? L’idée n’est pas de faire la morale mais de réfléchir collectivement aux implications du « vivre ensemble ».

Il n’y a pas de bénévole parfait. Il n’y a pas de combinaison parfaite et unique sports/plein air - aide de proximité – loisirs/culture – voyages – visite aux amis - cours – bénévolat - etc. Mais que penser de la cohérence de la personne aînée qui dénonce verbalement (et à satiété) ce qui ne va pas bien dans la société et qui ne lève pas le petit doigt pour contribuer à changer les choses ? La société civile n’a-t-elle pas besoin de ses aînés ? (Et on rejette évidemment ici le bénévolat comme substitut possible des services publics sous-financés).

Plusieurs ont constaté que la génération qui précède celle des baby-boomers, donc celle ayant présentement plus de 70 ans, a été et demeure fortement présente dans le bénévolat. Cette génération a été nourrie, entre autres, par les valeurs chrétiennes : elle a été active dans la paroisse, dans les organismes de charité, dans les organismes communautaires locaux en général. Les baby-boomers, peut-être un peu moins proches de la religion, ne sont généralement pas liés à de tels réseaux. Par contre, on observe que les personnes qui ont été engagées socialement avant leur retraite (syndicat, groupes divers, etc.) ont plus de chances de rester impliquées après la retraite.

 

Avoir du plaisir

Il n’y a pas de recette magique pour augmenter la militantisme et le bénévolat chez les aînés. Un ingrédient essentiel : il faut avoir du plaisir en faisant du bénévolat. Sinon, on abandonne vite. Il faut avoir de l’agrément à retrouver les membres du groupe. Dans le cas d’un organisme de défense des droits comme l’AQDR, la motivation des bénévoles et des militants est souvent la colère face au non-respect des droits des aînés. La capacité d’indignation est essentielle. Alors si vous êtes enragé d’entendre des nouvelles déprimantes concernant les services aux aînés (austérité, coupures de services, négligence, etc.), ne vous gênez pas pour vous impliquer.

 

L’altruisme et le bonheur

De nombreuses études l’ont montré : l’engagement et le bonheur vont de pair. Est-ce l’altruisme qui contribue au bonheur ou le bonheur qui favorise l’engagement ? A vous d’en décider !

 

Photo : http://www.rabq.ca/